Quels conseillers municipaux et ruraux pour 2014 ?
Aujourd’hui comme hier, la gestion de proximité de notre environnement économique et sociale relève des partis politiques à travers des élections municipales, rurales et régionales régies par le code des collectivités rurales. Plus de 60 ans après les indépendances, la fracture économico-sociale s’élargit de plus en plus entre les habitants et les élus locaux, qui, au demeurant restent parfois de parfaits inconnus pour leurs mandants. Le Maire élu par des alliances de partis ou par un parti majoritaire, et qui parfois n’habite même pas le quartier ou la communauté rurale, reste très lointain des préoccupations des habitants de la localité
Aujourd’hui, le constat qui se dégage du perçu des principaux concernés est que les politiciens ne sont mus que par l’appât du gain, et même du gain facile. A l’heure où l'on parle de démocratie participative et de développement durable, la question qui me taraude l’esprit est : n’est-il pas temps que l’on s’oriente vers les associations de proximité non confessionnelles, non affiliées à un parti politique, aux organes réels de la société civile pour mieux développer ce sentiment d’appartenance qui permet d’améliorer les résultats.
Gestion de proximité = sentiment d’appartenance
A l’instar du football, sport roi dans notre pays, qui ne draine plus du monde pour ses activités d’élite (championnat national ou ligue pro et ligue amateur) mais refuse du monde quand il s’agit des activités du mouvement navétane plus proche des populations, nos partis politiques sont dans la plupart des cas des coquilles vides. En effet, il suffit lors de leurs manifestations locales d’interdire les cars «Ndiaga Ndiaye» ou les bus pour constater que les 4/5e ne peuvent même pas remplir une salle de classe ; c’est ainsi que certains les appellent «partis cabines téléphoniques».
Sur plus de 130 partis existant au Sénégal, combien d’entre eux ont des réunions de bureaux politiques régulières ou de rencontres du comité directeur ? Combien d’entre eux ont tenu une assemblée générale statutaire en dehors de leur AG constitutive ? Combien de partis politiques fonctionnent correctement de la base au sommet ? Donnez-moi, svp, les noms des partis qui ont une structuration correcte, démocratique, et dont le pourvoi des postes de responsabilité ne relève pas du fait du prince ?
Les partis politiques sont articulés généralement autour de la seule personne du responsable moral, qui décide de tout en tout lieu et à tout moment. Et pourtant les leçons d’une démocratie participative nous viennent de partout à travers le monde et même dans certaines structures associatives internes. Cependant force est de constater que les Sénégalais, dans leur grande majorité, ont le «pouvoirisme» dans le sang et s’accrochent à leurs prébendes, si infimes soit-il.
Cependant, les associations de proximités sont parfois dans certaines localités très nombreuses et participent de manière dispersée à la satisfaction des besoins locaux ; cependant un élément catalyseur, «un agrégat des associations» existe depuis quelques années au Sénégal, mais ne participe pas de manière durable et centrifuge à l’essor de son environnement par les tares congénitales liées à sa naissance, je veux parler des «Conseils de quartier». En effet, les Conseils de quartier sont nés dans un environnement défavorable lié à la sauvegarde de leurs prérogatives...
Cependant, en ce début de 21e siècle, où les exigences de la population en matière de démocratie ne sauraient se satisfaire d'un vote tous les cinq ans, l’exercice de la démocratie représentative doit être complété par des dispositifs de démocratie participative pour favoriser l’expression citoyenne et donner à chaque habitant un rôle véritablement actif dans l’élaboration et la conduite des politiques municipales, régionales et nationales.
Les Conseils de quartier ou de village sont au centre de ces dispositifs. Pour améliorer la qualité de vie et de travail dans le quartier, faire s'exprimer des attentes et émerger des solutions d’intérêt général, développer le lien social, la solidarité, les élus de l’arrondissement, de la ville et l'Etat ont besoin des habitants, de leur expression, de leur participation à la décision, de leur implication la plus forte. Le Conseil de quartier ou de village a donc à la fois vocation de faire remonter les attentes des citoyens, de les informer sur les projets de la Commune ou Communauté Rurale, de leur donner les moyens d’agir et de peser sur leur cadre de vie. Rendre les citoyens acteurs de la décision, c'est aussi donner un contenu pragmatique à l'exercice de la citoyenneté ; être citoyen, c'est avoir droit de cité, c'est être partie prenante de ce qui se décide dans le Quartier, dans la Commune, la Communauté rurale, la Ville, la Région.
Proposition de modification du code électoral et du code des collectivités locales
La réalité de notre vécu quotidien devrait pousser l’Etat à réviser les dispositions de ces 2 codes en vue de mieux répondre aux exigences de la démocratie participative et de mieux satisfaire les besoins des populations de base. L’Etat doit organiser la collectivité en supervisant le recensement des habitants de chaque quartier ou village ou regroupement de quartier ou de village , et les élections des bureaux des conseils de quartier ou de village par les préfets et sous- préfets .la durée de leurs mandats sera définie dans le code des collectivités rurales.
Dans chaque Arrondissement ou Communauté Rurale, il sera organisé un conseil municipal ou rural composé d’un nombre (X) de représentants de chaque conseil de quartier ou de village ; l’élection du Maire ou du Président de la communauté sera faite en son sein pour un mandat d’un an renouvelable.
La durée du mandat du conseil municipal ou rural sera définie par le code électoral conformément à la durée des mandats des conseils de quartier ou de village définie dans le code des collectivités ; le pouvoir actuel des Maires ou Présidents de CR est unilatéral et contraignant dés lors que le budget est voté ; les alliances politiques ou la majorité mécanique aidant, le Maire ou PCR dispose à sa guise et souvent selon sa seule volonté de pouvoirs personnels qui ne participent pas au développement de ses concitoyens.
L’ère de la politique politicienne doit être enterrée pour le mieux-être des populations locales ; la «cantinisation» à outrance des lieux publics autour des stades, terrains de jeux, mosquées, des rares jardins publics, l’aliénation ou le détournement d’objectifs des espaces fonciers, demeurent le lot quotidien dans lequel nous baignons tous ; les marchés de gré à gré sectionnés pour mieux passer à travers les mailles des services de contrôle et les recrutements familiaux ou partisans sans tenir compte des compétences avérées des personnes s’ ajoutent au mal vivre d’aujourd’hui.
Un mode d’ élection de nos élus locaux à travers les associations de proximité et un mandat annuel renouvelable par vote pousseraient les détenteurs du mandat de proximité à mieux faire face aux besoins cruciaux de leur environnement sous peine d’ être destitué.
«Conseils de quartier ou de village»
Les dérives autoritaires, les violations des droits et libertés des personnes concourent aujourd’hui à détruire notre sens de l’enracinement dans une ouverture des cœurs et des esprits. Or l’absence de conscience de soi annihile la volonté individuelle et collective de progresser. La démission des populations vis-à-vis des politiques relève de l’absence d’éthique dans la gestion des cités ; aujourd’hui, les hommes au pouvoir politique comme leurs opposants ne sont mus que par le désir de s’enrichir et vite au détriment de la collectivité. Chaque parti politique essaie de manœuvrer pour obtenir des postes de responsabilités pour ses dirigeants, sources de «désormais, nos problèmes financiers sont finis».
La décentralisation par les «Conseils de quartier ou de village» est un moyen de lutter contre le gâchis, grâce à une organisation qui rend disponibles des ressources intellectuelles ou physiques précédemment mal, peu ou sous utilisées. Ce système de gestion de la proximité repose sur un principe préalable : chaque «Conseil de quartier ou de village», chaque Commune, Communauté rurale, Conseil régional» doit être jugé sur sa volonté de réussite, sur les efforts fournis pour atteindre les résultats. Cela suppose d’autre part une bonne organisation articulée autour des fondamentaux de l’Etat de droit. Une pareille organisation repose sur la culture du bilan annuel obligatoire et statutaire sous la supervision des corps de contrôle de l’Etat ; une telle organisation incite à la performance puisqu'elle suppose que l’on juge l’efficacité des structures sur leur engagement à atteindre les objectifs à eux assignés.
La gestion de la cité se mesure plus en termes de rentabilité humaine que technique ou commerciale surtout dans nos pays dépourvus de richesse naturelle. Le respect de ces différentes règles est le seul gage de réussite d’un bon Chef d’Etat soucieux du mieux-être de ses mandants, et dont la politique et le style doivent entraîner l’adhésion de ceux sur lesquels sa politique s’applique. Une nation ne peut se développer que si ses hommes sont capables d’être les acteurs de ce développement et désirent l’être dans le cadre d’une gestion vertueuse, transparente, et dynamique instaurée collectivement. Etre Maire, PCR, Député, Ministre, Chef d’Etat, c’est avant tout être à l’écoute, et se mettre au service de sa collectivité avec intégrité morale et conscience professionnelle.
Le résultat n’est pas toujours d’être le gagnant des joutes électorales mais c’est surtout le culte de la solidarité et le désir de servir sa collectivité qui doivent inciter les acteurs à la praxis quotidienne. La seconde alternance démocratique a aujourd’hui l’obligation de renforcer et d’approfondir la politique de la décentralisation initiée par ses devancières.
Partout à travers le monde, des peuples ont gagné leurs combats démocratiques par l’esprit d’équipe et une commune volonté de vivre en commun dans un environnement partagé et convivial. La nation sénégalaise, dans sa diversité ethnique, confrérique et territoriale, au-delà du nombre irréaliste de ses partis politiques, doit poursuivre sa mue vers une démocratie participative intégrale et totale avec une décentralisation axée non plus sur des élections municipales et rurales rassemblant les partis politiques, mais vers une gestion collective et participative de tous les citoyens avec l’installation, l’organisation et la supervision par l’Etat des «Conseils de quartiers ou de villages»...
GAYEDEL GAYE
Citoyen