Mass Seck traine Canal en justice
La série ‘’Sakho et Mangane’’, diffusée par Canal+, est-elle une copie de la série policière ‘’Division X Dakar’’ d’El Hadj Mass Seck, artiste-musicien, par ailleurs responsable artistique de la Tfm ? Ce dernier en est persuadé et a porté l’affaire au niveau de la justice. A Diourbel, sa ville natale, un collectif a vu le jour et se mobilise pour défendre les intérêts de son fils.
C’est le 15 avril prochain que le tribunal de commerce hors classe de Dakar va examiner de nouveau l’affaire qui oppose El Hadj Mass Seck à Canal+. L’artiste-musicien, membre de l’ex-groupe musical de rap Black Diamonds, a déposé une requête aux fins de référé d’heure en heure au niveau du tribunal de commerce hors classe de Dakar contre la société Canal+. Pour l’artiste, ‘’il a conçu une série policière intitulée ‘Division X Dakar’. Il a fait enregistrer l’œuvre au Bureau sénégalais des droits d’auteur devenu Sodav. Au mois d’avril 2011, il a fait tourner l’épisode pilote de la série d’une durée de 42 minutes’’.
Dans l’assignation de référé d’heure en heure déposée par l’avocat du requérant, dont ‘’EnQuête’’ détient copie, les preuves du plagiat sont apportées. Elles sont déclinées ainsi : ‘’A la fin de l’année 2013, par l’entremise d’un producteur ivoirien du nom de Dacko, le requérant a pris contact avec deux responsables de Canal+, notamment François de Planck, Directeur des programmes, et Malchiodi, Directeur de A+.
Qu’une rencontre avait été tenue avec ces derniers dans un hôtel de la place, au cours de laquelle une séquence de 30 minutes de l’épisode a été visualisée. A la date du 4 avril 2014, les premiers échanges de mails ont commencé et ont porté essentiellement sur le synopsis, la bible des personnages (récit décrivant les différents personnages avec leurs particularités et leurs traits de caractère) ainsi que deux épisodes de 13 minutes chacun de ma série ‘Division X Dakar’. Que toujours en perspective de la future collaboration, le requérant a, à la date du 9 février 2014, envoyé aux responsables de Canal+ l’arche de la série, c’est-à-dire le résumé de tous les épisodes.
Que le 17 mars 2014, il leur envoie de nouveau un Dvd de l’épisode pilote d’une durée de 13 minutes, par Dhl, à l’adresse de Canal+ à Paris. Qu’à la date du 29 janvier, une rencontre a été tenue à Abidjan et à l’issue de ladite rencontre, les requis lui ont demandé de fournir un budget ainsi qu’un planning de tournage. Qu’à la même occasion, il leur a copié le pilote de la série sur leur disque dur. Qu’à la date du 30 avril 2015, Canal+ a informé le requérant que des responsables de la boite viendraient à Dakar pour discuter de l’évolution du projet. Que dans le même sillage, la dame Cécile Geradin, responsable de la fiction chez Canal, à la suite d’un entretien téléphonique avec le requérant, l’a informé de ce qu’elle avait remplacé le sieur De Planck à la direction des programmes et lui promettait de poursuivre le projet. Que depuis cette date, Canal+ a rompu tout contact avec le requérant.’’
Et le requérant, par l’entremise de son avocat, de constater que : ‘’Quelque temps après, il apprit fortuitement, via le net, que la société de production Keewu, filiale de Canal+ Overseas, avait lancé un appel à candidature pour des scénarii d’une série policière. Qu’à la grande surprise du requérant, il découvre, à travers la bande annonce du film ‘Sakho et Mangane’ que sa série ‘Division X Dakar’, objet de la collaboration avec Canal+, a été quasiment reproduite. Qu’en fait foi le descriptif des personnages principaux dans la bible des personnages de ‘Division X Dakar’ qui a été délibérément copié. Qu’il s’infère que Canal+ a littéralement plagié l’œuvre du requérant’’.
Pour toutes ces raisons, l’avocat écrit : ‘’Vu l’urgence et le péril qui menace sa propriété intellectuelle, M. El Hadj Mass Seck sollicite qu’il vous plaise de bien vouloir l’autoriser à assigner à bref délai par devant votre cabinet, la société Canal+ via sa succursale Canal+Sénégal, pour entendre ordonner à cette dernière d’arrêter la diffusion du téléfilm ‘Sakho et Mangane’, en cours de diffusion sur les chaînes Canal+ et ce, sous astreinte de 1 000 000 F Cfa par jour de retard, à compter du prononcé de votre décision.’’
Ce que le tribunal a accepté. Ainsi, l’affaire, examinée le 8 avril, repasse le 15 avril prochain. Cette fois, ce sera le débat de fond.
ALAIN PATETTA (SCENARISTE AYANT TRAVAILLE SUR SAKHO ET MANGANE)
‘’Ma pierre à l’édifice de cette non affaire’’
‘’Je me permets d’apporter ma pierre à l’édifice de cette non affaire qu’est le plagiat dont aurait fait l’objet un auteur sénégalais concernant la série « Sakho et Mangane ». J’ai eu la chance de participer humblement à cette belle aventure, qui au demeurant est une des plus belles que j’ai pu vivre sur le plan professionnel, en étant appelé pour mettre à la disposition des auteurs de la série mon savoir faire en tant que professionnel de l’écriture de série TV en France depuis plus de 15 ans (…) Bref, c’est grâce à ce CV que je me suis retrouvé sur Sakho et Mangane, engagé par Alexandre Rideau, après une mise en contact par Cécile Géradin, que je remercie tous les deux de m’avoir embarqué sur ce formidable projet. Avant d’accepter ma future mission je devais voir si je me sentais capable d’apporter quelque chose au projet. On m’a donc donné à lire une bible issue d’un atelier dirigé par Philippe Niang et une douzaine de scénarios dialogués. Cette bible EST la base de travail sur laquelle je me suis engagé et elle est belle et bien signée par Philippe Niang qui est donc crédité de l’idée originale de la série. Ce que j’ai appris, c’est qu’au départ il était question de créer une série dans l’esprit « Arme fatale » ou « Starsky et Hutch » avec une bonne dose d’humour mettant en scène deux flics dakarois que tout oppose. Le résultat issu de ce premier atelier s’était sensiblement éloigné de ce point de départ. J’ai su que par les apports de tous (Raymond, Diomaye Augustin Ngom, Olivier Messa, Samantha Biffot, Guy, et Philippe) la série avait dévié, je dirais de façon absolument inévitable vers une sorte de Xfiles à l’africaine. L’absence du monde invisible dans cette histoire aurait sûrement été un non sens culturel ! Le mysticisme constitue une part belle de la narration. Je tiens à préciser que ce travail consistait pour moi à mettre à la disposition de l’équipe artistique mon savoir faire, ma méthodologie et ma connaissance de la structure d’une série internationale. |
Boucar Aliou Diallo (Diourbel)