Un weekend de terreur
Le royaume chérifien a connu l’un des plus violents tremblements de terre de son histoire, dans la nuit du vendredi au samedi. Plus de 2 000 morts ont déjà été comptabilisés dans un bilan officiel, alors que les recherches se poursuivent.
Soixante-trois ans après, le Maroc revit la terreur d’un tremblement de terre. Si la moitié d’Agadir, sur la côte ouest du pays, le 29 février 1960, a disparu sous les craquements du sol, faisant près de 15 000 morts, Marrakech a connu, dans la nuit du vendredi au samedi 9 septembre 2023, les mêmes sueurs froides. Un séisme de magnitude 7, selon le Centre marocain pour la recherche scientifique et technique (6,8 selon le Service sismologique américain), a frappé le sud de la ville touristique, enregistrant les plus puissantes secousses jamais mesurées au Maroc.
Selon le dernier bilan officiel du ministère marocain de l'Intérieur, le séisme a fait ‘’au moins 2 122 morts et 2 421 blessés, dont 1 404 sont dans un état très grave’’. Samedi, la secousse avait fait 1 293 morts dans la province d’Al Haouz, 452 morts dans la province de Taroudant, 191 morts dans la province de Chichaoua, 41 morts dans la province de Ouarzazate et 15 morts à la préfecture de Marrakech, a précisé le ministère dans un communiqué.
2 122 morts et 2 421 blessés
Ces chiffres vont malheureusement augmenter, vu que les recherches de survivants et de corps se poursuivent encore. Dans les deux provinces les plus touchées (Al Haouz, épicentre du séisme, et Taroudant), des villages entiers ont été rayés de la carte. À Marrakech, beaucoup de personnes ont dormi à la belle étoile, de peur que les bâtiments s’effondrent sur eux. Galass, une jeune étudiant sénégalais dans la ville marocaine, raconte : ‘’Je n’avais jamais vu quelque chose pareille. On voyait les bâtiments se balancer. Tout le monde était pris de panique. On a demandé à tous de dormir dehors. Nous avons passé la nuit dans le jardin de notre école.’’
La tragédie a révélé la solidarité et l’entraide des populations. Les hôpitaux et les centres de santé ont été pris d’assaut par des donneurs bénévoles de sang, après l’appel lancé par les autorités sanitaires. L’exemple a été donné par les footballeurs de l’équipe nationale qui ont donné de leur sang pour approvisionner les hôpitaux.
Le Maroc compte ses morts par milliers. Au moins un Sénégalais a perdu la vie dans cette tragédie. Il s’appelait Serigne Médoune Sall. Le commerçant, membre de la famille religieuse de Serigne Abass Sall de Louga, est tombé du haut d’un immeuble, dans la panique générale orchestrée par le tremblement de terre. Selon d’autres sources, il y aurait également au moins cinq Sénégalais blessés dans cette tragédie.
Un Sénégalais parmi les victimes
Le roi Mohammed VI a décrété samedi un deuil national de trois jours. Les dirigeants du monde entier ont exprimé leur effroi et leurs condoléances. Parmi eux, le président Macky Sall qui a adressé ses ‘’condoléances attristées à Sa Majesté le Roi Mohammed VI et au peuple marocain ami et frère suite au tremblement de terre qui a endeuillé le Maroc. Paix à l’âme des victimes et prompt rétablissement aux blessés’’.
D’ailleurs, sur instruction du chef de l’État, la ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur, Aïssata Tall Sall, a assuré que ‘’le gouvernement du Sénégal est prêt à mobiliser rapidement une équipe de secouristes pour apporter une assistance et soutien au Maroc’’. Cette équipe était déjà opérationnelle quelques heures après, dans la journée du samedi.
Samedi, les services compétents du ministère des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur ont fait savoir qu’ils ‘’suivent de près la situation de la communauté sénégalaise établie (au Maroc) à travers une cellule de crise mise en place sous l’autorité de l’ambassade du Sénégal à Rabat’’. Le ministère signale que cette cellule travaille en étroite collaboration avec les consuls généraux à Casablanca et à Dakhla.
Macky Sall et le khalife général des tidianes expriment leur solidarité au peuple marocain
Vu les liens particuliers entre les tidianes et la ville marocaine de Fez, Serigne Babacar Sy Mansour a appelé ‘’le gouvernement du Sénégal à ne ménager aucun effort pour être aux côtés du Royaume du Maroc et à user de sa diplomatie et de son influence pour la mobilisation de la communauté internationale et des organisations humanitaires afin d’apporter une assistance vitale et appropriée aux victimes de ce séisme et soutenir le Maroc dans la reconstruction des zones impactées".
Dans le communiqué de la Zawiya Tijaniyya, le saint homme a exprimé ses ‘’sincères condoléances et toute sa solidarité à Sa Majesté le Roi Mouhamed VI et au peuple marocain frère. Dans cette dure épreuve qui a fait plusieurs morts et blessés, nos pensées et nos prières vont aux familles des victimes et aux individus qui ont été affectés par cette tragédie".
Au plan international, la solidarité s’exprime et s’organise. Plusieurs pays, dont la France, l'Espagne, l'Italie et les États-Unis, ont proposé leur aide. Chefs d’État, souverains, stars sportives et du showbiz affirment tous leur soutien au gouvernement et au peuple marocain.
La peur d’une réplique ou d’un nouveau tremblement de terre5
Malgré cela, la population reste sous le choc. Interrogé par France24, Florent Brenguier, sismologue à l’Institut des sciences de la Terre de l’université de Grenoble, s’est dit surpris par la violence de ce tremblement de terre. Même si tout le Maroc est sensible, c’est surtout le pourtour méditerranéen (la frontière des plaques africaines et européennes, au nord du pays) qui est susceptible de subir de gros séismes.
Selon le scientifique, ‘’c'est une rareté d'avoir de si gros séismes dans une zone qui n'est pas située à l'interface entre des plaques tectoniques’’.
Quelques heures après le séisme, une réplique de 4,5 sur l'échelle de Richter a été enregistrée, ce qui, d’après Florent Brenguier, réduit les chances d’avoir de grosses répliques.
Mais le danger n’est pas pour autant écarté. ‘’Il n'est pas impossible qu'il y ait un deuxième gros séisme qui ne soit pas forcément sur cette faille. Ça pourrait être un petit peu plus au Nord ou un petit peu plus au Sud. Cela intervient le plus souvent dans les heures ou les jours qui suivent un tremblement de terre, mais ça peut aussi être dans les semaines, voire des mois plus tard’’, avertit le sismologue.
Lamine Diouf