Podor étale ses doléances
La visite du Président Macky Sall à Ndioum, dans le cadre du lancement de la journée nationale de l’élevage, frustre les populations de Podor qui reprochent au chef de l’Etat de ne pas avoir mis les pieds dans leur localité depuis son élection à la tête du pays. Elles étalent malgré tout leurs doléances et appellent le président de la République à respecter ses engagements pris en 2012.
C’est aujourd’hui, jeudi 8 décembre, que le président de la République procédera au lancement à Ndioum de la journée nationale de l’élevage. Macky Sall ralliera cette localité par voie aérienne. Mais son déplacement dans cette partie du nord du pays ne fait pas que des heureux. Il crée beaucoup de grincements de dents, surtout à Podor où les populations reprochent au chef de l’Etat de ne pas y avoir mis les pieds depuis son élection à la tête du pays. ‘’Depuis son avènement à la tête du pays, Macky Sall n’a jamais mis les pieds à Podor, alors que la révolution pour l’alternance de 2012 a pris naissance ici dans cette localité. Nous avions perdu deux de nos parents quand Abdoulaye Wade était venu à Podor et que nous l’avions accueilli avec des brassards rouges pour dire non à son projet de dévolution monarchique du pouvoir et à son projet de développement, à l’époque, trop onéreux. Podor a été le premier à réclamer le changement et à soutenir Macky Sall alors candidat. Mais, depuis qu’il a été élu, on ne l’a jamais vu’’, récrimine Samba Tall, président du Conseil communal de la jeunesse de Podor.
‘’Podor va mal’’
Il est 11h dans cette partie nord du pays. Les ruelles sont vides à cette heure de la matinée où les élèves sont dans les classes et les maisons peu animées. Un calme plat règne au quartier Tioffi où réside la mairesse de la ville, Aïssata Tall Sall. Devant la boutique du quartier, un groupuscule de jeunes gens mène tranquillement la discussion dans une ambiance décontractée. Mais ils se lâchent aussitôt que la question sur la situation de leur localité est posée. ‘’Podor va mal et souffre de sa classe politique’’, déclare sèchement El Hadji Baba Ndiongue. Trentenaire, ce jeune professeur au collège Thierno Mountaga Tall juge anormal que le chef de l’Etat vienne dans le département et aille directement à Ndioum sans passer par Podor. A l’en croire, c’est comme si Macky Sall a peur des populations podoroises qui l’ont pourtant toujours soutenu et ont tout fait pour qu’il soit élu président de la République. ‘’Sur le plan communal, il y a beaucoup de problèmes, parce que la jeunesse est laissée en rade. Elle a été trahie et abusée par ses hommes politiques qui ne font que se quereller et défendre leurs intérêts crypto-personnels’’, fulmine-t-il.
Située à plus de 200 kilomètres de Saint-Louis, le département de Podor fait face à plusieurs difficultés, malgré les potentialités dont il regorge. Selon le président du Conseil communal de la jeunesse, rien n’a été fait dans la localité depuis l’avènement de Macky Sall à la tête du pays. ‘’Du temps d’Abdoulaye Wade, on avait des députés, des sénateurs et des ministres. Mais aujourd’hui, on n’a pas de responsables dans l’appareil d’Etat qui puissent défendre les populations podoroises. Le département fait surtout face à un problème d’enclavement et de chômage de sa jeunesse’’, relève Samba Tall. Sur le plan sanitaire, Podor ne dispose jusqu’ici pas d’hôpital. Il n’a qu’un centre de santé avec un plateau médical pas du tout relevé. Ce qui contraint souvent les populations à évacuer leurs malades vers Saint-Louis ou Richard Toll en cas de complication.
Au-delà de ces problèmes, les populations de Podor déplorent également la délocalisation annoncée vers Ndioum de certaines structures et édifices implantés dans la ville tels que l’Université virtuelle qui, il y a deux ans de cela, a été classée deuxième sur le plan national en termes de résultats après celle de de Mbour, et de l’aérodrome de la localité. ‘’Nous n’avons rien contre la population de Ndioum. Elle bénéficie des politiques publiques, parce que ses responsables politiques sont en train de défendre ses intérêts dans le gouvernement. Mais nous, nos cadres politiques ne sont là que pour leurs intérêts crypto-personnels. Ils ne viennent pas en aide aux populations’’, se désole El Hadji Baba Ndiongue.
Les populations de Podor demandent par ailleurs l’aménagement du Colangal (vallée en langue Pulaar) de Podor. Derrière la digue de protection posée sur le fleuve Sénégal, il y a plus de 100 ha de terres qui ne sont jusqu’ici pas aménagées pour permettre aux populations de faire des cultures de contre-saison. Pourtant, cela faisait partie des promesses électorales du candidat Macky Sall à l’élection présidentielle de 2012 d’aménager ces terres afin de permettre aux populations de faire des cultures maraîchères et de riz, pendant toute l’année. ‘’Ils nous ont promis l’aménagement de ces terres, mais jusqu’ici ils n’ont rien fait. On a des terres à Podor, de l’eau et de la main d’œuvre, mais l’Etat ne tente rien pour exploiter toutes ces potentialités. C’est comme si Podor ne faisait pas partie du Sénégal. Il est temps que le président de la République prenne en charge les aspirations des populations de Podor dans les politiques publiques du pays’’, estime Samba Tall.
ASSANE MBAYE