Attention femmes traquées
« Attention, votre femme voyage. » Voici, en substance, le SMS saugrenu que reçoit son « gardien » chaque fois qu'une Saoudienne quitte l'aéroport de Riyad. Car, en Arabie saoudite, toutes les femmes sont placées sous l'autorité d'un homme (père, époux, frère ou fils en cas de veuvage), qui en a la garde légale. Aucune n'échappe donc à cette mesure de contrôle des services de l'émigration, mise en place par les autorités du royaume.
En réalité, ce traçage électronique n'est pas nouveau. Mais, depuis que la célèbre militante Manal al-Sharif a relancé le débat sur Twitter - rare espace de liberté très prisé dans le pays -, la méthode suscite de vives critiques. Sur le réseau social, même les hommes se sont offusqués de ce que beaucoup d'internautes considèrent comme une pratique d'un autre âge. Cela dit, elle ne surprend guère, tant les droits des femmes sont bafoués en Arabie saoudite.
Chaperon
Avant d'avoir recours à la biométrie pour surveiller les Saoudiennes, le royaume leur avait interdit de franchir ses frontières sans l'accord d'un chaperon. Ainsi, dès son arrivée à l'aéroport, une femme est forcée de présenter une autorisation de voyager signée par ce dernier. Elle a beau posséder enfin son propre passeport, elle est toujours inscrite en tant que personne à charge sur la carte d'identité de son époux, quels que soient son âge ou ses revenus.
Recluses chez elles ou intégralement voilées, les femmes sont quasiment absentes de la vie publique et se voient même effacées de l'édition saoudienne des catalogues Ikea. Elles sont aussi les seules au monde à ne pas avoir le droit de conduire, sous peine de se faire arrêter. Pourtant, aucune loi ne le précise, mais les autorités, qui s'appuient sur une fatwa, invoquent la volonté des puissants religieux conservateurs pour maintenir l'interdiction. ?
L'an dernier, le roi Abdallah s'est toutefois efforcé de redonner un peu d'espoir aux Saoudiennes. En septembre 2011, il leur a enfin accordé le droit de vote et d'éligibilité pour les élections municipales de 2015. Et, lors des derniers Jeux olympiques, il a autorisé deux sportives à concourir pour la première fois.