Quand le PNLP vire au festin
Le Programme national de lutte contre le Paludisme (PNLP) a fait l’objet d’une gestion à rebrousse-poil de la gestion vertueuse durant la période 2005-2010. La sentence est de la Cour des comptes qui, dans son rapport 2012, fait état de plusieurs manquements.
La Cour des comptes n’a pas été tendre avec le PNLP. C’est ainsi que la gestion des approvisionnements a été mise en relief à cause d’un non-respect des dispositions du code des marchés publics. La Cour dénonce, par exemple, l’attribution de deux commandes de ‘’moustiquaires et de kits d’imprégnation’’ à hauteur de 29 427 000 F Cfa, un montant qui dépasse le seuil à partir duquel un appel d’offres doit être lancé, c’était en 2006.
Des irrégularités dans l’octroi des marchés ont aussi entraîné des manques à gagner énormes. Ainsi, pour l’acquisition de moustiquaires imprégnées à longue durée d’action (Milda), la Cour des comptes relève un manque à gagner de 273 987 210 F Cfa. Il s’y ajoute que des commandes d’urgence ont été faites sans se conformer aux procédures en vigueur. Pour y remédier, il est conseillé au ministère de la Santé et de l’Action sociale de ‘’veiller à la tenue régulière des outils de gestion, à la production régulière des rapports par les districts et leur transmission dans les délais au Pnlp, à renforcer le contrôle sur la gestion des stocks de produits antipaludiques’’.
Journalistes, douaniers, professeurs d’université puisent le carburant
Entre autres manquements, le rapport pointe l’index sur la gestion inefficiente du carburant. Il s’étonne que des dotations aient été octroyées à des personnes étrangères au programme, tout en soulignant que des agents du ministère de la Santé ont su en tirer profit. C’est dans cette perspective qu’entre 2005-2008, le secrétaire général a bénéficié de 2 740 litres de carburant contre 4 800 litres pour le directeur de cabinet entre 2005-2009. Pour sa part, le directeur de l’administration générale et de l’équipement a eu droit à 1 590 litres entre 2005-2009. Le contrôleur des opérations financières a disposé de 2 400 litres entre 2005-2009, 4 750 litres pour le directeur de la lutte contre la maladie entre 2005-2008 et les conseillers techniques se partagent 870 litres entre 2005-2009. Et fait remarquer le rapport : ‘’d’autres personnes étrangères au programme ont bénéficié d’appuis en carburant. C’est le cas d’agents de la douane, de professeurs d’université, de journalistes…’’
Prêt de 4,516 milliards de la BIS
Le rapport revient sur l’accord de prêt d’un montant de 4,516 milliards de F CFA signé entre le gouvernement sénégalais et la Banque islamique. Mais note-t-il, ‘’une bonne partie des ressources a été utilisée par la Dage du ministère de la Santé pour la prise en charge de dépenses hors programme paludisme, ce qui constitue une entorse aux règles d’exécution des finances publiques’’.
La Cour recommande dans cet élan au ministre de tutelle d’engager, en relation avec le ministre de l’Economie et des Finances, la recherche sur des financements alternatifs afin de réduire la trop dépendance du Pnlp aux ressources extérieures.
Le rapport met en doute l’efficience du programme de même que la méthode de calculs des taux de mortalité et morbidité appliquée dans les documents du programme, car selon la Cour, l’impact de cette stratégie sur l’objectif général de baisse de la morbidité et de la mortalité ne peut être que marginal du fait qu’elle n’a été mise en œuvre que sur trois districts sur un nombre total de 75 districts..
Matel BOCOUM