La souffrance des riziculteurs
Malgré les démarches innovatrices et des programmes comme celui du projet « Bey Dunde » (produire pour vivre), la commercialisation du riz reste le principal souci des riziculteurs de la vallée du fleuve Sénégal.
Actuellement, dans la vallée, des milliers de tonnes de Paddy et de riz blanc sont stockées dans les magasins. Dans tous les casiers, le cri de désarroi est le même. « On n’arrive pas à vendre le riz », se désolent les paysans. A Mboundoum, Ndioungou Mberess, Diawar, entre autres localités du delta, le constat est le même. L’inquiétude se lit sur les visages des paysans qui ont contracté des dettes à la Caisse Nationale de Crédit Agricole (CNCAS).
Eu égard à ces désagréments, l’autosuffisance en riz prônée par le chef de l’Etat risque d’être un vœu pieux. « Le problème est récurrent et c’est l’occasion pour nous d’interpeller le chef de l’Etat sur la situation », martèle Ndiawar Diop, Président de la Fédération des Périmètres Autogérés (FPA). Pour sortir de cette situation, il préconise le gel de l’importation du riz. « Comme on a fait avec l’oignon, l’Etat peut trouver des canevas pour la commercialisation du riz », assure-t-il.
En effet, le riz local souffre de la concurrence du riz importé qui « est loin d’être le meilleur », selon les riziculteurs. Louant le riz de la région du fleuve, dont les « vertus » ne sont plus à démontrer, le directeur général de la société sénégalaise de la filière alimentaire (Sfa), Kevin Torck, a laissé entendre que la capacité de son usinage est évaluée à 12 000 tonnes par an. « Tout le paddy exploité par cette usine vient de l’agriculture familiale des producteurs de la région de fleuve », révèle-t-il. L’industriel dit avoir investi près de 500 millions de nos francs pour mettre sur pied cette usine de décorticage, d’emballage et de vente dans la vallée.
« C’est difficilement que nous arrivons à écouler nos sacs de riz à Dakar où nous vendons nos produits », se désole-t-il. «Tous nos problèmes se résument aujourd’hui à la commercialisation. On a fourni beaucoup d’efforts dans les champs, mais c’est l’écoulement qui pose problème », renchérit El Hadj Wade, Président de l’union des riziculteurs de Diawar. Selon ses estimations, « il y a quelque 400 tonnes de riz blanc invendues. A cela, il faut ajouter les 854 autres qui seront récoltées dans les prochains jours. Il précise : « Nous avons pris les crédits à temps et nous les avons déjà remboursés. Mais, notre seul souci reste l’écoulement de nos produits ».
La situation reste préoccupante et les riziculteurs craignent des pertes. Du côté de la CNCAS, le constat est le même. Les responsables de la banque soulignent que si rien n’est fait, on va vers la catastrophe. Pourtant, il y a quelques semaines, le passage du chef de l’Etat dans ces localités, lors de sa visité économique, avait fait naître l’espoir de lendemains meilleurs. Cette mévente est comme une épée de Damoclès sur la tête des paysans de la vallée. « Ils n’ont pas permis au chef de l’Etat de voir les problèmes du secteur du riz, prétextant que les routes sont cahoteuses », a dénoncé un paysan. Toutefois ces riziculteurs saluent les efforts de l’Etat pour atteindre l’autosuffisance en riz d’ici 2017 et l’accompagnement du projet « Bey Dunde ».
Fara Sylla (Saint-Louis)