Le prix de l’eau est-il en sursis ?
L’étude réalisée par la Sénégalaise des eaux (SDE) en vue de la concession qui devrait lui revenir pour une durée de 30 ans, a révélé que le prix de l’eau, stable depuis 2003, pourrait connaître une hausse de 31%.
Dans son édition N°8 du jeudi 16 juin 2011, EnQuête révélait en exclusivité la signature d’un protocole d’accord signé entre l’Etat et la Sénégalaise des eaux (SDE), respectivement représenté par Oumar Sarr (alors ministre d’Etat, ministre de l’Hydraulique) et Mamadou Dia (Directeur général de la société). Protocole ayant ‘’pour objet de définir les principes sur la base desquels (l’Etat et la SDE) entendent finaliser (entre eux) un contrat de concession de l’évacuation des eaux usées et des eaux de pluie, la production et le distribution de l’eau potable d’une durée de 30 ans dans la ville de Dakar et les villes intérieures’’. La SDE devait, avant fin décembre 2011, présenter au gouvernement ‘’un projet de concession incluant le plan d’affaire, les tarifs et un projet de contrat’’ qui devait avoir comme fondement ‘’des tarifs socialement acceptables, supportables par les populations tout en préservant l’équilibre financier du secteur’’. Cette concession devrait également consacrer la disparition de l’Office national de l’assainissement du Sénégal (ONAS) et la Société nationale des eaux du Sénégal (SONES).
Le processus a suivi son cours et EnQuête a appris que la SDE a déposé ses conclusions de l’étude auprès des autorités actuelles. Celles-ci prévoient une augmentation de 31% du prix de l’eau si l’option de la ‘’concession totale’’ est prise. La concession totale consistant à laisser à la SDE le financement des investissements à venir. Tout le contraire du contrat actuel dit d’affermage qui laisse à la SONES la gestion du patrimoine et la maîtrise d’ouvrage de travaux neufs et de renouvellement, et à la SDE la charge de l’exploitation.
‘’Tarifs socialement inacceptables’’
Interpellé, Amadou Kanouté, Directeur exécutif de CICODEV, une association consumériste, affirme que ces conclusions corroborent les craintes qu’il nourrissait. Pour lui, si la concession totale venait à être appliquée, ‘’c’est le renchérissement du coût de l'eau et donc des tarifs socialement inacceptables pour les consommateurs défavorisés’’. Alors que l’une des missions du protocole d’accord était justement de faire en sorte d’avoir ‘’des tarifs socialement acceptables’’. A en croire M. Kanouté, citant une étude de l’Agence française de développement, ‘’l'expérience d'autres pays montre que la concession n'était pas une option idéale’’. Néanmoins, il assure que les enjeux identifiés par l’étude demeurent constants. A savoir que ‘’la satisfaction de la demande en eau de Dakar et la Petite Côte au-delà de 2013 requiert des investissements substantiels ; les tarifs doivent demeurer à un niveau supportable pour les consommateurs et la ressource "eau", notamment celle tirée du Lac de Guiers, se raréfie’’. D’où l’urgence pour l’Etat de lancer ‘’un processus avec les autres parties prenantes dont les consommateurs pour identifier des mécanismes de financement à même de faire face à ces enjeux’’. Il suggère également la mise en place d’un ‘’cadre de régulation de l’eau et de l’assainissement inclusif et consensuel qui commence à réfléchir aux solutions les plus adaptées’’ afin d’aboutir à des solutions pérennes et durables.
Bachir FOFANA