Publié le 12 Oct 2019 - 20:06
MINISTRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION

Abdoulaye Diop invite la Sodav à baisser ses charges de fonctionnement 

 

Le ministre de la Culture et de la Communication était en visite, hier, à la Sénégalaise du droit d’auteur et des droits voisins (Sodav). Abdoulaye Diop semblait particulièrement en forme. Jusque-là, cette visite est sans nul doute la plus longue. Sans gants, il s’en est pris à la société sur certaines questions dont le taux des frais de gestion de la boite.

 

Le directeur gérant de la Sodav lui servant de guide, le ministre de la Culture et de la Communication enchaine les entrées et sorties dans les différentes salles de l’ex Bsda. De la direction générale au secrétariat, en passant par la documentation, tous les locaux ont eu droit à un bref passage. Les préoccupations des agents, leurs revendications, etc., ont été les divers sujets qui ont fait écho lors des échanges. Mais avant tout, ces professionnels de la culture se sont globalement réjouis de cette prospection ministérielle.

C’est ce sentiment de satisfaction qui ressort des propos du Dg gérant, Aly Bathily. ‘’ Pour ce qui est des résultats de cette visite, j’éprouve une très grande satisfaction. Je pense qu’il était important qu’il vienne échanger, discuter avec nous pour savoir ce qui se passe. Parce que je sais que la perception qu’on peut avoir en étant très éloigné peut être différente de celle qu’on peut avoir quand on est à l’intérieur’’, déclare-t-il.

La Sodav, qui en est à sa deuxième année d’existence, est en proie à quelques entraves dans la collecte de l’ensemble des fonds qui, de droit, reviennent aux artistes. M. Bathily a évoqué leur principale entrave, sans oublier la responsabilité de l’établissement qu’il dirige. ‘’Je pense qu’il y a un cri du cœur que j’ai eu à faire : c’est le respect du paiement des redevances des droit d’auteur par l’agenda culturel sénégalais. C’est une question d’exemplarité en ce qui concerne nos structures étatiques. Il est vrai que la Sodav est une société civile autonome qui, de par son statut, est indépendante, mais quand même aurait besoin quelquefois de l’accompagnement de l’Etat sur certaines questions. Car, quoi qu’on dise, à terme, la protection du droit d’auteur et droit voisin relève de la charge de l’Etat. Nous, nous sommes des gestionnaires de droit’’.

Selon le Dg gérant, le Fesnac, la Biennale des arts de Dakar ainsi que le festival de jazz de Saint-Louis, bref, le top de l’agenda culturel sénégalais font figure de mauvais exemples dans l’acquittement des droits d’auteur.

La Sodav, un peu à l’image de plusieurs démembrements de la culture, comme le laisse entendre M. Diop, est de nature ‘’budgétivore’’. Il pointe du doigt le taux de fonctionnement qui est à 35 %. Ce taux s’explique non seulement légitimement, mais est en train d’être revu à la baisse. Seulement, le ministre semblait être venu avec des idées préconçues. D’ailleurs, depuis sa prise de fonction, la nouvelle équipe s’attèle à cette tâche de réduire au maximum les frais de gestion. ‘’Le taux de fonctionnement a baissé pour atteindre 35 %. Je pense que si vous avez bien suivi l’évolution de la Sodav depuis la première assemblée générale, nous n’avons cessé de réduire ledit taux par rapport à ce qui se faisait du temps du Bsda. Aujourd’hui, nous en sommes à 29 %, un pourcentage qui pourrait considérablement être revu à la baisse. Plus notre budget de fonctionnement fléchira, plus notre image, en tant que structure publique, sera bien perçue. Car c’est toujours important, pour une société de gestion collective, de mieux maîtriser ses charges de fonctionnement de façon efficiente et transparente’’, a expliqué M. Bathily.

En outre, la Sodav a bien profité de cette visite de terrain pour faire part de ses doléances à l’endroit de sa tutelle. Cependant, cette dernière, sans vouloir faire fi des contraintes de cette branche de son ministère, a voulu d’abord placer les artistes au centre de son discours. Et une approche qui servirait d’abord les principaux intéressés, en l’occurrence les artistes, passe, entre autres, par une nette baisse des frais de gestion.

‘’Aujourd’hui, nous devons travailler mutuellement pour que la Sodav soit le moins budgétivore possible. C’est pour cela, nous avons discuté sur un certain nombre d’orientations qui vont être applicables. Et dans cela aussi nous avons évoqué la possibilité d’élargir l’assiette de la Sodav. Je crois qu’aujourd’hui, sur cette question, nous avons dégagé certaines pistes, car nous savons qu’avec la Sodav, tout ce qui numérique représente 50 % des revenus. Ce qui est bien encourageant, mais si nous voulons avoir un peu plus de fonds, de recettes pour pouvoir tout redistribuer aux ayants droit, il est important de mieux s’organiser et d’élargir ce système de taxe’’, propose le ministre. Il semble ne pas être conscient des efforts déployé par l’entreprise.

Le Bureau sénégalais des droits d’auteur était à un budget de fonctionnement de 70 %. La Sodav, en deux ans, a réduit de plus de la moitié avec, à la clé, beaucoup de réalisations. Ce qui leur vaut d’ailleurs aujourd’hui la reconnaissance de la Confédération internationale des sociétés d’auteurs et de compositeurs (Cisac). Cette dernière pense que le modèle de gestion de la Sodav devrait servir d’exemple aux autres pays africains. Ce qu’Abdoulaye Diop n’a pas su apprécier à sa juste valeur. ‘’Ne me parlez pas de la Cisac’’, a-t-il rétorqué à M. Bathily qui tentait de lui expliquer les prouesses de la société reconnue à l’international.

 Il semble n’être préoccupé que par une chose : que les acteurs soient au centre de toutes les actions de la Sodav et qu’ils s’approprient cette institution.

Il a marqué son désaccord sur certaines décisions prises par la société, comme la confection de cartes numérisées. ‘’Par rapport au statut de l’artiste avec les cartes numérisées, j’ai été sidéré par ces initiatives en solitaire. Toutes les actions doivent être d’abord débattues, pour une meilleure synergie et une meilleure efficacité, au grand bénéfice des principaux intéressés’’. ‘’Mais, Monsieur le Ministre, les membres du conseil d’administration représentent les artistes. On y retrouve toutes les entités des arts. Si le conseil d’administration décide, c’est comme si ce sont tous les artistes qui avaient décidé, parce qu’ils ont été élus par leurs pairs’’, avait-on envie de lui rétorquer.

Un problème sur lequel les agents de la Sodav attendaient sûrement l’intervention du ministre, était sans nul doute l’état de leur bâtiment. Les lieux sont étroits. Le bâtiment est vieux et humide. ‘’L’autre point aussi important, c’est le siège qui est un peu exigu et j’ai demandé au Dg et aux administrateurs ici présents de réfléchir à comment faire pour améliorer les conditions de travail.  Le président de la République, sur les trois prochaines années, a bien voulu donner un appui conséquent à la Sodav. C’est ainsi que nous comptons mettre un milliard sur la table d’ici 2022’’, indique-t-il. ‘’Et sur cette question, n’oublions pas qu’il s’agit de l’argent des contribuables sénégalais. Donc, il est important de réactualiser pour savoir où est-ce qu’on va, où est-ce que ces importantes sommes iront. Tout doit se faire dans une transparence indéfectible’’. Abdoulaye Diop a certainement oublié que cette enveloppe, le président Sall avait décidé de la donner à la société sur la base d’un projet clair.

Malgré ses positions teintées de fermeté, le ministre a tenu à saluer les efforts consentis par la Sodav, même si des avancées peuvent toujours être enregistrées pour mieux servir les intérêts des artistes sénégalais.

MAMADOU DIOP (STAGIAIRE)

 

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