Publié le 30 May 2020 - 02:29
ABUS ET INJUSTICE

Plusieurs collectifs tirent la sonnette d’alarme

 

Des travailleurs sans salaire, d’autres renvoyés ou encore des cultivateurs dépouillés de leurs terres… Plusieurs collectifs ont fait face à la presse, hier, pour dénoncer un certain nombre d’abus, avec le soutien de Frapp.

 

En dehors de la pandémie à coronavirus, plusieurs maux sévissent. Hier, en conférence de presse, cinq collectifs ont, avec le soutien du Front pour une révolution anti-impérialiste, populaire et panafricaine (Frapp) réclamé justice et équité. On se souvient encore de la manifestation des travailleurs de PCCI (centre d’appel) il y a quelques mois, qui exigeaient le paiement de 14 mois d’arriérés de salaire s’élevant à 415 millions de francs CFA. 

Depuis lors, rien n’a changé. ‘’Nous avons choisi de prendre de nouveau à témoin les autorités et l’opinion publique sénégalaise. Car, depuis près de deux ans, depuis novembre 2018, le collectif de 145 ex-employés de PCCI court toujours derrière 14 mois d’arriérés de salaire. Cinq décisions de justice favorables sont tombées et, à chaque fois, ces ordonnances viennent se heurter aux récifs de la cour d’appel’’, explique le représentant dudit collectif, Youssouf Ndao. 
 
Selon lui, la Cour d’appel de Dakar, à la suite de toutes ces décisions de justice, leur a demandé de débourser une somme de 500 millions de francs CFA pour pouvoir entrer dans leurs fonds. Cela au nom d’une subordination de consignation, un fait semblable au dossier d’Amadou Ba de Locafrique. ’’C’est peut-être une pratique de droit, mais les citoyens que nous sommes, pouvons difficilement comprendre comment quelqu’un à qui on doit de l’argent, doive payer une somme supérieure à ce qu’on lui doit. De surcroit, des personnes qui ont perdu leur emploi et à qui on doit des salaires.  La cour d’appel nous inquiète, mais nous avons suivi dans la presse qu’il y a eu des chamboulements qui sont intervenus en son sein et nous espérons que la justice, l’intelligence vont prévaloir dans cette cour’’, ajoute-t-il. 
 
Pour ces ex-travailleurs ayant exercé pendant plus de 17 ans dans l’entreprise, vu le caractère hautement social de cette demande, les autorités en charge de l’emploi doivent s’autosaisir du dossier. 
 
Ils demandent au ministre de la Justice de surveiller la célérité prévue par la loi pour la gestion de ce type d’affaire. En 2018, la Direction de l’emploi a alloué à PCCI une somme de 825 millions, dans le cadre de la convention Etat-employeur. Cet argent n’a pourtant pas servi à payer ces employés qui ont dû soumettre au juge de l’urgence (tribunal des référés) depuis novembre 2018, leur revendication. Et Youssouf Ndao de poursuivre : ‘’Les autorités de ce pays, qui ont prêté serment, doivent rappeler à la Sonatel, condamnée dans le cadre de cette procédure, que toute générosité commence par l’adhésion et le respect qu’exige toute décision de justice, encore plus des anciens prestataires ayant un impact social aussi lourd. La Sonatel a été condamnée à payer au collectif une somme entre 15 et 20 millions.  Cette générosité ostentatoire dont elle a preuve, depuis peu, comme on a vu avec l’avènement de la pandémie et le ramadan, devrait commencer par respecter les décisions. Elle refuse toujours de payer. Nous sommes là pour rappeler à ceux qui sont en face de nous qu’on ne se laissera pas faire.’’ 
 
ABS, quatre ans sans salaire
 
A côté de ces travailleurs, apparait un autre groupe d’employés d’ABS (Airport Bus Services) une entreprise qui existe depuis 2002 à l’aéroport Léopold Sédar Senghor. Depuis quatre ans, ils sont sans salaire, suite à leur expulsion manu militari de l’aéroport au profit d’un privé. Paradoxalement, après un procès gagné par l’Etat du Sénégal, dans le cadre de la traque aux biens supposés mal acquis, qui a reversé la société ABS S.A dans le patrimoine de l’Etat (affaire Karim Wade) ‘’toutes les autorités de l’Etat, à commencer par le président de la République, ont été saisies par le comité de crise des travailleurs d’ABS pour réclamer un règlement juste et définitif de leur situation. Nous vivons dans des conditions difficiles avec des impayés de location pour certains et des familles disloquées pour d’autres, quand ce ne sont pas des décès. La situation est devenue plus difficile avec la pandémie de la Covid-19. Nous sommes dans une situation de précarité extrême. Malgré tout, le comité de crise, au nom des travailleurs, continue de se battre pour recouvrer ses droits. Le dossier est entre le ministère des Finances et l’Agence judiciaire de l’Etat’’, détaille leur porte-parole Assane Cissé. 
 
Constitués de chauffeurs, de mécaniciens, de laveurs, de gardes… ces employés assuraient la liaison entre l’aérogare et l’avion en toute quiétude jusqu’au 30 juin 2016 à minuit, date de leur expulsion. ‘’Elle a été ordonnée par Pape Malick Diop et Maimouna Ndoye Seck. On ne nous a présenté aucun papier. Ils nous ont arraché nos badges. Nos avocats leur ont envoyé une mise en demeure, le 8 avril dernier, mais rien. Cela montre à suffisance le manque de respect de nos autorités envers le travailleur. C’est vraiment difficile, mais on ne va pas continuer à subir, car c’est nous qui les avons élus. C’est malhonnête et c’est injuste. Les travailleurs sont prêts à aller jusqu’au sacrifice suprême, parce que personne ne va nous humilier devant nos familles’’, martèle-t-il. Leurs arriérés de salaire, depuis cette date, s’élèvent à 629 391 040 F CFA, puisque l’entreprise n’a pas été dissoute.
 
Des terres dérobées…
 
Au-delà de travailleurs victimes d’injustices, dans le monde rural, on se plaint d’un accaparement de terres. C’est le cas à Sindia. En 1999, l’ex-président de la communauté rurale (PCR) de Sindia, Ousmane Lô, a affecté 207 hectares des champs situés sur l’axe Sindia - Popenguine à un privé libanais du nom de Charles Haddad. Ce dernier, selon les habitants, a fait croire aux villageois que c’était un projet étatique, en octroyant de modiques sommes variant entre 30 et 50 000 F CFA à 2 % des propriétaires, pour des terres allant de 2 à 10 ha. ‘’Nous avons été arnaqués par Ousmane Lo. Nous avons écrit une lettre au président d’alors, Abdoulaye Wade, et une autre à l’Ofnac, sans suite. Nous dénonçons cette situation, car c’est très difficile de vivre avec une perte de 207 ha. Aujourd’hui, nous disons ça suffit ! Il est temps que l’injustice s’arrête. Nous demandons au gouvernement actuel de se saisir du dossier et que justice soit faite’’, lance le représentant du collectif des victimes de Kiniabour et Sindia.  
 
Une des victimes, Ousseynou Seck, a eu à porter cette affaire, il y a de cela 20 ans, devant les tribunaux qui lui ont donné raison. Mais, jusqu’à présent, la décision de justice tarde à être appliquée. ‘’En 2016, suite aux travaux de l’Ageroute sur l’autoroute à péage, 510 parcelles qui devaient revenir à Kiniabour 2 et aux paysans impactés par les travaux, ont été vendues par la commune, avec la complicité de certains conseillers. Récemment, Ageroute, sans aviser les propriétaires, a décidé d’élargir les emprises de l’autoroute sur les champs déjà ensemencés des villageois en plein hivernage’’, se désole-t-il. 
 
A Nguéniène (département de Mbour) on se bat pour récupérer plus de 200 hectares de terres. Selon le porte-parole du collectif constitué pour la cause, ‘’en 2010, le Conseil rural de Nguéniène, en complicité avec le chef du village de Ballabougou, a affecté des terres d’une superficie de 150 ha à la société espagnole Produmel, sans consulter aucune autre entité de la localité. Cette pratique a été répétée en 2015 par l’affectation de 52 autres hectares entre les villages de Ballabougou et de Ndiémane. Voulant revenir à la charge en 2016, le conseil municipal, de nouveau, a délibéré une superficie de 100 hectares dans le seul espace de pâturage restant de la zone nord’’. Il se trouve que cette dernière affectation a soulevé jeunes et éleveurs, et a coûté une détention de 30 jours à certains membres en juin 2019, ainsi qu’une répression qui s’est soldée par la blessure de 5 jeunes et l’arrestation de 12 autres manifestants, en mars 2020.
 
‘’Malgré le rejet du projet Produmel par la population et la procédure en cours au niveau de la Cour d’appel de Dakar, l’entreprise continue de débroussailler le site objet du litige. Nous vivons de l’agriculture et de l’élevage. Prendre nos terres signifie pour nous : ‘’Allez mourir ou allez vous suicider. ‘’ Le docteur vétérinaire du département a recensé plus de 3 000 bovins vivant dans cet espace’’, ajoute-t-il. 
 
Ainsi l’Union des jeunes réformistes de la zone nord se bat contre un accaparement de terres de 300 ha dans la commune de Nguéniène. Elle demande l’annulation de l’affectation de 100 hectares à la société espagnole Produmel Suarl et la lumière sur les protocoles d’accord relatifs à l’exploitation des 200 hectares en cours depuis 2010. 
 
Quant à la population de Reendo Bossea, mouvement citoyen regroupant en son sein les quatre communes (Oré Fondé, Agnam, Thilogne et Dabia) elle dénonce un projet lancé à son insu. ‘’Nous avons appris via la presse la signature de convention de financement entre GIC Bossea et Owac Engereng Compagnie (Italie) le 9 décembre 2019 à l’hôtel Terrou-bi de Dakar, sur un projet estimé à 700 milliards de francs CFA sous forme d’un contrat Boot pour une durée de plus de 40 ans. Ceci constitue une violation des règles et procédures de la transparence d’une gouvernance démocratique, inclusive et participative.
 
Face au manque d’information de la population, les correspondances adressées aux représentants de l’Etat et aux différents maires qui sont restées sans réponse, nous exigeons que la lumière soit faite sur ce projet sans concertation’’, explique son représentant Moussa Ka. Le mouvement, considérant la Constitution, précisément en son article 25, et la loi portant sur le patrimoine des collectivités locales, exige toute la lumière sur ce projet. 
 
Tous ces combats, Guy Marius Sagna et son mouvement (Frapp) entendent les mener en fédérant les collectifs au nom du credo : ‘’Un pour tous, tous pour un.’’ 
 
EMMANUELLA MARAME FAYE
 
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