PROFESSEUR MOUSSA SEYDI, SUR LES DANGERS DE LA STIGMATISATION
‘’Des patients graves dont des agents de santé refusent d’aller à l’hôpital ‘’
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En plus de leur état de santé, les patients de la Covid-19 souffrent de la stigmatisation, au point que bon nombre refusent de se faire soigner. Ce qui n’est pas sans conséquence. D’où l’appel à la solidarité lancé ce samedi par le professeur Moussa Seydi.
Le mois de mai fut pénible pour le ministère de la Santé, dans la lutte contre la Covid-19. Non seulement le pays a enregistré plus de 4 000 cas, mais 43 ont donné lieu à des décès. Soit un taux de létalité ou un taux de mortalité de 1 %. A cette même période, souligne le chef du Service des maladies infectieuses, Professeur Moussa Seydi, la létalité est à 2,5 fois plus élevée dans la région Afrique de l’OMS et 6 fois plus élevée selon les données au niveau mondial.
C’est donc dire, soutient le Pr. Seydi, que le Sénégal n’a pas vécu ce que l’on craignait, du fait probablement des mesures qui ont été prises très tôt et de la jeunesse de la population. Pour lui, guérir de la Covid-19 est la règle. Mais plus le nombre de cas augmente, plus celui de cas graves augmente et celui des décès. Sur ce, il a lancé un message aux personnes qui stigmatisent les malades.
Selon le professeur, la stigmatisation est dangereuse pour la personne malade. Parce qu’elle ne va pas consulter ou elle va consulter tardivement et cela va risquer sa vie. ‘’A l’heure où je vous parle, il y a beaucoup de patients graves qui sont à domicile. Ils refusent de venir à l’hôpital, du fait de la stigmatisation. Parmi ces patients, il y a même des personnes qui travaillent dans le secteur de la santé. J’en discutais hier avec le Pr. Bèye’’, fustige l’infectiologue. Qui fait remarquer que la stigmatisation met en danger l’entourage du malade, parce qu’une personne stigmatisée est moins prompte à respecter les mesures barrières de base allant à l’endroit de son entourage. Elle constitue aussi un danger, parce que cela pourrait réduire à néant, véritablement, la lutte qu’ils sont en train de mener.
Ainsi, il a remercié les personnes qui ont accepté de témoigner devant les médias pour parler de leur maladie. Cela, dit-il, contribue à réduire la stigmatisation. ‘’Le traitement est essentiel, parce que, quels que soient les efforts, nous aurons toujours des personnes qui tomberont malades. Cette prise en charge est globale et nécessite le savoir-faire du médecin. Nous avons beaucoup de malades in extrémiste, parce qu’ils avaient des complications gravissimes ou avaient des affections concomitantes graves qui avaient pu être dépistées à temps et prises en charge correctement’’, révèle le Pr. Seydi.
Le pays va désormais se baser que sur ses résultats pour prendre des décisions
Néanmoins, il souligne que cette prise en charge nécessite des moyens. Parmi ceux-ci, un seul fait objet de polémique. C’est le traitement à base d’hydroxychloroquine et d’azytromicine. Selon l’infectiologue, compte tenu de cette polémique, ils vont se baser que sur leurs résultats pour prendre des décisions. ‘’Nous allons donc poursuivre notre traitement et poursuivre l'évaluation des traitements disponibles en relation avec l'Institut Pasteur de Dakar’’, précise le Pr. Seydi. Dans les projets de recherche, ils ont analysé les données de 559 patients. Celles-ci sont issues des sites de Fann, de Dalal Jamm et de Diamniadio.
Parmi ces 559 patients, explique le Pr. Seydi, 498 sont âgés de plus de 12 ans. L'âge médian est de 33 ans et tous les âges ont été représentés, des nourrissons aux personnes âgées de 85 ans. Il y a autant d'hommes que de femmes. Et 1 patient sur 5 a eu une comorbidité. En plus, 65 % des patients hospitalisés dans ces sites sont symptomatiques. ‘’A Fann, 89 % des patients hospitalisés sont symptomatiques, du fait que nous avions choisi, avec le Samu, en accord avec le professeur, d’y orienter en priorité les cas graves et les cas à risque. Donc, ce traitement à base d’hydroxychloroquine et d’azytromicine administrés nous a montré que l’efficacité était réelle. Parce que la durée médiane des patients d'hospitalisation qui avaient pris ce traitement était de 10,5 jours versus, 13 jours chez les patients qui n'avaient pas pris ce traitement’’, révèle-t-il.
Selon le spécialiste, tous les patients qui ont pris ce traitement au stade précoce, c'est-à-dire avant l'apparition de complications, sont guéris et aucun n'est décédé. Seuls 12 % de cas d'intolérance sont notés, informe le Pr. Seydi. Les effets secondaires cardiovasculaires, dit-il, se sont vus sur 0,8 % des cas. Tous les autres effets secondaires, fait-il savoir, étaient bénins et réversibles à l'arrêt du traitement, sans nécessiter un traitement supplémentaire. ‘’C'est donc dire que le traitement est efficace pour réduire la charge virale. Parce que les patients ne sortent qu'après deux charges virales négatives. Le traitement est efficace dans la prévention des complications qui peuvent aboutir aux décès, s’il est pris précocement et si le traitement est bien toléré’’, précise le Pr. Seydi.
Par ailleurs, il soutient que, désormais, la lutte est entre les communautés. ‘’Il ne faut pas se leurrer. Plus il y aura des cas, plus nous risquons d’être débordés et les conséquences risquent de tomber sur tout le monde. J’en appelle donc au respect des mesures qui sont édictées par le ministère de la Santé et de l’Action sociale, qui sont des mesures simples et invariables’’.
VIVIANE DIATTA
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