Publié le 15 Jun 2020 - 19:31
OPERATION CONTRE LE TRAFIC DE BOIS ET DE CHANVRE INDIEN EN CASAMANCE

Un véhicule de l’armée saute sur une mine

 

Les mines ont encore fait parler d’elles en Casamance. Après Mbissine, il y a quelques jours, le village de Leufeu s’est tristement illustré, ce samedi. Ces deux incidents posent une fois de plus la problématique de la relance des opérations de déminage humanitaire dans la région Sud.

 

Un véhicule militaire a sauté, ce samedi, peu avant 17 h, sur une mine antichar à Leufeu, village situé dans le Nord-Sindian, à quelques encablures de la commune de Sindian, dans le département de Bignona. Les huit militaires à bord ont été blessés et le véhicule à moitié endommagé, selon nos sources. L’incident a eu lieu lors d’une opération de lutte contre le trafic de bois et de chanvre indien qui s’opère à grande échelle dans cette zone, malgré les efforts consentis par l’Etat, notamment depuis août 2006, dans le cadre de l’opération de restauration de la souveraineté nationale et de sécurisation des personnes et des biens effectuée par l’armée. Une opération de grande envergure qui a permis le démantèlement de la plupart des sanctuaires rebelles dont certains ont fini de renaître de leurs cendres.

L’on se souvient que c’est dans cette même zone qu’une employée suisso-américaine du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a été tuée par l'explosion d'une mine antipersonnel, au passage de son véhicule. Jeannette Fournier, 50 ans, avait perdu la vie, le 4 septembre 2006, sur la route menant au village de Tandine. Les trois autres employés, deux Sénégalais et un Ukrainien, avaient été blessés.

La semaine dernière, un militaire avait sauté sur une mine, dans le village de Mbissine de la commune d’Adéane, dans le département de Ziguinchor. C’était lors d’une opération de sécurisation des populations retournées dans leurs localités abandonnées, en raison des violences notées dans cette partie.

Au-delà de ces deux incidents, c’est toute la question de la relance du déminage en Casamance qui se pose avec acuité. L’on sait depuis, que le Nord-Sindian est pollué notamment dans la zone comprise entre Leufeu, Tandine, Djaboudior-Tengal et Djaboudior-Frontière, Tambaff ou encore Kourègue et Kabekel. Malheureusement, depuis le lancement des opérations de déminage humanitaire en Casamance,  le Nord-Sindian n’a pas fait l’objet d’un déminage, encore moins d’enquêtes techniques ou même non techniques : étapes du déminage humanitaire qui consistent à détecter à l’aide d’outils techniques la présence ou non de mines pour ensuite procéder à leur enlèvement/destruction afin de sécuriser des carrières et des dalots lors d’une opération de déminage.

Seules des campagnes d’éducation aux risques des mines (ARM) y avaient été menées. Portées par l’Association sénégalaise des victimes de mines, ces campagnes qui concernaient une trentaine de villages, avaient  été rendues possibles grâce au soutien de Handicap International (HI). Elles visaient à contribuer, par le biais de séances de prévention, à la réduction du nombre d’accidents causés par les mines et REG (restes explosifs de guerre) dans cette zone dont l’ampleur de la contamination ne souffre d’aucun doute. Il s’agissait, de façon précise, ''d’apporter aux populations les connaissances nécessaires pour leur permettre de mieux faire face aux risques des mines et REG afin qu’elles adoptent un certain nombre de comportements positifs relativement à cette menace, en attendant le démarrage d’un déminage dans cette zone'’.

Et pourtant, les acteurs présents à la revue annuelle 2012 du Centre national anti-mines du Sénégal (CNAMS) tenue en mars 2013 à Ziguinchor, avaient fortement plaidé la poursuite des enquêtes non techniques, notamment dans le Nord-Sindian, Diouloulou et au sud de la région.

Malheureusement, depuis le vendredi 3 mai 2013, date à laquelle 12 démineurs de la société Méchem, qui opéraient sur le site de Kaïlou, à une vingtaine de kilomètres de Ziguinchor, dans l’arrondissement de Nyassia, avaient été enlevés par des hommes de César Atoute Badiate, au motif que ces derniers ont, dans cette zone, franchi la ‘’ligne rouge’’ les opérations de déminage en Casamance, ont été suspendues. Seule une zone située le long de la route nationale 6 (RN6) avait fait l’objet d’un agrément entre le Front Sud et l’Etat. Cet agrément a ainsi permis à l’opérateur de déminage Mechem de procéder à des enquêtes techniques.

Toutefois, au début de l’année 2015, le Front Sud avait montré des signes de détente par rapport à son opposition au déminage dans certaines zones qui accueillent le retour de réfugiés. En effet, suite à un mouvement massif ou à une volonté exprimée de retour de populations dans des villages abandonnés depuis plusieurs années, des négociations avaient été entamées entre le MFDC et les représentants des communautés pour que les opérations de dépollution dans ces zones fortement impactées par la présence de mines se poursuivent. Etaient concernés au moins 7 villages et une piste dans la zone comprise entre le sud de Nyassia et la frontière bissau-guinéenne.

‘’Les acteurs concernés par le déminage (opérateurs et société civile) avaient suivi avec beaucoup d’intérêt ces négociations entre les deux parties. ‘’Les avancées positives de ces pourparlers avaient même conduit à des propositions d’élaboration de stratégies de relance des opérations de déminage dans la zone concernée, en concertation avec le Front Sud. Cette stratégie s’insérait dans le sens de la reprise de l’assistance humanitaire de l’Etat aux populations réinstallées dans leurs villages.
A la lumière des signes de très bonne volonté exprimés par le Front Sud au cours des négociations avec ces communautés, tous les observateurs attendaient la conclusion imminente d’un accord pour la reprise du déminage. Malheureusement, cette dynamique positive a brusquement été interrompue par des événements survenus le 12 avril 2015 à Emaï (Oussouye) entre l’armée et les combattants du Front Sud. Depuis, ces négociations ont connu un coup d’arrêt.

Avec les incidents de Mbissine et de Leufeu, il urge de relancer le débat autour de la reprise du déminage humanitaire en Casamance pour finir avec ces engins de la mort qui ont fait 830 victimes au 30 avril 2018, classant le Sénégal parmi les 30 pays les plus touchés.

HUBERT SAGNA (ZIGUICHOR)

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