Les islamistes s'enracinent à Gao
Deux mois après avoir pris le contrôle de la ville, les djihadistes appliquent la charia tout en s'efforçant de gagner le soutien de la population.
Gao s'est habitué à la charia. Dans la cité du fleuve du nord malien, aux mains des islamistes du Mouvement unicité et jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao) depuis des semaines, plus une femme ne circule sans son voile. «Même les petites filles doivent être couvertes, les infirmières aussi sinon il y des remontrances», affirme Ousmane Daba, l'un des chefs du Conseil régional des jeunes de Gao. Les bars ont tous été fermés, comme les dancings. Les plus célèbres ont fini en flammes. Les autres en mosquée. «Les islamistes nous demandent de prier dedans», sourit un habitant qui tient à rester anonyme. Pour autant, le même affirme «n'avoir aucun problème avec les islamistes». «Tout se passe bien avec eux. La vie est calme», reconnaît le journaliste Amadou Maïga.
Ce soulagement, perceptible dans toute la ville, le Mujao, né d'une scission d'al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi), a su le faire naître. En mars dernier, quand les hommes du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA), une rébellion touareg laïque, chassent l'armée malienne en déroute de Gao, la cité sombre dans la peur. Sur fond de vieilles tensions entre la minorité locale touareg et la majorité composée de tribus noires, les Songhaï et les Peuls, le MNLA se fait vite rejeter. «Les guerriers rançonnaient les gens», raconte, encore ulcéré, un professeur de Gao. Le Mujao, entré dans la ville dans les pas du MNLA, se mue peu à peu en défenseur du peuple. Fin juin, le meurtre d'un conseiller municipal précipite la chute des rebelles touaregs. Le MNLA ouvre le feu sur la foule venue protester. Le Mujao tire à son tour et chasse les laïques.