‘’Il faut leur fournir plus de rationnel pour leur faciliter une prise de décision plus éclairée’’
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Ils sont nombreux les jeunes qui, pour X raisons, ne respectent pas les mesures barrières ; d’autres sont réticents à la vaccination. Pour le sociologue Tidiane Ndoye, une communication bien pensée, bien construite avec les médias pourrait les amener à avoir des informations plus factuelles.
On a constaté un refus des jeunes d'aller se faire vacciner. Qu'est qui pourrait expliquer ce comportement ?
Il faut d’abord s’assurer que c’est un refus ou une situation d’attente (réticence) où les jeunes s’accordent un temps d’observation de l’évolution de la vaccination dans les pays qui ont commencé avant nous. De plus, lors de la première covid19, les jeunes étaient considérés comme non concernés. Dans ce sens, ils ne se sentaient pas en devoir de se vacciner. Maintenant que le variant Delta les concerne et que la vaccination est ouverte à toutes les catégories d’âge, de plus en plus, de jeunes se rendent dans les centres de vaccination pour prendre leur dose.
Comment qualifier cette attitude dans un pays où les jeunes sont majoritaires ?
Il convient d’amener les jeunes à se sentir plus concernés et cela passe par les conscientiser qu’ils peuvent ne pas développer des formes graves, mais transmettre la maladie à leurs parents ou grands-parents avec lesquels ils vivent et qui peuvent développer des formes plus graves. Compte tenu du fait que les jeunes sont majoritaires, il faut en faire une cible privilégiée.
Le respect des mesures barrières pose aussi problème à leur niveau.
Les mesures barrières sont aussi des mesures qui coûtent de l’argent. Depuis qu’on a parlé de la 3ème vague, le prix des masques a encore augmenté. Quel est le jeune qui peut se payer autant de masques qu’il veut pour respecter le temps qu’on lui indique ? Qui peut acheter les gels, si les jeunes sont dans des familles pauvres. La question des moyens, le climat (chaleur ambiante) doivent être prises en compte pour encourager l’adoption progressive des mesures barrières.
De plus, depuis l’annonce du nombre de décès, de plus en plus de jeunes se dévouent en cherchant à se vacciner et à faire plus attention, quand ils en ont les moyens. La communication avec les médecins, les gardiens de cimetières et autres personnes informées améliore la compréhension des enjeux auprès des jeunes.
Que faire donc pour les amener à se faire vacciner et respecter les mesures barrières ?
Il faut que les jeunes se sentent plus concernés, en se rendant davantage compte que ce variant ne les épargne pas. De plus, on dispose d’un recul historique montrant que dans les pays qui se sont vaccinés, ils ont moins de cas. Surtout moins de cas graves. Alors que la maladie fait des ravages chez les personnes non vaccinées. Il faut leur fournir plus de rationnel pour leur faciliter une prise de décisions plus éclairée. Je pense qu’ils tiennent à leur santé, au même titre que toutes les autres composantes de la société. Une communication bien pensée, bien construite avec les médias pourraient les amener à avoir des informations plus factuelles. De plus, il faut savoir utiliser les plateformes internet (web) qu’ils fréquentent plus assidûment, en attaquant les lieux même où s’organise la désinformation : les réseaux sociaux.
Comment faire pour amener cette jeunesse à porter la lutte contre le coronavirus ?
Les jeunes ont toujours porté des combats divers à travers les Association Sportives et Culturelles (ASC), les associations de quartiers, de clubs de jeunes, etc. Il convient de remobiliser ces espaces de socialisation pour les amener à prendre conscience des risques pour les familles, les aînés, la société, leurs amis (ex : des footballeurs décédés…). Il faut également rendre les vaccins disponibles pour que la ruée vers les centres de vaccination ne se solde pas par des échecs. En ville, le temps est compté et il faudrait tout faire pour ne rater aucune occasion de vacciner les volontaires.
Qu'est-ce qui n'a pas marché au point d'en arriver à ce stade ?
Le Covid-19 coïncide sans doute pour une première fois dans l’histoire de l’humanité avec un accès presque généralisé aux réseaux sociaux avec leur potentiel d’information et de désinformation amenant à parler d’infodémie. Le principe de précaution a amené un nombre important de citoyens à se méfier de la vaccination, à regarder ce que cela va donner avec les premiers vaccinés. Maintenant que les évidences sont de plus en plus disponibles (situation des vaccinés en Occident) avec moins de cas graves, nombreux sont ceux qui se portent volontaires.
VIVIANE DIATTA