L’amnistie de Gbagbo dépend de l’Assemblée, selon Kouadio Konan Bertin
Le ministre de la Réconciliation, Kouadio Konan Bertin, a donné un long entretien télévisé ce mardi soir, quelques jours après la fête nationale et l'annonce de la grâce présidentielle accordée à Laurent Gbagbo par le président Ouattara.
Il voulait faire le bilan de ses 20 premiers mois à la tête du ministère de la Réconciliation et de la cohésion nationale, raconte notre correspondant à Abidjan, Youenn Gourlay. Mais le ministre Kouadio Konan Bertin était surtout attendu sur un sujet : la grâce présidentielle accordée à Laurent Gbagbo samedi. Un geste qui n’a pas été du goût de l’ancien président, absent dimanche à Yamoussoukro lors de la fête de l’indépendance.
Et pour cause, son parti, le Parti des peuples africains-Côte d'Ivoire (PPA-CI) a expliqué mardi que Laurent Gbagbo avait demandé non pas une grâce, mais une amnistie lors du dialogue politique. Kouadio Konan Bertin a pointé du doigt l’attentisme de l’opposition. « L’amnistie relève de la loi, la loi se prend à l’Assemblée, au parlement. Si tant est que nos frères de PPA-CI veulent une amnistie, alors même qu’ils ont des députés et un groupe parlementaire, pourquoi n’ont-ils pas emprunté cette voie eux-mêmes ? »
La différence est de taille pour Laurent Gbagbo, puisque la grâce, contrairement à l’amnistie, ne supprime pas la condamnation du casier judiciaire. Condamnation que le PPA-CI conteste vivement, puisqu’elle a été prononcée en l’absence de l’ancien chef d’État. Elle l’empêcherait d’ailleurs de se représenter à l’élection présidentielle de 2025.
Mais sur le sujet, le ministre balaie la critique. « Comment voulez-vous qu’en 2022, ce qui nous préoccupe, ce soit la candidature d’un individu ? Nous voulons bâtir la paix, créer les conditions d’élections apaisées en 2025. La priorité, ce n’est pas de dégager maintenant les candidatures. » L’épisode semble mettre un coup d’arrêt au dialogue politique. Mais le ministre a estimé que Laurent Gbagbo devait accepter ce premier pas dans le processus de réconciliation.
Une question d’honneur, pour Justin Katinan Koné
Il est trop tôt pour évoquer l'aspect politique de cette annonce du président Ouattara, juge également le vice-président et porte-parole du PPA-CI, Justin Katinan Koné. Obtenir l'amnistie de Laurent Gbagbo vise avant tout, selon lui, à laver l'honneur de l'ancien chef de l'État ivoirien.
« La grâce, elle n’efface pas les faits, explique-t-il au micro de Claire Fages. C’est-à-dire que le président Laurent Gbagbo est considéré comme un criminel. Est-ce qu’il a été privé de ses droits civiques, je n’en sais rien. C’est pourquoi je ne rentre pas dans ce débat-là. Il aura lieu certainement, mais pour le moment, ce qui nous intéresse, c’est un homme, un père de famille, fût-il ancien président, quelqu’un qui a construit toute sa vie autour de certaines valeurs, à qui on impute une responsabilité pour des faits qui n’ont jamais eu lieu. Pour le moment, nous nous arrêtons à ça. Si tant est que ceux qui ont proposé la grâce, leur intention est autre que ce que je viens de dire, alors nous aviserons. Mais pour nous, nous disons que l’objectif, c'est l’amnistie qui enlève totalement cette écriture infâme dans le casier judiciaire du président Laurent Gbagbo et dans sa vie, cette tâche noire qu’on veut artificiellement mettre sur sa vie. »
RFI