Mamadou Moustapha Ba fait l’unanimité auprès des députés
Si aucun projet de budget n’a été voté à l’unanimité par les députés de la majorité et de l’opposition, la personne du ministre des Finances et du Budget a au moins réuni l’assemblée nationale pour regarder d’’un même œil.
Même dans la divergence, certains sujets font l’unanimité. Dans cette assemblée nationale newlook, caractérisée par les bisbilles entre majorité et opposition, les compétences du ministre des Finances et du Budget ont été saluées, hier, par les députés. Ce dernier jour du marathon budgétaire 2023 a permis aux adversaires politiques parlementaires de s’accorder sur la pédagogie, le professionnalisme, la courtoisie, le sens du devoir et bien plus encore de Mamadou Moustapha Ba.
Même les plus virulents, à l’image de Guy Marius Sagna, s’y mettent : ‘’vous êtes parmi les rares personnes du gouvernement de Macky Sall avec qui je peux parler. J’ai du respect et de l’admiration pour des cadres sénégalais comme vous, qui sont nombreux dans le pays. Et sans eux, la situation aurait sans doute été pire. Car ils résistent à leur manière’’. Pour un autre député de la coalition Yewwi Askan Wi, Ahmed Dicko, Mamadou Moustapha Ba fait partie de ceux qui, au-delà de ce gouvernement, seraient utiles à n’importe quelle équipe successeuse.
Ces ‘’éloges’’ n’empêchent pas les opposants de regarder les choses en face. Même s’il n’est membre d’aucun parti politique, le ministre des Finances et du Budget exécute la vision du président de la République Macky Sall. Un ‘’budget néocolonialiste’’, ni ‘’clair, ni sincère’’ que ne ’’votera pas’’ le député activiste du département de Ziguinchor.
Guy Marius Sagna : Un ‘’budget néocolonialiste’’, ni ‘’clair, ni sincère’’
C’est également l’avis de Nafissatou Diallo qui s’est appesantie sur le Premier ministre. Amadou Ba doit faire sa déclaration de politique générale, ce lundi. Pourtant, de l’avis de la députée de l’opposition, il aurait dû s’adonner à cet exercice avant cette session budgétaire, afin de permettre aux parlementaires d’apporter leurs propositions pour qu’elles soient prises en compte dans les différents programmes. ‘’Si vous avez eu le courage de porter tous les programmes de budget de tous les ministères, le premier aurait dû en faire autant’’, lance Nafissatou Diallo.
A l’arrivée au pouvoir du président de la République Macky Sall en 2012, la dette publique était ‘’2 760 milliards de francs CFA.’’ En comparant avec le niveau d’endettement actuel, Nafissatou Diallo se demande ‘’si l’on crée assez de richesses pour supporter des emprunts pareils ?’’ Lorsque le ministre des Finances et du Budget évaluait la dette publique en commission, il a assuré que ‘’la dette de l'administration publique (qui) reste le référentiel en matière de comparaison, était estimée, fin juin, à 11 326 milliards de francs CFA, soit 67% du PIB. Toutefois, les projections, poursuit-il, pour l'encours de la dette en fin décembre 2022 prévoient un montant de 11 447,2 milliards FCFA, soit 67,9% du PIB.’’
Relativement à la couverture du besoin de financement de l’année à venir, le Ministre des Finances et du Budget a informé qu’il est de 2 345,1 milliards FCFA. Elle est répartie entre les dépenses sur ressources extérieures (emprunts projets) pour un montant de 435,6 milliards de FCFA, des appuis budgétaires des Partenaires Techniques et Financiers (emprunts programmes) de 158 milliards de FCFA. Il y a aussi les autres emprunts qui sont estimés à 1 751,5 milliards FCFA.
1 751,5 milliards francs CFA à emprunter en 2023
Toutefois, l’explication de cette situation a été faite par Mamadou Moustapha Ba. Selon lui, la dette transcende les régimes politiques et que des prêts ayant permis la réalisation de projets importants effectués avant l'année 2000, notamment le barrage de Diama et de Manantali figurent encore dans l'encours de la dette publique actuelle ? Sur un autre plan, il a indiqué que, de 2000 à 2012, la question de la mobilité, avec notamment le financement de l'autoroute, ainsi que celle de l'électricité, à travers la recapitalisation de la Senelec, se sont traduites par des emprunts qui impactent pour plus de 2 000 milliards de francs CFA l'encours actuel de la dette. Selon Moustapha Ba, de 2012 à maintenant, le recours aux prêts concessionnels, semi concessionnels et aux marchés financiers a été amplifié pour financer le développement du pays. Il en est ainsi des infrastructures publiques, de l'électrification rurale, des politiques d'équité territoriale et d'inclusion sociale.
Mais les échanges deviennent plus ‘’statistiques’’, avec les interventions de l’honorable Malick Diop. Le député de la majorité a rappelé que le budget 2023 du Sénégal est projeté à 6 411 milliards de francs CFA, avec une augmentation de la croissance qui va passer à deux chiffres, l’année à venir. Toujours dans ces projections, 47 %, 2 353 milliards de francs CFA, sont réservés aux dépenses sociales. Assez pour mériter les félicitations du député de l’AFP qui, à l’image de tous ses collègues de cette 14ème législature, a salué les compétences et qualités de Mamadou Moustapha Ba.
Sur 6 411 milliards de francs, 47 % réservés aux dépenses sociales
Il a été suivi dans cet élan par Abdoulaye Diouf Sarr qui a tenu à répondre à ceux qui estiment que la croissance ne se mange pas. L’ancien ministre de la Santé est d’avis que les performances de l’économie sénégalaise se ressentent à travers les milliards de subventions accordés par le gouvernement pour permettre aux Sénégalais de ne pas ressentir les effets de la crise mondiale. Mais aussi, à travers le Bus Rapid Transit (BRT) ; le Train express régional (TER) ; les offres sociales qui améliorent les conditions de vie des populations.
Loin de ce beau tableau dépeint par la majorité, l’honorable Bara Gaye a soulevé le déficit budgétaire du Sénégal qui, en 2022, dépasse 6 %, soit le double de la norme communautaire UEMOA de 3 %. Évoquant toujours les critères de convergence, le maire de Yeumbeul Sud fait savoir que les recettes budgétaires en cours de l’année sont estimées à 3 486,7 milliards de francs CFA pour des dépenses salariales de 1 273,2 milliards. Ce qui donne un ratio de 36 % alors que certains salaires ne sont pas encore pris en compte. De ce fait, le Sénégal risque de dépasser le seuil communautaire de 35 % établi par l’UEMOA. ‘’Un choix assumé par le Sénégal’’, assure le ministre des Finances et du Budget.
Selon Mamadou Moustapha Ba, le solde budgétaire négatif est projeté à 1 045,5 milliards de francs CFA. Rapporté à la richesse nationale estimée à 19 008,7 milliards FCFA, il représenterait 5,5% de ce PIB, contre 6,2% en 2022 ; ‘’l’objectif étant de le ramener et de le contenir à terme, en dessous de 3%, à la faveur des réformes engagées sur la fiscalité et la gestion des dépenses’’.
Le Ministre est aussi revenu sur la trajectoire de consolidation du déficit, en indiquant que, de 6,7% en 2011, le déficit a été ramené à 3,9% en 2019. En 2020, la crise sanitaire est apparue avec ses conséquences contre lesquelles il fallait faire face, sans pour autant élever le taux de pression fiscale. Le Programme de Résilience Économique et Sociale (PRES) de 1000 milliards FCFA réparti entre des ressources décaissables (625 milliards) et non décaissables (325 milliards) a été mis en place. Le déficit budgétaire a ainsi été creusé, cette année-là, de 6,4%. Depuis, le processus de consolidation du déficit a repris et il est projeté à 5,5% pour 2023.
Augmenter la pression fiscale
Le président du groupe parlementaire Yewwi Askan Wi a quant à lui fait un plaidoyer pour une meilleure mobilisation des ressources internes. Car, assure Birame Soulèye Diop, ‘’comme l’a soulevé Ousmane Sonko, si tous ceux qui doivent payer en interne le font, on aurait de moins en moins besoin d’aller emprunter de l’argent.’’ D’autres leviers, comme la lutte contre la corruption, peuvent également booster le budget du Sénégal, ajoute-t-il. Sur ces suggestions, le ministre des Finances et du Budget a assuré que son département a bien noté les demandes des députés et va réfléchir aux moyens de leur application.
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MINISTÈRE DES FINANCES ET DU BUDGET
Les députés adoptent le ‘’Budget solution’’ de Mamadou Moustapha Ba
Le projet de budget du Ministère des Finances et du Budget, arrêté à 353 017 122 267 de francs CFA, a été adopté hier par l’Assemblée nationale à 87 voix contre 75. Un choix salué par le ministre Mamadou Moustapha Ba qui avait assuré devant les députés qu’en adoptant ces crédits, ‘’vous allez renforcer le pouvoir d’achat des Sénégalais’’. La revalorisation de la masse salariale dans la fonction publique, la politique de subvention des denrées alimentaires et de l’énergie, les emplois créés dans le secteur public sont quelques exemples de confirmation de cette affirmation. D’ailleurs, fait savoir le ministre des Finances, ‘’c’est 448 francs CFA et 192 francs CFA que le gouvernement paye pour chaque sénégalais qui achète un litre de carburant. La subvention de ces deux articles représente 527,7 milliards de francs CFA. Cela fait deux fois le budget du ministère des Forces armées’’.
Autant de solutions que le ministre des Finances a résumées, à travers d’autres programmes : le Puma (12 milliards), le PUDC (20 milliards), les bourses de sécurité familiales (35 milliards), les agriculteurs (80 milliards), la pêche etc. Le vote de ce budget devrait permettre la construction et la réhabilitation des stades Léopold Sédar Senghor, Lamine Guèye, Ely Manel Fall et Alioune Sitoé Diatta. C’est surtout appuyer la candidature du Sénégal à l’organisation de la Coupe d’Afrique des Nations (Can) 2027. Entre autres programmes ont été relevés pour 2023: le prolongement du TER jusqu’à AIBD, l’accélération des projets BRT, les autoroutes à péage Mbour-Fatick-Kaolack et Dakar-Tiavouane-Saint Louis.
Le budget entend poursuivre la dynamique de mise en œuvre des réformes budgétaires et financières, de consolidation budgétaire et de performance, en vue notamment d’atteindre la cible communautaire de déficit budgétaire de 3% à moyen terme. Mais aussi, d’atteindre les objectifs de l’État en matière de mobilisation des recettes permettant de réaliser, à l’horizon 2024, un taux de pression fiscale d’au moins 20% ; d’améliorer grâce à la Stratégie de gestion de la dette à moyen terme (SDMT), le profil de la dette avec une politique prudente d’endettement qui privilégie les emprunts concessionnels et le marché financier régional ; de continuer le suivi et la supervision du secteur financier et d’accentuer les efforts dans la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.
Lamine Diouf