L'enfer pour Yérim et Aîssatou
Alors qu’elle était censée ne pas participer au procès l’opposant à Cheikh Yérim Seck (CYS), Ndèye Aïssatou Tall s’est présentée hier en chair et en os au tribunal. Elle est arrivée de Montpellier avant-hier (mardi). L’accusatrice du journaliste est restée longtemps invisible, avant de faire son apparition lorsque Cheikh Yérim Seck a été appelé à la barre. Elle était habillée d’un jean bleu et d’un tailleur de la même couleur. Il était 11h 20mn lorsque, le directeur de publication du site Dakaractu, habillé d’une demi-saison blanche, s'est dirigé vers la barre. Sourire aux lèvres, l’air décontracté, il a fait un signe de salut au tribunal, avant de serrer la main de certains de ses avocats, debout à côté de la barre. Après cette brève échange de civilités et l’isolement préalable des témoins, a débuté l’interrogation d’audience.
''À la vue du sang, elle a paniqué''
Au cours des débats qui se sont déroulés sans incident, jusqu’au moment où les conseils de la partie civile ont commencé à poser leurs questions, le journaliste a contesté les faits. Parlant avec assurance et en usant de gestuelles, Cheikh Yérim Seck a affirmé avec force n’avoir pas violé Ndèye Aïssatou Tall. Parce qu’argue-t-il, la jeune fille était consentante. ''J’ai entretenu une relation sexuelle normale avec une personne responsable. Elle a expressément consenti, sinon elle m’aurait poussé ou griffé, avec ses ongles pointues'', s’est défendu le journaliste. À la question : ''Pourquoi s’est-elle montrée hostile juste après le rapport et pourquoi a-t-elle porté plainte contre vous, si elle était consentante ?'', Cheikh Yérim Seck a répondu au juge Adiyatou Guèye, président de la séance : ‘’C’est à la vue du sang qu’elle a paniqué. Elle m’a dit qu’elle appartient à une famille conservatrice, se demandant ce qu’elle allait dire à son père''. Le journaliste de poursuivre : ''N’eût été sa sœur, nous n’en serions pas là. Elle a été entraînée dans un engrenage qu’elle ne maîtrise pas, car j’étais sérieux et j’envisageais l’avenir avec elle''. Poursuivant sa défense, le journaliste a rejeté les constatations du certificat médical. ''Mes experts, dira-t-il, m’ont dit que les saignements peuvent avoir deux origines : soit déchirure hyménale ou blessure à l’utérus’’. Néanmoins, sur interpellation d’un des avocats de la partie civile, Cheikh Yérim Seck a reconnu avoir commis une faute religieuse. Toutefois, il n’a pas manqué d’exprimer ses regrets, tout en contestant le viol. ''Tout dans cette affaire me désole, mais les dégâts sont partagés. Donc, je n’accepte pas d’être accusé de viol'', a-t-il asséné.
''Ta résistance a vraiment été molle''
Une ligne de défense démontée par la partie civile. Parlant avec aisance et assurance, Ndèye Aïssatou Tall a réaffirmé qu’elle n'a jamais voulu entretenir une relation sexuelle avec le prévenu. ''J’étais animée de bonnes intentions. En allant le rejoindre, j’étais partie discuter avec un homme responsable. On a flirté, mais lorsqu’il a voulu me déshabiller, je lui ai dit que je n’étais pas là pour le sexe'', a déclaré la jeune fille. La nouvelle bachelière a indiqué que Cheikh Yérim Seck lui a ôté son pantalon, avant de la contraindre à des rapports sexuels. ''Ta résistance a vraiment été molle, même un enfant de 5 ans ne se serait pas laissé déshabiller comme ça'', lui a lancé le juge. Pour toute réponse, Ndèye Aissatou Tall a indiqué : ''Je ne l’ai pas vu mettre le préservatif et je ne pensais pas qu’il passerait à l’acte, car il souriait. Toute ma famille sait que je ne réagis jamais avec violence, mais si j'avais su qu’il allait me violer, je lui aurais cassé la tête’’. Face aux dénégations persistantes de CYS et aux questions accablantes des avocats du journaliste, elle a asséné : "Ce n’est pas parce que je lui ai permis de m’embrasser qu’il ose dire qu’il ne m’a pas violée". Après cette déclaration, Ndèye Aïssatou Tall, jusque-là sereine, a craqué, avant d'aller verser de chaudes larmes dans les bras de sa mère, présente dans la salle.
À la suite des deux protagonistes, les témoins ont été appelés à la barre. Les employés de la Résidence Madamel, présents au moment des faits, ont confirmé les accusations de la jeune fille. Ils ont affirmé avoir entendu des cris stridents de la victime en provenance de la chambre 9. ''Lorsque je suis allé m’enquérir de la situation, Cheikh Yérim m’a rassuré en me disant qu’il voulait coucher avec sa copine, mais qu'elle avait peur. Je lui ai demandé de la laisser partir, mais il ne m’a pas suivi’’, a témoigné Cheikh Lô, le responsable de l’hébergement. Il a ajouté avoir trouvé des traces de sang dans la chambre, après le départ du couple. Un témoignage corroboré par le valet de chambre Mamadou Diallo qui a indiqué avoir trouvé des traces de sang un peu partout.
''Un maniaque sexuel''
Toutes choses qui ont conforté les avocats de la partie civile, convaincus de la culpabilité de Cheikh Yérim Seck. Aussi n’ont-ils pas hésité à dépeindre le journaliste comme un maniaque sexuel. C’est Me Moussa Sarr qui a donné le ton en lançant : ‘’ Il aime le fric, les fesses et le faste. Et la conséquence, ce sont les frasques’’. La religion, la littérature, la morale, rien n’a été laissé par les robes noires pour que le journaliste soit condamné au maximum de la peine. ‘’Contrairement à l’image qu’il a véhiculée, lors des émissions, il a déshonoré toutes les mères, filles et ses deux épouses’’, assène Me Bourso Pouye qui a réclamé la somme de 100 millions de francs Cfa, au titre de dommages et intérêts. ''L’argent sera reversé à l’Association des juristes sénégalaise et au comité de lutte contre les violences faites aux femmes’’, indique-t-elle. S’inscrivant dans la logique des 15 avocats de la partie civile, le représentant du Parquet a requis trois ans ferme. La défense a plaidé la relaxe.
Fatou SY
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