Les prévisions optimistes du FMI pour le Sénégal
Le Front monétaire international (FMI) a salué les initiatives des nouvelles autorités sénégalaises qui ont affiché leur détermination à assainir les financements et à réduire l’endettement du pays, à travers la publication d’un document sur les perspectives économiques de l’Afrique subsaharienne pour 2024. Néanmoins, cette politique doit être accompagnée par la poursuite des réformes en matière de fiscalité, de mobilisation des ressources et d’intégration économique pour garantir la relance d’une économie productive et durable avec une croissance à 4,0 % en 2025 en moyenne en Afrique subsaharienne.
Le rapport du Fonds monétaire international (FMI) sur les perspectives économiques de l’Afrique subsaharienne se veut optimiste sur les possibilités de reprise de la croissance dans cette phase post-Covid. Ce document, dont ‘’EnQuête’’ détient une copie, rend compte de l’évolution économique en Afrique subsaharienne et révèle que la croissance va passer de 3,4 % en 2023 à 3,8 % en 2024 et devrait atteindre 4,0 % en 2025 en moyenne en Afrique subsaharienne.
Dans cette optique, le Sénégal, classé dans la catégorie des pays à revenu intermédiaire en Afrique, pourrait connaître une forte croissance (8,3 % en 2024, respectivement) grâce à la mise en service de projets gaziers et pétroliers.
Selon l’institution de Bretton Woods, le Sénégal a considérablement renforcé son attractivité ces dernières années, en réduisant le temps nécessaire pour créer une nouvelle entreprise, en simplifiant les démarches administratives et en réduisant les coûts de transaction (le délai qui, auparavant, était de deux mois est aujourd’hui de seulement 48 heures). Des réformes qui ont contribué à l'attractivité auprès des investisseurs, comme l’illustre l’augmentation des flux nets d’IDE, qui sont passés de 1,6 % du PIB en 2012 à 9,3 % en 2022, notamment dans le secteur des hydrocarbures.
Le FMI a aussi permis aux pays subsahariens comme le Sénégal de développer des capacités, en fournissant de l’assistance technique et des formations pour la résilience et la durabilité des économies africaines.
En outre, le FMI semble aussi en phase avec les nouvelles autorités sénégalaises dans leur volonté d’assainir les finances publiques et de réduire les déficits, afin d'être moins dépendant des flux financiers extérieurs. “Il est possible d’optimiser le recouvrement de l’impôt en simplifiant le système fiscal, en élargissant l’assiette de l’impôt, en faisant mieux respecter les obligations fiscales et en tirant parti des nouvelles technologies. Une stratégie de recettes publiques à moyen terme permet d’orienter les réformes, de les rendre plus crédibles et d’en faciliter la mise en œuvre, notamment au Sénégal”, expliquent les experts du FMI dans ce texte.
Toujours selon les collaborateurs de Kristalina Georgieva, directrice générale du FMI, les pays subsahariens comme le Sénégal ont eu à bénéficier d’un fort soutien de la part de ladite institution à travers divers financements et autres droits de tirage spéciaux d’une valeur de 58 milliards de dollars, depuis 2021, pour faire face aux divers défis que rencontrent leurs économies, nous révèle le document du FMI.
Les investissements directs étrangers (IDE) ont augmenté d’environ 10 % en 2023 par rapport à l’année précédente et, en moyenne, les ratios d’endettement public se sont largement stabilisés autour de 60 % du PIB en 2023, et devraient baisser cette année.
Dans ce sens, la Côte d’Ivoire a procédé avec succès à une émission euro-obligataire en janvier 2024, mettant ainsi un terme à une période de près de deux ans pendant laquelle la région n’avait plus accès aux marchés internationaux de capitaux, rapporte toujours le document du FMI.
Néanmoins, la plupart des pays subsahariens restent encore confrontés à un certain nombre de défis liés au manque de financements, des coûts d’emprunt élevés et des risques de refinancement, tandis que la mobilisation des recettes publiques nationales reste faible.
Les besoins de financement sont estimés à près 70 milliards de dollars annuels
Selon le FMI, les besoins de financement pour soutenir une économie productive et endogène sont estimés à près 70 milliards de dollars annuels, révèle le document. L’absence de financements extérieurs des pays à faible revenu et la baisse de l’aide publique au développement (APD) poussent les États subsahariens à recourir à d’autres sources de financement qui se caractérisent souvent par des coûts plus élevés et des échéances plus courtes auprès des structures privées, avec des délais de remboursement très courts.
La nécessité d’assurer le service de la dette a poussé de nombreux États africains à réduire les dépenses publiques essentielles à leur développement, mettant en péril les générations futures.
Sur ce, la problématique de l’endettement des pays subsahariens constitue un défi majeur pour les pays en voie de développement. ‘’Les paiements d’intérêts par les États en 2023 ont représenté 12 % des recettes publiques (hors dons) pour le pays médian d’Afrique subsaharienne, soit plus du double du niveau observé, il y a dix ans. Ces remboursements de la dette extérieure, précise le texte, vont atteindre 5,9 milliards de dollars au titre des euro-obligations en 2024 et 6,2 milliards de dollars en 2025”, renseigne le document du FMI.
Risques d’insécurité alimentaire pour 140 millions d’habitants
Sans oublier les chocs exogènes (terrorisme, changement climatique, instabilité régionale) risquent d’accentuer l’insécurité alimentaire en Afrique subsaharienne, en 2023, pour 140 millions d’habitants de la région subsaharienne.
Les incertitudes liées sur le plan politique avec 18 élections prévues durant l’année 2024, pour la plupart en Afrique de l’Ouest et australe constituent des obstacles à l’essor économique en Afrique.
Le changement climatique exacerbe par ailleurs les difficultés que rencontre l’Afrique subsaharienne, en pesant sur les rendements agricoles et la productivité du travail dans une région déjà vulnérable.
Toujours selon le FMI, la mise en place de ces trois mesures stratégiques : redressement des comptes publics, une politique monétaire axée sur la stabilité des prix et la mise en œuvre des réformes structurelles pourraient permettre d’assurer un développement inclusif et durable pour l’ensemble du continent.
D'après les représentants de l’Institut basé à Washington DC, “un rééquilibrage des comptes publics dans la plupart des pays d’Afrique subsaharienne a été entamé avec des déficits budgétaires qui passent d’une valeur médiane de 5,2 % du PIB en 2022 à 3,7 % du PIB en 2024”, conclut le rapport.
MAMADOU MAKHFOUSE NGOM