L’urgence de protéger la nature
‘’Déeyante ak àdduna’’ ! Tel est l’intitulé de l’exposition de Maya-Inès Touam qui se déroule à la galerie Le Manège, jouant la ‘’prolongation’’ de la Biennale de Dakar. Pour mettre en évidence l’influence et la coprésence de l’homme et de la nature, l’artiste franco-algérienne a puisé son inspiration dans les contes animistes du Sénégal. En faisant un clin d’œil à Henri Matisse, elle propose un corpus visuel composé d’herbiers, de fresques humaines et végétales. Différentes techniques, dont la photographie, ont été utilisées. En effet, elle transfère ses photos dans son ordinateur, puis elle les travaille à nouveau : contrecollage ou collage digital.
Au niveau de la peinture, les codes de couleurs sont remarquables dans les tableaux de Maya-Inès Touam. Les images de bananier, de palmier, de mangrove et de théière s'inscrivent dans cette démarche de montrer une cohabitation très particulière entre l'homme et la nature. Le tableau ‘Femme à l’amphore’ le prouve aussi avec l’image d’une femme, vêtue en bleu, portant une vase bleue à la tête, et qui se trouve à côté d’un tronc d’arbre peint en bleu et d’une natte. On imagine qu’elle représente les femmes qui travaillent dans les plantations. En effet, les modèles sont des employés de la Compagnie fruitière.
‘’Pour faire une photo, elle en prend 1500. C'est donc un processus hyper long, très technique, que l’on voit sur la vidéo à l'entrée de l'exposition. Elle a toute une installation technique et elle prend une par une les images, qui lui permettent ensuite de créer des compositions que vous allez voir après", a-t-on expliqué. Les couleurs, d’un éclat extraordinaire, semblent retravaillées avec l’ordinateur pour montrer la particularité, la spécificité et la démarche artistique de Maya-Inès Touam. Elle trouve certaines similitudes entre l’Algérie et le Sénégal, notamment lorsqu'elle observe la manière dont certaines femmes s’habillent.
Le Sénégal est un lieu incontournable sur la scène artistique contemporaine, notamment à la Biennale de Dakar. Maya-Inès Touam est donc enthousiasmée. Il faut noter que ce projet est le fruit d'une résidence au sein du programme d'échanges artistiques et culturels du Fonds de dotation de la Compagnie fruitière, menée au cœur des Grands domaines du Sénégal à Saint-Louis. Il a, d'après la galerie, bénéficié de l'appui de l'opérateur culturel Versant Sud et de la collaboration des acteurs et savoir-faire des artisans locaux. La Compagnie fruitière du Sénégal est présente à Marseille, où vit Maya. Donc, c'était aussi un lien entre la ville de Marseille et le Sénégal, puisque la Compagnie fruitière a ses exploitations et sa société au Sénégal.
L’autre série porte sur des œuvres sculptées avec les artisans de Saint-Louis. Elle montre surtout les cosmogonies sénégalaises. L’artiste s’est, par exemple, inspirée d’un conte de Louis Camara, qui rappelle la cohabitation entre Mame Coumba Bang, une déesse du fleuve Saint-Louisien, et les habitants.
Dans ce conte, l’auteur relate l’histoire d'Aïssatou, une fille qui est allée faire une offrande à Mame Kumbabang, sur la demande de sa grand-mère. L’objectif de cette offrande est de protéger les populations contre l'avancée de la mer. Mais de nos jours, cette tradition est mise en danger. Saint-Louis est confrontée à des problèmes environnementaux, dont l’érosion côtière.
Entre autres personnes, dont des artisans, Maya a aussi travaillé avec Pape Samba sur un conte qui parle d'une famille peule, issue du nord de Saint-Louis, à Podor, entre autres. Dans ce conte, elle évoque l’histoire d’un enfant à qui on a confié le bétail. La flûte constitue le mode de communication avec la vache. En cherchant une vache perdue,elle s’est retrouvée avec un troupeau.
BABACAR SY SEYE