928 déclarations d’opérations suspectes…

Des chiffres du rapport 2024 de la Cellule nationale de traitement des informations financières (Centif) ont été partagés hier par le directeur de cabinet au ministère des Finances et du Budget Bassirou Sarr. C’était à l’occasion de la 43e Réunion de la plénière du Groupe intergouvernemental d'action contre le blanchiment d'argent en Afrique de l'Ouest (Giaba) tenue à Dakar.
Hier, lors de la 43e Réunion de la plénière du Groupe intergouvernemental d'action contre le blanchiment d'argent en Afrique de l'Ouest (Giaba), le directeur de cabinet au ministère des Finances et du Budget, Bassirou Sarr, a partagé les progrès réalisés par le Sénégal dans ce domaine au cours de l’année écoulée, notamment la sortie du Sénégal de la liste grise du Gafi actée en octobre 2024, ainsi que les activités opérationnelles conduites par la Cellule nationale de traitement des informations financières (Centif) en collaboration avec les autres acteurs de la chaîne pénale.
Par rapport à ce dernier point, il soutient que les résultats présentés par la Centif dans son rapport d’activités 2024 illustrent les avancées significatives du pays dans la lutte contre le blanchiment de capitaux. Ce rapport, annoncé, n’est pas encore publié.
En matière de vigilance, renseigne Bassirou Sarr, 928 déclarations d’opérations suspectes (Dos) faites par les assujettis, dont 83 % émanent des banques et établissements financiers, ont été enregistrées ainsi que 42,7 millions de déclarations de transactions en espèces (DTE), dépassant le seuil réglementaire de quinze millions de francs CFA. Ces chiffres, en croissance significative, attestent d’une ‘’culture de conformité de plus en plus enracinée’’, d'après le DC du ministère.
Sur le plan de l’analyse, 2 172 demandes d’informations nationales (DIN) ont été adressées aux acteurs clés (administrations, autorités de supervision, etc.) ainsi que 45 demandes d’informations étrangères (DIE) formulées à l’endroit des cellules de renseignement financier des autres pays. Ces actes illustrent les capacités de la Centif à rechercher et analyser des données afin de produire du renseignement financier de qualité.
… 46 rapports transmis au procureur de la République
En matière judiciaire, 46 rapports ont été transmis au procureur de la République, d’après Bassirou Sarr. ‘’Le Pool judiciaire financier, récemment mis en place, s’est attelé, avec rigueur et diligence, à la judiciarisation des renseignements reçus, traduisant ainsi une claire volonté de renforcer la réponse pénale face aux infractions économiques et financières’’, a-t-il soutenu.
Enfin, il y a la mise en œuvre effective des mesures de saisie et de confiscation par l’Office national de recouvrement des avoirs criminels (Onrac), notamment les ventes aux enchères publiques. Cela, selon M. Sarr, est une manière d'envoyer un message clair : ’’Le crime ne paie pas.’’ Cela renforce aussi la dimension dissuasive du dispositif.
Interpellé sur l’actualité avec l'interpellation de personnalités grâce à un rapport de la Centif, il note que ce travail a toujours été fait depuis la création de la Centif en 2004. ‘’Depuis 20 ans, il n'y a rien de nouveau à ce niveau-là. Ce qu'il y a de nouveau, c'est l'environnement politique qui fait en sorte que les rapports soient traités de façon idoine par les récepteurs, notamment le procureur de la République. Donc, s'il y a quelque chose de nouveau, c'est vraiment à ce point-là’’.
Par ailleurs, Bassirou Sarr souligne que cette performance globale est le résultat de la mutualisation des efforts et de la synergie renforcée entre les acteurs publics et privés. Ceci dans un contexte profondément marqué par une intensification des efforts liés au plan de sortie de la liste grise du Gafi entre février 2021 et octobre 2024.
Fort de ces acquis, le Sénégal entend néanmoins poursuivre le renforcement de son dispositif sur la base d’une feuille de route rigoureuse alignée à la Vision 2050, selon lui.
Dans cette perspective, la démarche devra reposer sur trois leviers essentiels. La première porte sur le renforcement du cadre légal et institutionnel (priorité). ‘’Le pays s’emploiera à finaliser les textes d’application résiduels, indispensables au bon fonctionnement du dispositif national. Parallèlement, des réformes seront engagées sur l’organisation et le fonctionnement de certaines entités’’, a indiqué Bassirou Sarr.
En deuxième lieu, il y a la mise à jour de l’évaluation nationale des risques (ENR) : les conclusions et recommandations issues des travaux lancés le 25 mars 2025 avec l’appui du projet Sefcin orienteront la formulation de la réponse nationale.
Enfin, l’élaboration de la stratégie nationale 2025-2029 : la feuille de route du pays sera déclinée à l’aune des ambitions et moyens. Le début des travaux est prévu en août 2025. ‘’Cette triple dynamique, la finalisation des textes d’application, l’actualisation de l’ENR et l’élaboration de la stratégie nationale 2025-2029, incarne la volonté du Sénégal de s’ériger en modèle de gouvernance efficace et proactive dans la lutte contre la criminalité financière. Dès lors, il convient de porter un regard sur les enjeux de la troisième évaluation mutuelle de notre dispositif prévue en février 2026’’, a dit M. Sarr.
Il note que le Sénégal sera, à cette occasion, le deuxième pays de la CEDEAO, après le Ghana, à se soumettre à cet exercice.
‘’Plus qu’une simple formalité technique, nous voyons dans cet exercice l’opportunité stratégique de diagnostiquer en profondeur notre dispositif afin d’en renforcer les fondements. C’est dans cet esprit d’ouverture et de collaboration que nous aborderons ce rendez-vous avec la détermination de mettre en œuvre l’ensemble des prérequis pour en assurer le plein succès’’, a souligné le directeur de cabinet.
Dans ce contexte marqué par la ‘’sophistication croissante et la professionnalisation accrue de la criminalité financière’’, les cadres de coopération, de coordination et de concertation ne sauraient être considérés comme optionnels, d'après Bassirou Sarr. ‘’Ils constituent désormais le socle indispensable de la riposte mondiale, laquelle repose sur la robustesse d’un réseau institutionnel capable de faire face à la structuration des réseaux criminels’’, a-t-il estimé.
À ce titre, il est rassurant de constater, à l’échelle régionale, la synergie remarquable entre les initiatives portées par le Réseau des Centif de l’UEMOA, le Forum des cellules de renseignement financier de la CEDEAO et le rôle pivot du Giaba qui agit à la fois comme organe spécialisé de la CEDEAO et organisme régional de type Gafi. ‘’Cette 43e plénière du Giaba, par la qualité de ses participants et la pertinence de ses thématiques, constitue à n’en pas douter une étape importante dans notre combat commun pour des économies transparentes, sécurisées et résilientes face à la criminalité financière. Je formule le vœu qu’elle serve de tremplin vers une mobilisation africaine plus unifiée, mieux structurée et plus influente dans la lutte mondiale contre la criminalité financière’’, a déclaré Bassirou Sarr.
BABACAR SY SEYE