Ces difficultés du Sénégal pour lutter contre le cancer de l’enfant
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La lutte contre le cancer de l’enfant est confrontée à diverses difficultés, notamment les infrastructures, les ressources humaines et le manque d'autonomie de l'unité.
La Journée mondiale de lutte contre le cancer de l’enfant a été célébrée avant-hier à l’hôpital Dalal Jamm de Guédiawaye. À l’occasion, la docteure Mame Ndella Diouf a confié qu’au Sénégal, ils ne sont que quatre oncopédiatres. Or, les dernières estimations font état d’un enfant sur 500 atteint de cancer avant l'âge de 15 ans, représentant 1 à 2 % de tous les cancers.
‘’Dans le monde, il y a 400 000 nouveaux cas, chaque année, chez les enfants de 0 à 19 ans. En Afrique, près de 15 000 nouveaux cas sont enregistrés par an et au Sénégal, 800 nouveaux cas sont signalés chaque année. Malheureusement, seulement 25 % bénéficient d'un traitement’’, informe-t-elle.
À l’hôpital Dalal Jamm, ajoute-t-elle, il y a une salle avec 12 fauteuils de chimiothérapie, un box pour les soins et un bureau de consultation. ‘’Il y a 411 enfants enregistrés entre, 2017 et 2019, dont 32 % viennent de Dakar, selon une étude. Il n'y a qu'une seule unité de prise en charge des cancers de l'enfant au Sénégal, pour près de 200 nouveaux malades par an’’, se désole la Dre Diouf.
Concernant toujours les difficultés, la docteure Mame Ndella Diouf évoque le manque d'autonomie de l'unité, le manque de ressources humaines, le défaut de formation initiale et de formation continue, l'absence de concertation pluridisciplinaire, le manque de motivation pour maintenir le personnel et le soutien psychologique qui fait défaut. Elle mentionne également l’exigüité des locaux, l’absence d'équipement adéquat de protection, comme des hottes à flux laminaire ainsi que des problèmes liés à la préparation de la chimiothérapie. Il y a aussi l'absence d'une unité de soins palliatifs, l'absence d'une réelle décentralisation et l'absence d'une maison d'accueil pour les parents, bien qu'une maison soit en construction.
L’oncopédiatre regrette aussi le manque d'équipements modernes et de moyens techniques pour des diagnostics plus précis, des ruptures de réactifs, des délais de rendus des résultats souvent longs, le non-respect des délais de traitement et l'indisponibilité fréquente de certains médicaments. Les problèmes d'accessibilité financière pour certains patients sont également préoccupants, à ses yeux.
‘’Le cancer de l'enfant se guérit dans les pays industrialisés à hauteur de 95 %’’
Après avoir posé ce diagnostic, la Dre Diouf demande l’organisation des soins, une fourniture en médicaments de qualité, le renforcement des ressources humaines, de la formation et de la motivation du personnel. Elle annonce la construction de la maison des parents à Sangalkam, qui devrait être livrée d'ici la fin de l'année.
Elle plaide également pour une subvention totale de la prise en charge et l'organisation des soins palliatifs et une implication accrue des pharmaciens, afin de mettre à disposition non seulement ces médicaments, mais également la morphine.
‘’Il n'y a pas de prévention, donc l'arme dont nous disposons pour guérir ces enfants, car oui, le cancer de l'enfant se guérit dans les pays industrialisés à hauteur de 95 %, c'est le diagnostic précoce qui est essentiel, c'est-à-dire que les enfants arrivent très tôt à l'hôpital pour être pris en charge de manière adéquate. Il faut éduquer les populations, les informer afin qu'elles puissent amener les enfants rapidement et qu'une fois sur place, ils trouvent du personnel de qualité, formé et apte à dispenser des soins de qualité pour obtenir de bons taux de survie. Il est crucial de prévoir la subvention de la prise en charge de l'enfant dès le début, car nous avons une population très jeune’’, constate l’oncopédiatre.
Elle ajoute, pour alerter : ‘’Au Sénégal, 50 % de la population a moins de 19 ans et le cancer représente 1 % de tous les cancers. Ce n'est pas une mince affaire, certes, mais c'est quelque chose que le gouvernement peut prendre à bras le corps pour subventionner totalement la prise en charge de ces enfants. Nous avons besoin de chimiothérapie, de chirurgie, mais également de radiothérapie. Il nous faut un centre équipé de tout cela, afin que ces enfants soient soignés gratuitement.’’
CHEIKH THIAM