Publié le 13 Apr 2012 - 07:59
COMMENTAIRE

Faute Gouvernementale

 

Les nouvelles autorités ont tôt fait de clamer que les ''caisses de l'État'' sont vides, au sortir, hier, de la première réunion du Conseil des ministres sous l'ère du président Macky Sall. Le propos est du ministre chargé du Budget, Abdoulaye Daouda Diallo, pourtant un inspecteur des impôts certainement averti. Son collègue de...l'Intérieur a cru bon d'en rajouter une couche. ''Des éclairages du président de la République, du Premier ministre, du ministre de l’Economie et des Finances et des autres [ministres], nous [apprenons] que le Sénégal est dans une situation extrêmement grave'', a affirmé Mbaye Ndiaye, rapporte l'APS. Se sont-elles passé le mot et à quelle fin ?

 

Si elles comptent ainsi ameuter la communauté des bailleurs de fonds bilatéraux et multilatéraux, c'est enfoncer des portes ouvertes. Il est entendu que ces partenaires techniques et financiers ont fermé les vannes au régime de Wade qui s'était obstiné à mener le Sénégal en eaux très troubles ; officiellement, il n'y a eu depuis décembre dernier aucun accord de financement soit sous la forme de prêt, soit sous forme de subvention ou d'appui budgétaire. Cette suspension fait suite d'ailleurs à une mission du Fonds monétaire international (FMI), en octobre 2011 suivi de rapport et communiqué sur le Sénégal publiés en décembre dernier, au terme desquels il n'y a eu aucun nouveau décaissement approuvé en faveur du pays, comme l'avait relevé EnQuête en son temps. ''Le Conseil d’administration du Fonds monétaire international (FMI) a achevé la seconde revue du programme triennal au titre de l’Instrument de soutien à la politique économique (ISPE) en faveur du Sénégal. La décision du Conseil a été prise selon la procédure du défaut d’opposition'', notait avec diplomatie l'institution financière mondiale dans un communiqué daté du 19 décembre dernier. La même source ajoutait que ''conformément au nouveau Document de politique économique et sociale des autorités pour 2011-15, le programme économique de 2012 appuyé par l’ISPE ciblera les goulets d'étranglement critiques en matière d'énergie et d'infrastructures qui entravent la croissance et la réduction de la pauvreté''. C'était en attendant de connaître l'issue de la présidentielle qui a consacré le départ de Wade. Et avec l'espoir d'une nouvelle gouvernance vertueuse promise sur fond d'une démocratie revitalisée, nul doute que le FMI ne tardera pas à donner le feu vert en faveur du Sénégal chouchou, malgré tout et en dépit du gâchis wadien, de l'aide internationale.

 

Qu'y a-t-il alors de si glorieux à pousser en chœur et si fort des cris d'orfraie au risque d'apeurer et détourner les investisseurs et prêteurs privés potentiels du Sénégal qui en a tant besoin après avoir été saboté par le clan Wade ? N'est-ce pas Macky Sall, alors challenger au second tour du président sortant, qui rétorquait à un Wade catastrophiste que ''le président de la République ne détient pas le Budget de l’Etat et ne paie pas les salaires'' ? N'est-ce pas l'actuel locataire du Palais qui promettait de faire venir au Sénégal de nombreux investisseurs étrangers ?

 

Eh bien ! Ce n'est pas bien engagé avec ces sorties hasardeuses et indignes de ministre de la République, qui plus est chargé du Budget. L'anxiété face à l'ampleur et à l'âpreté de la tâche, une volonté de se dédouaner a priori de lenteurs dans la tenue des promesses faites aux Sénégalais, un justificatif à une prochaine traque des sommes faramineuses soustraites au Trésor public par les décisionnaires du régime libéral déchu, et même l'amateurisme propre au ''bleu'' du pouvoir, ne sauraient excuser cette première faute gouvernementale.

 

M. L. BADJI

 

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