Les chiffres de trop !
À l'occasion d'une demi-journée d'échanges et de concertations organisée par le Conseil national du patronat, son vice-président a déclaré que, pour l'année 2022, sur les 3 629 conflits individuels en milieu professionnel recensés par les inspections du travail, 724 ont été transmis au tribunal du travail, contre 655 en 2021, soit une hausse de 10,36 % en une année.
Le Conseil national du patronat du Sénégal(CNP) a organisé, hier, une demi-journée d'échanges et de concertations sur le thème "Gestion du contentieux social en milieu professionnel". Le ministre du Travail, la présidente du Haut conseil du dialogue social, le secrétaire général adjoint de la CNTS et des chefs d'entreprise y ont pris part.
Lors des échanges, le vice-président du CNP a fait savoir que sa structure a organisé cette rencontre pour apprécier la gestion du contentieux social dans nos entreprises et qui, précise-t-il, interpelle aussi bien le chef d'entreprise, le directeur des ressources humaines, les délégués du personnel ainsi que l'administration du travail.
Une bonne gestion desdits contentieux sociaux, rappelle-t-il, devra permettre à toute entreprise d'atteindre ses objectifs de croissance ou de restructuration par une meilleure compréhension et analyse des relations interprofessionnelles.
"Le CNP vous parle aujourd'hui de cette nécessité de réfléchir, tous ensemble, sur comment faire face aux contentieux sociaux qui peuvent entraver le bon fonctionnement de nos entreprises, comment comprendre les enjeux et les formes desdits conflits, quelles sont les stratégies et les techniques de négociation à mettre en œuvre pour les réduire au strict minimum", a renseigné le vice-président du CNP.
En définitive, ajoute-t-il, il leur faut identifier et partager les bonnes pratiques pour corriger les éventuelles lacunes. "Nous avons noté qu'un effort considérable a été accompli pour réduire les contentieux sociaux, mais également pour adapter les modes de règlement à l'évolution de notre environnement des affaires", reconnaît Meïssa Fall.
Cependant, déplore le vice-président du CNP, les dernières statistiques officielles produites par les services de la Direction générale du Travail et de la Sécurité sociale "nous informent que, pour l'année 2022, sur les 3 629 conflits individuels en milieu professionnel recensés par les inspections du travail, 724 ont été transmis au tribunal du travail contre 655 en 2021, soit une hausse de 10,36 % en une année. Nous disons que c'est trop. Il nous faut apaiser le climat social au sein de l'entreprise". En effet, explique-t-il, les principaux motifs sont l'absence de l'employeur lors des séances de conciliation, le désaccord sur les indemnités, la contestation des chefs de réclamation par les travailleurs, la contestation liée à la situation juridique du travailleur, la contestation des chefs de réclamation par l'employeur et le refus de l'employeur de lever la sanction.
Concernant les conflits collectifs, informe le vice-président du CNP, 69 ont été répertoriés en 2022, contre 85 en 2021, 42 en 2020 et 29 en 2019. " Bien que nous constations une tendance à la baisse en 2022, après les importantes hausses de ces trois dernières années, le nombre de conflits collectifs est encore élevé. Il nous faut le réduire. Ici, les conflits ont pour principales causes : les salaires et accessoires de salaires ; le dialogue social ; l'applicabilité des conventions collectives ; le licenciement pour motif économique, etc.", soutient-il.
Selon le vice-président du CNP, toute augmentation du nombre des contentieux sociaux pourrait, si l'on n'y prend pas garde, désorganiser à ses différents niveaux, le fonctionnement correct des entreprises. C'est pourquoi, dit-il, le CNP a toujours prôné cette approche partenariale employeurs-travailleurs pour la résolution des conflits sociaux en milieu professionnel, et cet effort devra être poursuivi aussi longtemps qu'il sera nécessaire avec l'appui de l'Administration du travail, du Haut conseil du dialogue social et des partenaires sociaux. Par la même occasion, Meïssa Fall a déclaré qu'ils leur arrivent d'avoir des nuits blanches, rien que pour préserver la stabilité sociale de l'outil de travail qu'est l'entreprise.
Réformer les textes
Le vice-président du CNP a également indiqué que la gestion des contentieux sociaux en milieu professionnel est aussi cette réponse à la mondialisation. "Oui, une réponse à cette réalité économique du monde qui exige toujours plus d'efficience, plus de productivité, plus de flexibilité, plus de réactivité et plus d'innovation à toute entreprise pour exister ses travailleurs, pour préserver leurs emplois", dit-il.
Dans la même veine, Meïssa Fall a plaidé pour la réactualisation des différentes sections du tribunal du travail dépassées avec la nouvelle classification des métiers et l'évolution technologique qui, selon lui, nécessite une concertation entre travailleurs-employeurs-juges du tribunal du travail. Il a également demandé la révision du Code du travail. "Nous avons demandé l'encadrement des pouvoirs du juge dans la détermination des dommages et intérêts, notamment à travers un plafonnement des indemnités de licenciements dits abusifs au regard de ce qui se fait actuellement dans le monde (Côte d'Ivoire, Mali, Burkina Faso, Maroc, etc.), des risques de mise en péril de l'entreprise et de ses investissements", demande-t-il.
Présidant la rencontre, le ministre du Travail, Samba Sy, a reconnu qu'il est normal que les travailleurs demandent une meilleure condition de vie, ainsi que les employeurs. Mais, précise-t-il, les uns et les autres doivent mesurer l'étendue des défis et savoir qu'on ne peut pas tout obtenir en même temps. Dans le même ordre d'idées, le ministre a indiqué que "ce forum d’échanges est un baromètre objectif et pertinent".
Samba Sy a annoncé la réforme des textes datant des indépendances, devenus aujourd’hui obsolètes. Selon lui, le gouvernement s’est déjà engagé dans un vaste chantier de réforme de nos textes de base. "Le gouvernement s’est engagé avec les partenaires sociaux dans un vaste chantier de réforme de nos textes de base. Il faut réformer les textes. Ils sont comme les vêtements. Ceux qu’on a portés quand on avait 10 ans, on ne peut pas les porter quand on a 20 ans. Certains textes datent de 1960 et maintenant, le monde a beaucoup changé. Il nous faut donc réformer nos textes de base et nous y sommes tels que le Code du travail et le Code de sécurité. L’engagement du gouvernement, c’est de donner fidèle à cette veine dont nous voyons tous le profit qu’elle nous apporte’’, a-t-il informé.
FATIMA ZAHRA DIALLO (STAGIAIRE)