Une ardoise fiscale de plus de 16 milliards de francs
Le Rapport de la Cour des comptes sur le Centre des œuvres universitaires de Dakar (COUD) est un festival de magouilles autour de l'attribution des marchés, de la gestion du carburant, des marges bénéficiaires des privés gérants des restaurants, des recrutements abusifs de parents, alliés et autres camarades de parti ou de terroir. L'enquête cible également les étudiants, «véritables maîtres des lieux», «destructeurs de matériels», «organisateurs de journées sans tickets» et pourtant «financés par le Coud à coup de subventions fantaisistes».
Selon la Cour des comptes, la gestion du COUD de la période 2006 à 2010 est caractérisée par une violation permanente de la législation fiscale. Ainsi, le rapport indique que ''la taxe sur la valeur ajoutée précomptée à certains fournisseurs, les retenues opérées sur les salaires au titre de l’Impôt sur le revenu et sur les sommes versées aux prestataires de service n’ont pas été reversées à l’Administration fiscale''. De ce fait, de 2006 à 2010, le COUD a accumulé une ardoise fiscale de 16 609 518 242 F Cfa soit 3 580 728 340 F Cfa en 2006 ; 3 113 233 063 F Cfa en 2007 ; 2 568 875 696 F Cfa en 2008 ; 3 365 370 763 F Cfa en 2009 et 3 981 310 380 F Cfa en 2010.
À cela s'ajoutent d'autres manquements, notamment le défaut de déclaration de la taxe sur la valeur ajoutée précomptée. En outre, le rapport renseigne que la revue des pièces comptables a permis de déceler des transactions avec des fournisseurs ne disposant pas de NINEA. Parmi ceux-ci, on peut citer le GIE Sahel service, Meissa Waly Mbissel DIONE, GIE Sant ak Mougne, Habitat Matériaux, GIE Set Setal, GIE Mame Diarra BOUSSO, Ramses, GTS etc. ''Les violations répétées et généralisées au Code général des Impôts'' ont conduit la cour des Comptes à instruire le COUD d’effectuer, sans délai, le reversement de l’intégralité des sommes collectées pour le compte de l’administration fiscale.
Dépassements budgétaires
La Cour des comptes a également décelé différents manquements et dysfonctionnements dans la gestion budgétaire. ''L’Agence comptable et le Service du Budget enregistrent, chacun de son côté, des montants qui, à l’analyse et au rapprochement, sont invraisemblables''. Par exemple dans la rubrique Charges de personnel, le service du budget affiche un montant de 20 747 399 495 F Cfa, pour la période 2006-2010, alors que l'agence comptable révèle un total de 21 131 496 222 F Cfa. Il en est ainsi pour les rubriques Achats, Transport, Services extérieurs et Autres charges.
Le rapport dénonce également des dépassements budgétaires ''qui ne se justifient pas''. Toujours, dans la rubrique Charges de personnel, des prévisions de l'ordre de 11 883 198 746 F Cfa avaient été faites dans la période sous revue. Toutefois, renseigne l'organe de contrôle, 15 262 485 854 F Cfa ont été dépensés, soit un écart de 3 379 287 108 F Cfa. Ici, le rapport parle de ''recrutements abusifs''. Dans la même rubrique des dépassements budgétaires, il faut ajouter 422 616 626 F Cfa pour les Charges extérieures A&B, 150 878 998 F Cfa pour les Achats et 51 942 681 F Cfa pour les Investissements.
De ce fait, le rapport conclut que ''la revue des états financiers et comptables a révélé que la comptabilité du COUD n’est pas conforme aux règles et directives en vigueur. Elle ne reflète pas exactement la situation réelle et ne traduit pas l’image fidèle du Centre''. Le rapport révèle que les comptes «311 marchandises», « 33 matières premières et autres approvisionnements» et «411clients» ont présenté les mêmes soldes en 2006 et 2007. ''Ce qui, indique la Cour des comptes, remet en cause la fiabilité et la sincérité des états financiers du COUD''.
113 680 500 F Cfa aux délégués et aux amicales des étudiants
Le COUD s'est également illustré sur la période sous revue par l'octroi de subventions à son personnel, à certaines structures, aux amicales des étudiants et à des particuliers. ''Ces subventions, renseigne la cour des Comptes, sont payées sans base juridique et sans aucune pièce justificative à l’appui''. De ce fait, le COUD a octroyé des subventions aux délégués et aux amicales des étudiants de l’ensemble des facultés, des écoles et instituts de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, de l'ordre de 113 680 500 F Cfa de 2006 à 2011. Toutefois, les largesses du COUD ne s'arrêtent pas là, puisque le rapport de la Cour indexe des subventions ''de plus de soixante millions sept cent cinquante mille (60 750 000) F Cfa faites par le COUD à des particuliers et à certains agents''.
640 litres de carburant par mois pour le DG
La Cour des comptes s'est également intéressée à la gestion du carburant du COUD qui était assurée par le Service des Approvisionnements jusqu’en août 2011, en lieu et place du Service de la Comptabilité des matières. Ainsi, des irrégularités ont été notées. En effet, selon le rapport, aucun véhicule du COUD ne dispose de carnet de bord permettant d’indiquer les informations utiles pour déterminer le kilométrage journalier, le lieu et la date des consommations. ''Ce qui fait que les dotations en carburant des véhicules du COUD sont effectuées sans respect des formalités réglementaires, à savoir la présentation du carnet de bord pour le service normal''.
En plus, la cour des Comptes dénonce ''les dotations excessives et irrégulières'' faites à certains cadres. Notamment, le directeur du COUD qui jouit d'une dotation mensuelle de 640 litres. Alors que le Chef des services administratifs et l’Agent comptable sont dotés chacun de 320 litres par mois. ''Pour les véhicules de services, la dotation ne peut, en aucun cas, excéder 200 litres par mois'', stipule l’instruction n°19PM /SGG/BDC du 05 novembre 2008.
Dans la même période, cent (100) litres de carburant ont été donnés à chaque chef de service, au Fondé de pouvoir, à chaque conseiller technique et quatre-vingts (80) litres à chaque médecin et chargé de mission. Également, le COUD a accordé sous la forme d’appuis en carburant au total 54 692 litres d'essence ou de gasoil. Ces appuis ont été accordés irrégulièrement à des agents, à des structures ou à des particuliers. Notamment, à des agents de la Présidence de la République, des Dahiras, le Mouvement des Elèves et Etudiants libéraux (MEEL), l’Union des Jeunesses travaillistes libérales de Mbacké, des agents du Rectorat etc.
MOMAR DIENG & GASTON COLY
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