Les génies en informatique Habib Diaw et Ismaël Gnimaga risquent sept ans d’emprisonnement pour avoir balancé sur la toile les ébats d’un couple aujourd’hui divorcé. Leur co-prévenu encourt cinq ans de prison.

Le regard fixé sur le sol, Habib Diaw et Ismaël Gnimiga, respectivement âgés de 22 et 24 ans, ressemblaient hier à deux enfants sages, assis à la première rangée faisant face à la barre. À aucun moment de leur comparution, les deux informaticiens, poursuivis pour association de malfaiteurs, divulgation d’images à caractère obscène et extorsion de fonds, n’ont laissé transparaître l'indiscipline dont ils se prévalent. ‘’Maa tey reew’’, ou plutôt ‘’Il me plaît d'être impoli’’, c’est le nom de leur compte sur le réseau social ‘’Facebook’’. Sous ce pseudo, ils ont fait vivre un véritable calvaire aux ex-conjoints, Mamadou Ben Mouhamed Diobaye et Ndèye Bobo Fall. Pendant qu’ils étaient mariés, les ex-conjoints filmaient leurs ébats. Alors qu'ils se sont séparés, ils ont eu la désagréable surprise de retrouver des images de leurs ébats sur la toile.

Au mois d’octobre dernier, M. Diobaye se rendant à l’aéroport, oublia son ordinateur portable dans le taxi qui l’y amenait. ‘’Après avoir gardé l’ordinateur pendant cinq mois sans retrouver son propriétaire, je l’ai amené chez un informaticien pour vérifier les données’’, a confié El Hadj Mody Dièye. Pourtant le taximan, poursuivi pour association de malfaiteurs et vol, soutenait à l’enquête qu’il voulait vendre l’ordinateur.

2 millions F Cfa contre les images

Toujours est-il que lorsque Habib Diaw est entré dans le système de l’ordinateur, son collègue Ismaël étant lettré, a vite réalisé que la machine n’appartenait pas au taximan. Ils ont constaté que M. Diomaye ne s’était pas déconnecté de ses comptes ‘’Gmail’’ et ‘’Facebook’’. Poussés par la curiosité, ils ont consulté les fichiers et sont tombés sur les photos et vidéos ‘’très intimes’’ du couple. A la vue des photos, raconte Ismaël Gnimiga, ‘’j’ai contacté M. Diobaye en lui disant que nous détenions son ordinateur avec des photos compromettantes’’. Sceptique, M. Diobaye a demandé des preuves à son correspondant. Il en obtint, ainsi que son ex-épouse et la sœur de celle-ci.

Car les deux informaticiens ont publié sur leur compte facebook, une photo de la dame suçant le s… de son ex-mari et une autre où elle est en nuisette. Presque tous les amis du couple ont été associés au compte. De peur de voir d'autres images de leurs ébats dévoilées sur la toile, le couple a cédé au chantage des deux informaticiens en versant la somme de 200 000 francs Cfa. Seulement après avoir versé les 100 000 francs, la dame Ndèye Bolo Fall a joué la carte de la négociation, en faisant comprendre à Ismaël que les photos ont été prises à son insu par son ex-mari. Finalement, le jeune information a accepté de lui restituer l’ordinateur, en le jetant dans une poubelle.

Alors que les deux ''génies'' croyaient être tirés d’affaire, ils ont été arrêtés par la section de recherches de la gendarmerie, au moment où Ismaël tentait de retirer de l’argent dans un point de transfert d’argent. Cet argent, ont-ils tenté d’expliquer à la barre, ne provient pas d’une extorsion. Selon les explications de Habib Diaw, ‘’lorsqu’ils ont envoyé à Diomaye ses photos ‘’obscènes’’, celui-ci s’est montré disposé à acheter son propre ordinateur à 350 000 francs. Corroborant les propos de son co-prévenu, Ismaël a reconnu avoir encaissé les 200 000 francs. Niant avoir réclamé 2 millions aux parties civiles, ils ont exprimé leurs regrets.

150 millions de dommages et intérêts réclamés

Pour le conseil des parties civiles, le mal est déjà fait. Me Marième Datt a réclamé la somme de 150 millions de francs Cfa. Car elle estime que les prévenus n’ont eu ‘’aucune pudeur’’, en publiant les photos de ses clients. Mes Moustapha Diop et Boubacar Dramé pensent que leur consœur stagiaire est mal placée pour parler de morale et de valeur. ‘’Même si elles étaient mariées, les parties civiles ont franchi les limites de la liberté. S’il n’y avait pas ces photos, nos clients ne seraient là’’, ont-ils rétorqué à leur jeune consœur. Ils ont même avancé l'hypothèse que l’ex-mari vende les images, du fait qu’il avait assuré à son ex-épouse avoir tout détruit. Aussi Mes Abdou Dialy Kane et Fodé Ndiaye ont-ils plaidé la clémence, face aux sept ans requis contre les deux informaticiens. Me Dramé a aussi estimé que le taximan ne mérite pas cinq années de prison, parce qu’il ignorait même l’existence des images. Le trio sera édifié sur son sort demain 3 mai.

FATOU SY

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