«Où est passé l'argent collecté pour les inondations l'année dernière ?»
De la sortie de son prochain album à la chute de sa notoriété, le chanteur ambianceur Salam Diallo s'ouvre à EnQuête dans cet entretien. Très engagé dans l'humanitaire, l'artiste s'était beaucoup investi l'année dernière pour aider les sinistrés de la banlieue dakaroise. Un an après, il s'étonne que le problème persiste et même s'aggrave. Il évoque ses incompréhension ici.
Cela fait un bon moment que l'on ne vous entend pas ?
Je suis là. J'honore mes contrats. On sort juste du mois de ramadan. Je n'étais pas là pendant la Korité. Je suis allé jouer en Écosse. Là, je suis de retour et j'ai repris mes activités dans les différents clubs où je jouais. J'ai également des contrats dans certaines régions que je dois honorer les jours à venir. Je travaille également sur mon prochain cd. A cet effet, j'ai sorti un clip qui tourne actuellement sur les chaînes de télévision.
Il y a une communauté sénégalaise assez forte en Écosse pour que vous y soyez invité ?
J'ai eu un contrat et je suis allé jouer et rentrer. J'ai joué en play-back. La majeure partie du public présent sont des Gambiens. Il y avait des Sénégalais mais ils n'étaient pas si nombreux que cela. Je crois que je suis l'un des premiers artistes sénégalais après Youssou Ndour et Daara J à aller prester en Écosse. J'y ai passé trois jours.
Des singles, vous en avez beaucoup sortis. On annonce un album qui tarde. Quand sera-t-il sur le marché ?
Vous savez, le fait de sortir les chansons de l'album une à une est un choix bien calculé. On l'a fait pour que l'album se vende bien et soit bien connu à sa sortie. Les cd ne se vendent plus bien. Pour vendre, il faut des stratégies. Donc, considérez ce choix comme une stratégie de vente. On a voulu sortir le cd depuis longtemps. Mais, la musique évolue et de nouvelles choses sortent également. Cette fois-ci, on est décidé et on tient à le sortir au mois de novembre. Sa mise sur le marché sera suivie d'un grand spectacle dont le choix du lieu n'est pas encore arrêté. Nous sommes en train de voir entre le Grand-Théâtre et Sorano.
Parlez-nous un peu plus de cette soirée.
Elle va marquer la sortie de l'album. En plus, j'avais promis depuis longtemps aux journalistes de leur dédier une soirée. Ça sera l'occasion de tenir parole. Je veux vraiment faire cela en l'honneur de mes amis journalistes.
Quelle nouveauté dans l'album ?
Cette production sera très différente de mes précédentes. On me connaît comme ambianceur. Dans cet album, je viens avec des thèmes pour chaque chanson. Il y aura donc de l'ambiance et des messages à passer. Je vais beaucoup parler de solidarité dans cet album. Car la vie est difficile au Sénégal. Je fais dans l'humanitaire même si je ne suis pas riche. Je veux qu'on aide les sinistrés, les malades, etc. L'année dernière par exemple, je me suis beaucoup investi dans la lutte contre les inondations. Et cette année, les choses se sont empirées pour les sinistrés. Le problème n'est toujours pas résolu. Avec toute la mobilisation, il reste énormément de choses à faire. On a besoin de savoir ce qu'est devenu l'argent collecté et versé. Qu'on nous dise qu'est ce qu'il en est. Qu'a-t-on fait des sous collectés ? Il faut qu'on nous mette au courant...
Quelle attitude adopter alors face à cela ?
Pour moi, quand il y a un problème, il faut se lever et essayer tant soit peu d'aider. Maintenant, ce que l'on fait de l'argent est important. Ce qu'on en a fait vraiment, c'est maintenant entre Dieu et les autorités à qui l'argent a été remis.
Vous l'avez remis à qui cet argent destiné aux sinistrés ?
Je crois que c'est au ministre de l'Intérieur (NDLR : Mbaye Ndiaye à l'époque). Certains expliquent comment l'argent a été utilisé. Mais moi je parle en tant que Salam Diallo. Tout le monde a vu comment je me suis investi l'année dernière même si je ne suis ni millionnaire ni milliardaire. J'ai fait des quêtes et j'ai versé cet argent. Aujourd'hui nul ne sait où est allé cet argent...
Malgré tout, vous comptez remettre ça pour les sinistrés ?
Je ferais ce que je pourrais. Je répondrais à tous ceux qui m’appelleront pour donner un coup de main. On ne peut attendre et regarder les gens souffrir.
Qu'est-ce qui explique cette fibre humanitaire chez vous, notamment dans vos relations avec les prisonniers ?
Je ne vais pas seulement dans les prisons. Je suis aussi dans les hôpitaux. C'est juste que quand je le fais, je ne communique pas dessus ou que je n'emmène pas des journalistes avec moi. La philosophie, c'est que je dois aider les gens qui sont dans le besoin car je suis Salam (NDLR : la paix en langue arabe) et je suis aussi talibé mouride. Ce que je fais est un devoir.
Vous avez perdu la notoriété acquise avec la danse Goana. Avez-vous le sentiment d'être vraiment en chute ?
Qu'appelez-vous chute ? Je joue toujours dans les mêmes boites. Il est normal qu'il n'y ait pas autant de monde que du temps de Goana. Quand une personne sort une chanson accompagnée d'une danse et qu'elle soit un tube, il est normal que ses soirées débordent de monde. Cela ne signifie pas que ce sera éternel. Je rends grâce à Dieu d'avoir connu ses moments et d'avoir même eu le micro d'or. Je n'ai pas autant chuté que çà ! Quand je joue, il y a encore du monde. Il ne faut pas aussi oublier que je ne suis pas un chanteur mais un animateur.
Votre prochain album vous ramènera-t-il à ce stade ?
Je ne sors pas un album pour tendre à un stade. Je fais mon travail pour être présent. Et je suis là. Tu peux dire que tu es là sans y être. Ndongo Lô n'est pas là mais il est là grâce à ses chansons. Je pars de ce postulat de base. On ne peut citer cinq artistes au Sénégal sans que je n'en fasse partie. Et Dieu sait qu'on est nombreux. Pourtant seuls peut-être cinq d'entre nous jouent régulièrement. Je me réjouis de faire partie de ce cercle restreint.
Vous pensez peut-être que c'est vous qui marchez le mieux ?
Par forcément mais je suis sûr qu'on fait partie de ceux qui marchent.
Jicoulou, la nouvelle danse dont vous faites la promotion, ça veut dire quoi ?
Je le garde pour le moment pour moi. Je ne le dirais pas avant la sortie de l'album.
Çà c'est en novembre vous pouvez quand même nous en parler en attendant
Non et non. Je ne le dirais que le jour de la conférence de presse. Sachez juste que c'est un sigle et que chaque lettre a sa signification.
La même danse est surnommée autrement par d'autres. Cela ne vous dérange pas ?
Pas du tout, au contraire cela me ravit. Vous m'avez déjà entendu dans des polémiques ? Jamais je ne ferais cela. Goana a été rebaptisé par d'autres. Ce n'est pas un problème.
Comment vous est venu la tonalité de cette danse ?
Je fus danseur et percussionniste. Je n'ai pas ces problèmes là. Tout peut faire parler ma muse.
Quels sont vos projets ?
Là je fais de l'acoustique. Vraiment cela me tient à cœur. Dès que je termine mon album live, je veux me concentrer sur çà. Je veux mettre ce style en exergue. Je commence déjà à produire dans les bars restaurants.
Les mbalaxmen se tournent de plus en plus vers les musiques à la couleur acoustique. Cela signifierait-il que le mbalax ne marche plus ?
Plus rien ne marche dans ce pays. Au Sénégal rien ne marche. Idem en Afrique et partout dans le monde. Cela ne signifie pas pour autant dire que c'est à cause de cela que je m'oriente vers l'acoustique. Un artiste doit être curieux et ouvert. L'acoustique pour moi, c'est de la musique traditionnelle.
Comment arrivez-vous à poser votre voix sur cette musique ?
Je ne chante pas, je ne crie pas. Je fais du slam si on peut dire, une sorte de déclamation. On baisse la cadence et le rythme, et je fais de la poésie.
La mode chez les artistes maintenant ce sont les soirées anniversaire. A quand la votre ?
J'ai deux fois organisé des soirées anniversaire. Je n'aime pas copier ou mimer. Ce n'est pas parce que tout le monde organise des soirées d'anniversaire que je vais le faire. Il faut être prêt et en mesure de le faire. Et puis chez moi chaque jour est un jour d'anniversaire.