Quand la végétation fait des heureux
La Forêt classée de Mbao (FCM) est une bonne illustration de la gestion participative. Une mission de suivi du Plan d’aménagement de cet espace, dirigée par le directeur des Eaux et Forêts, hier, a permis de constater que l’espace se porte plutôt bien. L’économie locale aussi.
La seule forêt périurbaine de Dakar. Ce ‘poumon vert’ créé en 1908 et classé en mai 1940 ‘‘permet à la capitale de respirer’’, comme l’a souligné le directeur des Eaux et Forêts, le Colonel Baïdy Ba. Le but était d’internaliser les externalités négatives de l’autoroute à péage dans la forêt classée de Mbao. Densifier le couvert végétal par un reboisement compensatoire a été l’essentiel du travail des agents depuis quatre années. A la limite de l’emprise de l’autoroute à péage, les eucalyptus, plantés à sec, annoncent les promesses d’un long labeur. Ils ont colonisé en moins de trois ans les espaces vides de la forêt. Mais c’est surtout dans la combinaison entre missions économiques et environnementales que la FCM trouve toute sa pertinence. Les autorités ont su préserver la nature en intelligence avec les résidents des huit villages que polarise la forêt.
Les activités agro-forestières font florès. L’anacarde représente l’activité économique la plus consistante dans certaines parties de la forêt concédées aux usufruitiers, le plus souvent les riverains. ‘‘Ce ne sont pas des contrats de culture, mais une option du Plan d’aménagement incluant également le reboisement’’, fait savoir le colonel Moussa Fall. 35 hectares ont été emblavés en 2014 avec 200 pieds à l’hectare. ‘‘Après juste une année, on a récolté’’, poursuit-il. Avec un coût estimé, pour 1 ha d’anacarde, à 5 millions de F CFA, des perspectives encourageantes s’ouvrent aux exploitants puisque la surface totale à mettre en valeur est de 300 ha. Les huit villages regroupant les 82 quartiers qui sont polarisés par la forêt classée de Mbao se félicitent de l’entente.
Le président du comité fédéral de gestion de la FCM, Makhfouz Ndiaye, ‘‘trouve que cette manière d’inclure la population est salutaire puisqu’ils ont transformé d’anciens dépotoirs d’ordures ou d’espaces vierges en revenus économiques’’. L’apiculture est l’autre mamelle de l’activité agro-forestière appuyée par un maraîchage qui fait déjà éclore les choux-fleurs dont le sac est écoulé entre 7 et 8 mille F CFA sur le marché. ‘‘Avec sa raréfaction en période d’hivernage, on dépasse même la barre des 20 mille’’, selon Bangoura un des exploitants d’un espace d’à peine quelques pieds où les sacs remplis de cette plante à feuilles jonchent le sol arrosé. ‘‘On est seulement en début de récolte dans cette exploitation’’, poursuit-il.
Le cas est pratiquement similaire pour le miel dont le rucher de Kamb constitue un modèle achevé de la gestion participative. ‘‘Quinze ruches de modèle kényan assurent une production moyenne de 20 kilos de miel par ruche et par récolte’’, déclare le colonel Moussa Fall. Après une première année d’accompagnement, les exploitants du rucher des Niaouli vont devoir voler de leurs propres ailes avec la récolte de pleine saison prévue en avril prochain où ils peuvent s’en sortir, s’ils écoulent le produit à 3000 F CFA le litre. Pour couronner tous ces efforts, la miellerie en finition dans la pépinière sera l’un des projets prioritaires du plan d’aménagement. Seule tâche d’ombre à cette synergie des forces, le président du comité villageois se désole de l’implication timide de sa collectivité locale alors que l’Apix est omniprésente dans toutes les phases de projet. ‘‘Ce n’est pas bien de ne dépendre que d’un seul partenaire. S’il décide de se retirer, on n’aura pas d’autres options. Il faut que l’exécutif local prenne une part active dans les projets’’, suggère Makhfouz Ndiaye.
Comme Bandia ou Hann
Tout est parti de l’étude d’impact environnemental du passage de l’autoroute à péage à travers la forêt. Lancé en février 2011, le projet d’aménagement de la FCM, avec un budget de 5 milliards de F CFA et un horizon temporel de 12 ans, a quatre objectifs : conserver les fonctions écologiques de la forêt, protéger sa biodiversité, faire accéder les populations aux produits agro-sylvo-pastoraux ; et contribuer à la récréation. Pour ce dernier cas de figure, après la lutte contre l’ensablement, des projets pour l’implantation d’activités socio-récréatives sont également à l’œuvre. La forêt classée de Mbao se fixe les ambitions d’égaler ce qui se fait de mieux en matière de réserve animalière comme celle de Bandia ou au moins un parc comme celui de Hann. Aire de jeu, parcours sportifs, espace pique-nique..., bref tout ce qui participe de ce que le Directeur des Eaux et Forêts qualifie de services éco systémiques.
Mais Baïdy Ba annonce que l’une des priorités est de corriger certaines incohérences avec la mise en place d’un arboretum (Ndlr: jardin botanique spécialisé), ainsi que d’un herbier national. ‘‘Nous n’en disposons pas alors qu’on a une biodiversité assez riche dans l’arrière-pays. Ce qui va permettre aux Sénégalais de découvrir les espèces existant ici’’, déclare-t-il. Cependant, l’échéancier de ces projets n’est pas bien établi. Si le Directeur promet d’aller très vite pour les projets de type public, comme l’herbier national, les autres n’ont pas clairement été définis. Le parc animalier, par exemple, malgré un dimensionnement technique déjà établi, appelle nécessairement des partenariats de type public-privé.
400 nouveaux agents en renfort 400 agents des Eaux et Forêts constituent les nouveaux éléments de renforts qui devront assurer la préservation des sites environnementaux du Sénégal. Le gros de cette troupe sera déployé dans la région Sud, a fait savoir le directeur de ce service, le Colonel Baïdy Ba. ‘‘La Casamance va recevoir l’essentiel pour combattre le phénomène de la coupe illégale de bois, en relation avec les Forces Armées’’, a-t-il annoncé. Le chef des Eaux et Forêts souhaite également mettre en place une cavalerie forestière, à l’image de la Gendarmerie nationale, pour certaines missions. |
OUSMANE LAYE DIOP