Pour une meilleure prise en charge des familles de disparus

Au-delà des chiffres alarmants en matière de disparition en Afrique, le Comité international de la Croix-Rouge invite à mettre l’accent sur le calvaire des familles de disparus.
A l’occasion de la Journée internationale des disparus, célébrée hier, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) invite la communauté internationale à faire la lumière sur l'ampleur de ce drame humanitaire et la souffrance des familles des disparus. L’organisation et les sociétés nationales du Croissant-Rouge estiment à 48 000 le nombre de portés disparus en Afrique. Un chiffre qui ne représente qu'une fraction du nombre réel de disparitions et de l'immense crise humanitaire à laquelle le monde fait face.
Le directeur du CICR pour la région Afrique précise qu’un nombre alarmant de migrants disparait chaque année, en Afrique comme dans les pays de destination, au cours des dangereux voyages qu'ils entreprennent en quête de sécurité ou de meilleures perspectives économiques. Durant leur périple, ajoute-t-il, il n'est pas rare que des trafiquants leur infligent des traitements atroces. Ainsi, le risque de perdre le contact avec leurs proches est réel. ‘’Bien souvent, les migrants ne les appellent pas, parce qu'ils n'ont pas accès à un téléphone, qu'ils ont peur ou que le coût est trop élevé.
Je souhaite inviter chacun d’entre vous à prendre un moment pour tenter d’imaginer l’inconcevable. Imaginer le tourment de personnes qui, des années ou des décennies durant, ignorent si des êtres chers sont morts ou vivants, s’ils sont en sécurité ou en danger, malades ou en bonne santé ou s’ils parviennent à manger à leur faim. Voilà ce qu'endurent au quotidien des dizaines de milliers de familles sur le continent africain. Les disparitions constituent indéniablement l'une des plus tragiques conséquences humanitaires à long terme des conflits armés, des situations de violence et de la migration’’, a déclaré Patrick Youssef dans un communiqué parvenu à ‘’EnQuête’’. Quelles que soient les circonstances d'une disparition, l'impact sur les familles est désastreux.
Comme si leur terrible douleur ne suffisait pas, par ailleurs, en plus de la disparition de l’être cher, les familles doivent surmonter d'innombrables difficultés administratives, juridiques et économiques. De plus, les reportages sur l'impact humanitaire des conflits et des situations de violence mettent souvent l'accent sur le nombre de personnes tuées ou déplacées. Les destructions visibles et les besoins matériels, reléguant au second plan la tragédie de ceux qui se retrouvent séparés des leurs. Pourtant, leur cauchemar continue longtemps après que les armes se sont tues.
Pour Patrick Youssef, ‘’l'attention des médias se trouve détournée’’. A cet effet, il appelle les États à accorder toute leur attention à trois priorités humanitaires : éviter les disparitions, faciliter la recherche et l'identification des personnes qui disparaissent malgré tout et répondre aux besoins spécifiques de leur famille. ’’Le CICR reste déterminé à œuvrer en faveur du maintien des liens familiaux, malgré les déplacements et les migrations. De plus, il se tient prêt à fournir son expertise technique et juridique pour aider à élucider le sort des personnes disparues et à les retrouver, ainsi qu'à soutenir leur famille’’, lit-on dans la note.
En 2020, dans le monde, plus de 49 800 nouvelles personnes ont été enregistrées comme disparues par leurs familles auprès du Family Links Network. Fin 2020, le nombre total de personnes portées disparues dans le monde était de plus de 210 000. Toujours la même année, près de 9 500 personnes précédemment enregistrées comme disparues par leurs familles ont été localisées, ce qui correspond à une moyenne de 26 personnes par jour. Ces cas ont été résolus par le CICR, les sociétés nationales et, dans certains cas, les familles elles-mêmes.
En outre, la Commission africaine des Droits de l'homme et des peuples, sous l'égide de l'Union africaine, vient tout juste d'adopter une résolution novatrice sur les migrants disparus en Afrique, qui montre la voie à suivre aux États d'autres régions. À travers elle, les institutions africaines reconnaissent la nécessité d'une action à la hauteur de cette tragédie et se montrent prêtes à redoubler d'efforts pour éviter aux migrants de disparaître ou d'être séparés de leurs proches, tout en renforçant le soutien apporté à leurs familles.
EMMANUELLA MARAME FAYE