UN REMÈDE INEFFICACE AUX COURBATURES BUDGÉTAIRES DU SÉNÉGAL

Certaines informations considérées comme nouvelles dans la LFR 2025 semblent être connues depuis l’élaboration de la LFI.
Une loi de finances initialement rectifiée (LFIR)
La délinquance budgétaire supposée de l’ancien régime a déjà été évoquée en septembre 2024 lors d’une conférence de presse au cours de laquelle le PM, le ministre de l’économie et le SG du gouvernement informaient l’opinion de l’existence de "dettes cachées" (chiffres à l’appui) dont la prise en compte réduirait les marges de manœuvre budgétaires. Entre temps le régime actuel a fait la LFR 2024, la LFI 2025 et cette LFR 2025.
Il est vrai que le rapport de la cour des comptes n’a été publié qu’en février 2025 mais aussi bien pour les opérations budgétaires que pour les opérations de trésorerie, certains éléments présentés comme "nouveaux" méritaient d'être pris en compte depuis la LFI.
Des orientations générales assez générales
Dans la LFR, il y a une rubrique "orientations générales" qui explique le fondement des changements. En dehors de la prise en charge de l’incidence budgétaire du pacte de stabilité sociale du 1er mai 2025, les autres points évoqués dans la LFR semblent relever de rappels. En effet, la prise en compte des recommandations de la cour des comptes, la relance des secteurs porteurs, le rétablissement des marges de manœuvre budgétaires, le meilleur arrimage du budget sur la vison Sénégal 2050 constituent plus une dimension qualitative de la gouvernance des finances publiques qu’un volet quantitatif qui doit infléchir la trajectoire du budget au cours d'une même année.
La révision à la baisse du PIB nominal de 907 milliards (en langage simple, la baisse des richesses qu’on espère créer sur l’année 2025) résulte de la conjoncture internationale défavorable et des difficultés avec certains bailleurs et c’était connu. On pouvait donc être plus prudent dans les hypothèses et les prévisions de recettes fiscales qui ont baissé de 260 milliards. S’y ajoute que les 460 milliards supplémentaires sur l’amortissement de la dette (trésorerie), les 500 milliards d’arriérés dus aux entreprises, les 293 milliards de ponction sur les dépenses en capital sur ressources internes sont autant d’éléments que la loi de finances initiale (LFI) pouvait déjà intégrer.
On a comme l’impression que les autorités sénégalaises (tous régimes confondus) préfèrent avoir des LFI gonflées, en se disant que la LFR est là pour dégonfler. C’est finalement le système et pas les personnes, comme disait l’autre.
A ce rythme, les "courbatures budgétaires" dont souffre le Sénégal risquent d’être chroniques si on ne travaille pas à une meilleure crédibilité budgétaire en collant plus à la réalité depuis la LFI; donc un budget de vérité.
Pr Abou KANE
FASEG/UCAD