Une hausse des dépenses de 14 %
La loi de finances 2025 a été votée ce samedi, sans débat. Les recettes pour l’année 2025 sont arrêtées à 5 014,3 milliards F CFA, tandis que les dépenses sont évaluées à 6 614,8 milliards F CFA.
Le budget prévisionnel pour l’année 2025 est de 5 014,3 milliards F CFA en recettes et de 6 614,8 milliards en dépenses, selon l'adoption, sans débat, du projet de loi de finances initiale (LFI). Ce budget 2025 connaît une hausse des recettes de 99,1 milliards F CFA, soit 2,0 %, et des dépenses de 859,4 milliards F CFA (14,9 %), par rapport à la LFI de 2024, qui s’élevait à 4 915,2 milliards F CFA.
En 2025, une croissance de 8,8 % est prévue, contre 6,7 % en 2024. Quant au déficit budgétaire, il est évalué à 7,8 %, contre 11,6 % en 2024, avec l'objectif de parvenir à une consolidation budgétaire en 2027 et d'atteindre un déficit de 3 % du PIB.
Concernant les recettes du budget général, arrêtées en 2025 à 4 794,6 milliards F CFA, elles sont composées des recettes internes pour un montant de 4 549,6 milliards F CFA et des recettes externes d’un montant de 245 milliards F CFA. Celles-ci incluent des dons budgétaires pour un montant de 45 milliards F CFA et des tirages sur dons en capital pour un montant de 200 milliards F CFA. Globalement, la pression fiscale est projetée à 19,3 % du PIB pour 2025, contre 19,4 % au titre de la LFI 2024, selon le gouvernement.
Les comptes spéciaux du Trésor sont arrêtés à 219,7 milliards F CFA pour 2025, constitués essentiellement des comptes d’affectation spéciale pour 193,3 milliards F CFA. Concernant les dépenses du budget général, elles sont programmées à 6 395,1 milliards F CFA pour l’année 2025, soit une progression de 861,2 milliards F CFA par rapport à la LFI de 2024. Les charges financières de la dette publique (intérêts et commissions) ainsi que la masse salariale devraient progresser respectivement de 13,1 % et 3 %, s’établissant à 932,1 milliards F CFA et 1 485,5 milliards F CFA en 2025.
Quant aux dépenses d’acquisition de biens et services et aux dépenses de transfert, elles s’élèvent à 1 930,5 milliards F CFA, contre 1 676,9 milliards F CFA en 2024. Les dépenses en capital (dépenses d'investissement) sont prévues pour un montant de 2 047 milliards F CFA, contre 1 836,3 milliards F CFA dans la LFI de 2024. Les dépenses des comptes spéciaux du Trésor sont évaluées à 219,7 milliards F CFA pour 2025, contre 221,5 milliards F CFA en 2024.
En ce qui concerne les moyens dévolus aux institutions constitutionnelles, le budget de la présidence de la République est estimé à 78 609 617 404 F CFA, contre 80 129 718 244 F CFA en 2024. Celui de la primature est fixé à 25 006 817 345 F CFA pour 2025, contre 25 723 322 360 F CFA en 2024. Le budget de l'Assemblée nationale s'élève à 22 474 015 137 F CFA pour 2025, contre 20 158 015 137 F CFA en 2024. Le budget du Conseil constitutionnel est arrêté à 1 453 826 065 F CFA pour 2025, contre 1 755 705 000 F CFA en 2024. Quant à celui de la Cour suprême, il est fixé à 5 089 993 426 F CFA pour 2025, contre 6 979 625 379 F CFA en 2024. Pour ce qui est de la Cour des comptes, elle a un budget de 14 512 706 792 F CFA pour 2025 contre 13 199 273 000 F CFA en 2024.
Si les députés, en commission, ont vivement salué les efforts consentis par le gouvernement dans la rationalisation des dépenses, beaucoup d’entre eux ont, en revanche, déploré la hausse encore constatée sur le budget de la présidence de la République, notamment les rubriques de dépenses de personnel ainsi que l’augmentation de la dotation de l’Assemblée nationale de l’ordre de deux milliards F CFA.
Selon eux, ces constatations vont à l’encontre de l’ambition de rationalisation des dépenses largement affichée. La hausse du budget de la Cour des comptes a également suscité un débat.
Fonsis
Des députés ont par ailleurs estimé que le montant des réserves de précaution est élevé. Ils ont souhaité être édifiés sur les raisons sous-jacentes à cette décision. Le fait que le Fonds intergénérationnel soit logé dans le budget de la présidence de la République leur pose problème, car la gestion de ce fonds incombe plutôt au Fonds souverain d'investissements stratégiques (Fonsis).
Concernant ce Fonds intergénérationnel, le ministre de l’Économie, du Plan et de la Coopération, Abdourahmane Sarr, a fourni des précisions. Le ministre note qu’il n’est pas géré par la présidence de la République, mais par le Fonsis, qui a comme ancrage le MFB. Concernant la probable baisse du prix du baril du pétrole due à la géopolitique mondiale, M. Sarr indique qu’au cas où des manquements seraient constatés sur les prévisions de recettes pétrolières, le Fonds de stabilisation, créé en plus du Fonds intergénérationnel, pourrait apporter une plus-value en termes de péréquation. L’idée est que les baisses ne puissent pas affecter fondamentalement le budget.
Par ailleurs, les réserves de précaution, d’un montant de 90 milliards F CFA, devraient contribuer à faire face aux imprévus. Néanmoins, d'après Abdourahmane Sarr, ces réserves budgétaires constituent une manne financière que le gouvernement ne peut mobiliser tant que les hypothèses fondamentales sur le budget sont atteintes.
Un nouvel audit de la dette
Par ailleurs, certains députés ont décrié le niveau élevé de l’endettement du Sénégal. Ils ont émis des interpellations à propos de l’audit réalisé dans ce domaine. Il y a également des interrogations sur le montant exact de l’encours de la dette et sur la hausse notée des charges financières de la dette ainsi que sur la stratégie de son département afin d’éponger la dette intérieure.
Répondant à l’interpellation relative à la dette publique, le ministre de l’Économie, du Plan et de la Coopération, Abdourahmane Sarr, a indiqué que son département a la responsabilité de décliner le cadre macroéconomique et d’identifier les risques macroéconomiques.
Le ministre des Finances et du Budget, Cheikh Diba, a, pour sa part, apporté des explications concernant le déficit budgétaire. Il soutient qu’au lieu de 4,5 %, il est à hauteur de plus de 10 %. Le taux d’endettement est aussi aggravé pour se retrouver à plus de 80 %.
En définitive, il a attiré l’attention sur la nécessité de faire la part des choses entre l’administratif, le travail quotidien des agents du ministère des Finances et du Budget (MFB) et la décision politique consistant à ne communiquer qu’une partie des statistiques.
Selon le ministre, au vu de ces constatations, une nouvelle trajectoire de consolidation budgétaire a été définie afin que le Sénégal revienne, à court, moyen et long terme, aux critères de convergence. Il a ainsi annoncé les axes de cette nouvelle trajectoire, à savoir la rationalisation des dépenses fiscales et l’élargissement de l’assiette à travers notamment la digitalisation et la refonte du Code général des impôts.
En matière de dépenses, un meilleur ciblage sera effectué, particulièrement dans les postes devant faire l’objet de recrutement. La nouvelle trajectoire devra aussi mieux adresser les dépenses de transfert et d’investissement, surtout celles sur ressources externes.
En outre, Cheikh Diba note qu’un cadre de concertation sur la dette existe, même si son avis n’est que consultatif. Ainsi, l’option est d’instaurer un avis conforme et, à terme, de réunir tous les acteurs du domaine autour d’un cadre unique avec un seul ancrage institutionnel. Poursuivant sur la dette publique, le ministre renseigne qu’elle était estimée à plus de 15 500 milliards F CFA, mais qu’à la suite de l’audit sur la situation des finances publiques effectué par l’Inspection générale des finances, l’encours serait à plus de 17 700 milliards F CFA.
‘’En effet, cet audit a révélé l’existence de tirages sur ressources extérieures non comptabilisés dans les statistiques nationales des finances publiques. Les auditeurs ont en outre décelé une dette bancaire locale assez substantielle, pilotée parallèlement aux appareils requis en matière de comptabilisation budgétaire’’. Monsieur Diba a aussi indiqué que, nonobstant la finalisation en cours de cet audit par la Cour des comptes, en application du Code de transparence dans la gestion des finances publiques, un expert indépendant a été commis pour procéder à un nouvel audit de la dette.
Répondant à l’interpellation portant sur la baisse du taux de croissance, le gouvernement soutient que cette diminution des prévisions constatée entre la LFI 2024 et le PLF 2025 est liée au retard dans le démarrage de la production d’hydrocarbures. Toutefois, estime le gouvernement, dans la période 2025 à 2029, la moyenne sera de 6,5 %.
Impôts
Le gouvernement a été interpellé sur les pertes de recettes de l’ordre de 100 milliards F CFA auprès de la compagnie minière Grande Côte Opération (GCO), qui exploite des sables minéralisés, dont le zircon à Diogo, dans la région de Thiès. Cheikh Diba soutient que cette société est actuellement à jour par rapport à ses obligations fiscales. D’ailleurs, dit-il, le régime fiscal dont elle bénéficiait est arrivé à jour à partir de novembre 2024.
Concernant le contentieux, le ministre note qu’après la confirmation du redressement, le contribuable a, dans le cadre de la procédure contradictoire, saisi le MFB pour une demande motivée d’arbitrage. ‘’En l’espèce, l’interprétation des dispositions déchargeait l’entreprise. Au terme de cette procédure, le MFB a confirmé le montant de 14 milliards F CFA en lieu et place des montants de 104 milliards F CFA de droits simples et 48,1 milliards F CFA au titre des pénalités’’, a-t-on expliqué.
De plus, selon M. Diba, la Direction générale des Impôts et des Domaines (DGID) travaille à améliorer son maillage du territoire. Dans ce cadre, il est annoncé que trois nouveaux centres des services fiscaux (CSF) mis en place seront fonctionnels dès le mois de janvier 2025. Ces CSF sont des guichets uniques qui traiteront tous les actes (enregistrement, recouvrement, etc.).
Concernant le consentement à l’impôt, le ministre a informé que la DGID et le ministère de l'Éducation nationale travaillent sur un dispositif d’introduction du civisme fiscal dans les curricula de l’école primaire.
Dans un autre registre, en ce qui concerne les collectivités territoriales (CT), le ministre a informé que le Fonds de dotation de la décentralisation et le Fonds d’équipement des CT ont connu des hausses significatives. En outre, le nouveau gouvernement travaille avec plus de diligence dans la mise à disposition des ressources au profit des CT.
BABACAR SY SEYE