La Sénégal construira bientôt son premier gazoduc terrestre
Une électricité moins chère et plus propre, ce ne sera bientôt plus qu’un vœu pour la Senelec. La transition vers l’énergie de production avec du gaz sera boostée par la construction d’un pipeline terrestre dans l’optique d’atteindre également l’indépendance énergétique.
La révolution énergétique sénégalaise est en marche. Une nouvelle étape sera bientôt posée, avec la construction du tout premier gazoduc terrestre annoncé par l’Agence américaine pour le commerce et le développement (USTDA). Un projet ambitieux de 131,2 milliards de francs CFA qui va permettre au Sénégal de réduire le coût très élevé de son énergie et de faire, grâce à ses réserves de gaz, quelques pas de plus vers l’indépendance énergétique. Petit à petit, le pays est en train de passer de l’énergie thermique de base, en particulier les centrales au fioul lourd (HFO), à la production d’électricité avec du gaz et des énergies renouvelables.
La découverte récente d’importantes réserves de pétrole et de gaz offshore (estimées à 1 milliard de barils de pétrole et 40 trillions de pieds cubes de gaz) a incité le gouvernement à se concentrer sur le développement d’une économie gazière. Le gouvernement a maintenant donné la priorité aux investissements dans le système de transmission et de distribution (T&D). Le futur pipeline sera long de 144 km. Il transportera le gaz de l'usine de traitement du gaz de Yakaar-Teranga, qui sera construite par le géant BP (British Petrolium), jusqu'à neuf centrales à gaz. En plus de la centrale électrique au gaz, le gazoduc va desservir de grands sites commerciaux et industriels à proximité du tracé, œuvrant notamment dans la fabrication d’engrais, de ciment, de l'acier et du fer, et dans la transformation des aliments.
Le gazoduc transportera le gaz de l'usine de traitement du gaz de Yakaar-Teranga jusqu'à neuf centrales à gaz
Le Sénégal est l'une des économies les plus dynamiques d'Afrique, mais la croissance et les progrès économiques sont limités par le coût élevé de l'électricité pour les entreprises connectées au réseau et le faible accès à l'électricité dans les zones périurbaines et rurales. L'objectif de ce projet est de renforcer et d'augmenter la fiabilité du réseau de transport à haute tension du Sénégal, et l'autre vise à étendre le réseau électrique dans les zones à fort potentiel économique, mais à faible taux de connexion.
Depuis 2017, l’USTDA a lancé l’initiative américaine d’exportation d’infrastructure du gaz, pour faciliter les partenariats entre l’expertise américaine et les pays visant à développer leur infrastructure de gaz naturel. Cela a permis à des représentants du secteur public sénégalais d’effectuer une mission commerciale à destination des États-Unis, pour rencontrer les leaders de l’industrie américaine du gaz. Les États-Unis sont le foyer des équipementiers de gaz naturel et de fournisseurs de services les plus fiables et avancés au monde. Le programme aux États-Unis a permis aux délégués de voir les technologies de pointe américaines et d’apprendre des meilleures pratiques des leaders dans cette industrie.
Cela permet aussi de s’inspirer du modèle américain. Selon l’ambassade américaine, l’approvisionnement en gaz naturel aux États-Unis a entraîné une baisse des prix de l’énergie. Et avec l’infrastructure appropriée, les découvertes de gaz naturel au Sénégal ont le potentiel de faire de même. L’adoption par le Millennium Challenge Corporation (MCC), en 2018, d’un nouveau Compact d’électricité de cinq ans, a permis au gouvernement de prendre l’option de passer à la mise en place de l’infrastructure nécessaire pour utiliser le gaz domestique pour la production d’électricité.
Le gaz permettra de baisser les coûts de l’électricité
C’est ainsi qu’une stratégie Gas-to-Power a été mise en place pour fournir le cadre juridique nécessaire à la participation du secteur privé. En parallèle, la compagnie nationale Senelec a signé un protocole d’accord avec le développeur local West African Energy pour le développement d’une centrale à gaz de 300 MW au Cap des Biches, à environ 20 km de Dakar. La Senelec a signé le contrat d’achat d’électricité (PPA) pour la centrale de 350 millions d’euros (415 millions de dollars américains) en juin 2020, et prévoit que la centrale sera mise en service en 2022.
Le réseau Senelec reçoit déjà de l’électricité à partir du gaz. En juin dernier, le Sénégal recevait son premier bateau-usine lui permettant de réceptionner en mer, plutôt qu’à terre, du gaz d’importation liquéfié et de le ramener à l’état gazeux pour produire de l’électricité. L’unité flottante de stockage et de regazéification (FSRU, selon son acronyme en anglais) de 272 mètres de long et 125 000 mètres cubes de capacité, est connectée par des gazoducs à la centrale électrique flottante que Karpowership fait fonctionner depuis août 2019 dans les eaux sénégalaises, indiquait les partenaires du projet. Cette centrale fournit environ 15 % de l’électricité du pays.
Lamine Diouf