‘’Aldiana’’ recrutait des filles en détresse et les poussait à se prostituer
Loger des filles dans un appartement et les livrer à la prostitution est l’activité génératrice de revenus d’El Hadj Thiam alias ‘’Aldiana’’. Arrêté suite à un contrôle de routine, alors qu’il était dans le collimateur de la brigade des mœurs, il est livré à la justice, de même que sa complice Jacqueline Kiné Ndour. Jugés hier à la barre du tribunal des flagrants délits de Dakar pour proxénétisme et traite de personnes, ils ont écopé de trois mois et d’un mois d’emprisonnement ferme pour proxénétisme, après avoir été relaxés du chef de traite des personnes.
Pour répondre des chefs de proxénétisme et de traite de personnes, El Hadj Thiam alias ‘’Aldiana’’ et Jacqueline Fatou Ndour ont comparu à la barre du tribunal des flagrants délits de Dakar, hier. Il ressort des éléments de la procédure que le nommé El Hadj Thiam créait des comptes pour des filles sur le site de rencontres nexna.com, moyennant la somme de 60 mille francs CFA. En sus de cela, il donne à ces filles qui deviennent ses employées des téléphones avec des numéros où elles sont jointes par des clients. Après avoir satisfait ces derniers, celles-ci partagent le butin avec El Hadj Thiam, à qui la plus grosse part est remise. Pour mieux exercer son activité loin des yeux indiscrets, le jeune homme de 37 ans loue un appartement à Liberté 6, où sont logés six de ses employés.
Selon les éléments de l’enquête, c’est au quartier Maristes qu’il a commencé à recruter des filles qui, le plus souvent, étaient en détresse, il y a de cela deux ans. Comme en atteste d’ailleurs Oumy Dionne. Celle-ci a raconté hier à la barre qu’elle a été mise en rapport avec Ibrahima par une de ses amies, car elle était dans le besoin. ‘’On avait des difficultés pour payer notre loyer. C’est ainsi que j’ai connu Aldiana, par l’entremise d’une amie. Il a d’abord créé un compte pour moi sur le site nexna.com, avant de m’héberger dans son appartement aux Maristes. Chaque fois que je finissais avec un client, je remettais l’argent dans une calebasse et il me donnait ensuite ma part’’, a raconté Oumy Dionne, visage bien caché sous son voile.
Si cette dernière dit avoir arrêté de bosser avec Aldiana, d’autres filles ont travaillé pour lui. Selon l’enquête, celles-ci sont nées entre 2000 et 2003. Étant sous le collimateur de la brigade des mœurs, ce Saint-Louisien établi à Dakar a été piégé par une indicatrice qui a d’ailleurs témoigné à la barre, hier, lors de l’audience. Répondant au nom d’Evelyne Napel, celle-ci renseigne qu’elle a contacté le prévenu la veille de son arrestation.
Après avoir discuté, il lui a proposé de la déposer à l’appartement. En effet, elle lui a fait croire qu’elle était un sans-abri. Alors que la mission était sur le point de porter ses fruits, ils ont tous les deux été arrêtés par les policiers de l’Unité 15 des Parcelles-Assainies, vers 1 h du matin. Selon Evelyne, une fouille a permis aux enquêteurs de découvrir deux sachets contenant des téléphones portables, des puces jamais utilisées, des préservatifs et des lubrifiants. À en croire l’indicatrice, Aldiana, qui a été autorisé d’émettre un appel, a contacté sa complice Jacqueline Kiné Ndour pour lui dire de nettoyer l’appartement avant l’arrivée des flics. Par ailleurs, c’est au moment d’exploiter le téléphone du prévenu que les policiers ont découvert le contenu de ses conversations avec cette fille qui a été arrêtée et placée sous mandat de dépôt comme lui.
À la barre, El Hadj Thiam alias ‘’Aldiana’’ nie catégoriquement les faits. Âgé de 37 ans, ce marié et père de sept enfants jure être étranger aux faits. ‘’Ces préservatifs et lubrifiants ne m’appartiennent pas. C’est Evelyne qui les détenait dans ses affaires. Je voulais juste l’aider, car elle m’a fait croire qu’elle n’avait pas de domicile. S’agissant des téléphones portables et des puces, je les ai ramassés aux alentours du marché des Parcelles-Assainies’’, s’est-il dédouané.
De noir vêtu, il dit être victime de complot. Ce, malgré les déclarations d’Oumy Dionne et de Marème Sèye. Sur l’appel téléphonique qu’il a échangé avec Jacqueline, il botte en touche les transcriptions consignées dans le dossier. ‘’C’est ma femme que j’ai contactée. Comme elle ne répondait pas, j’ai appelé Jacqueline pour lui dire que j’ai été arrêté’’, renseigne-t-il.
Pour sa part, Jacqueline Kiné Ndour, qui est poursuivie pour complicité de proxénétisme et de traite de personnes, adopte le même système de défense que son coprévenu. ‘’Je ne travaille pas pour lui. L’appartement, c’est moi qui l’ai loué. Parfois, quand je ressens le besoin de me reposer, je me rends là-bas. Des fois aussi, des amis commerçants qui viennent de la sous-région y logent, moyennant une rémunération’’, fulmine-t-elle.
Malgré leurs dénégations systématiques, la représentante du ministère public a requis qu’ils soient reconnus coupables des faits qui leur sont reprochés. Pour la répression, elle a requis deux ans d’emprisonnement ferme contre El Hadj Thiam et deux ans dont deux mois ferme contre Jacqueline Kiné Ndour.
Prenant la parole pour leurs plaidoiries, les avocats de la défense ont sollicité une relaxe pure et simple à titre principal et une relaxe au bénéfice du doute à titre subsidiaire.
Finalement, le tribunal, après avoir relaxé les prévenus des délits de traite de personnes et complicité de ce chef, a disqualifié celui de complicité de proxénétisme retenu contre Jacqueline Kiné Ndour en proxénétisme. Ayant reconnu les prévenus coupables de ce chef, le juge a condamné El Hadj Thiam alias Aldiana a trois mois d’emprisonnement ferme et Jacqueline Kiné Ndour à un mois d’emprisonnement ferme.
MAGUETTE NDAO