Publié le 1 Jan 2025 - 22:19
RAPPORT ITIE 2023

Forces et faibles du secteur extractif

 

Le Comité national ITIE a présenté, hier, le rapport annuel qui renseigne sur la gouvernance du secteur extractif. Pour 2023, le secteur extractif a contribué pour plus de 380 milliards aux revenus de l'État, soit une hausse de plus de 102 milliards F CFA par rapport à l'année précédente. 

 

380,03 milliards F CFA. C'est le montant total des recettes versées par les compagnies du secteur extractif pour le compte de l'année 2023. L'information a été donnée par la présidente du Comité national ITIE, lors de la présentation de son onzième rapport annuel. Oulimata Sarr : “Pour l’exercice fiscal 2023 (1er janvier au 31 décembre), le total des revenus générés pour le secteur extractif a considérablement augmenté, passant de 275 milliards en 2022, à 380,03 milliards F CFA (y compris les paiements sociaux et environnementaux) en 2023. Sur cette enveloppe, 346,19 milliards F CFA sont directement allés au budget de l’État”.

Par rapport à l'année précédente, il a été noté une hausse sensible de l'ordre de 102,67 milliards. Sur les raisons de cette hausse importante, le rapport informe : “Cette hausse s'explique essentiellement par les redressements fiscaux de la Sabodala Gold Operations pour 14,16 milliards et des Ciments du Sahel pour 2,5 milliards ; les impôts sur les sociétés, particulièrement pour SGO, Petowal Mining Company et Société minière de la vallée Sénégal (Somiva) pour 50,28 milliards F CFA, et enfin les dividendes versés à l'État, principalement par les Industries chimiques du Sénégal pour 25 milliards F CFA”. 

Comme chaque année, l'essentiel des revenus du secteur extractif provient du secteur minier qui a contribué à hauteur de 332,43 milliards F CFA, soit une hausse de 96,72 milliards, par rapport à l'année précédente. Quant au secteur des hydrocarbures, il a également connu une augmentation de 5,95  milliards, passant de 24,7 à 30,65 milliards F CFA. “Cette hausse est due principalement au paiement, par Woodside et  BP, de  plus de 1, 908 milliards F CFA pour les retenues à la source sur salaire et plus de 5 milliards 99 millions dans le cadre du projet GTA”, indique le rapport. 

GCO n'a payé ni dividendes ni impôts sur les sociétés 

Pour l'année 2023, le flux le plus important est constitué de l'impôt sur les sociétés avec une contribution de 62 727 665 742 F CFA. Il est suivi de la taxe sur la valeur ajoutée avec 50 789 970 820 F CFA, de la redevance minière estimée à 45 859 664 010 F CFA, des dividendes qui sont de l'ordre de 29 852 407 029 F CFA.

On constate, par ailleurs, que sur un total de plus de 1 110 milliards F CFA d'exportation, les droits de douane sont juste évalués à 21 364 927 199 F CFA. Quant aux redressements fiscaux, ils sont estimés à 16 831 732 581 F CFA. La taxe sur le ciment, les retenues à la source sur bénéfice non commercial et la taxe sur la valeur ajoutée collectée par la Direction générale des Douanes ont rapporté respectivement 13 922 137 996 F CFA ; 12 745 512 007 F CFA et 12 649 190 918 F CFA. 

Il faut noter que Sabodala Gold Operations est la première contributrice dans les revenus pour l'année 2023 avec 123 843 218 357 F CFA. Elle est suivie de la Sococim avec 45 138 166 712 F CFA, des Ciments du Sahel pour 43 135 109 589 F CFA, des Industries chimiques du Sénégal pour 30 245 122 790 F CFA et de la Grande Côte Operations pour 26 075 109 610 F CFA. Le Top Ten des plus grands contributeurs aux recettes de l'État est complété par Dangote, BP, Petowal Mining, Woodside et la Somiva, avec respectivement des contributions de 20 757 046 295 F CFA, 15 025 543 783 F CFA, 13 414 305 740 F CFA, 9 884 313 412 F CFA et 5 205 324 917 F CFA. 

Le Top Ten des contributeurs les plus importants et des ressources naturelles les plus pourvoyeuses de recettes 

Pour le cas de GCO qui a défrayé ces derniers jours la chronique, le rapport informe qu'elle a payé plus de 16 milliards F CFA au titre de la redevance minière pour l'année 2023, plus de 7 milliards sur les retenues à la source sur salaire, plus d'un milliard au titre des pénalités, redressements douaniers et amendes, pour ne citer que les postes les plus importants sur les moins de 28 milliards versés par l'entreprise.

En revanche, le rapport fait état de 0 F CFA payé en 2023 au titre des dividendes, de l'impôt sur les sociétés et de la contribution économique locale. Pour les droits de douane, la société n'a payé que 2,6 millions F CFA. 

Le rapport renseigne, par ailleurs, sur les principales richesses pourvoyeuses de recettes pour l'État du Sénégal. Parmi ces ressources, il y a l'or qui vient en tête avec une contribution de plus de 484 milliards F CFA au titre de la valeur totale de la production. Viennent dans l'ordre le ciment avec plus de 240 milliards, le clinker avec plus de 110 milliards, le phosphate avec plus de 67 milliards, l'ilménite 54 avec plus de 53 milliards, le zircon premium avec plus de 33 milliards. Le Top Ten est complété par le phosphate naturel, le zircon standard, l'ilménite 58 et le phosphate sec crible avec respectivement des productions estimées à plus de 33 milliards, plus de 20 milliards, plus de 19 milliards et plus de 9 milliards F CFA. 

En ce qui concerne les exportations, l'or vient aussi en tête avec une valeur estimée à plus de 491 milliards F CFA. Suivent l'acide phosphorique, le ciment, l'ilménite 54, les phosphates, le zircon premium, avec respectivement plus de 300 milliards, plus de 96 milliards, plus de 53 milliards, plus de 52 milliards et plus de 32 milliards. Le zircon standard, l'ilménite 58 et le NPK suivent avec plus de 20 milliards, plus de 19 milliards 700 millions et plus de 19 milliards 500 millions F CFA. 

ICS, PMC, Dangote, ces mauvais élèves du contenu local

En matière de contenu local, la Sococim fait partie des meilleurs élèves avec des transactions avec les fournisseurs locaux chiffrés à plus de 130 milliards 888 millions contre plus de 81 milliards pour les transactions avec les étrangers. Les Ciments du Sahel ont aussi fait de grands efforts en réservant plus de 76 milliards de leurs transactions aux locaux contre 94 milliards pour les fournisseurs étrangers. De même que la Somiva qui a octroyé aux fournisseurs locaux plus de 29 milliards contre moins d'un milliard seulement pour les étrangers.

Pour sa part, Sabodala a accordé plus de 101 milliards de ses transactions aux fournisseurs locaux contre plus de 169 milliards pour les fournisseurs étrangers. La GCO a réservé 21 milliards de parts de marché aux locaux contre plus de 57 milliards pour les étrangers.

Parmi les pires élèves, il y a les Industries chimiques du Sénégal qui n'ont réservé que 35 milliards de parts de marché aux locaux, alors que les fournisseurs étrangers ont pu accaparer plus de 157 milliards F CFA. Pour ce qui est de PMC, elle a accordé la quasi-totalité de ses transactions aux étrangers, soit plus de 79 milliards contre moins d'un milliard pour les locaux. 

L'absence de l'Administration centrale, la fausse note

À noter que l'Administration centrale a brillé par son absence lors de la présentation du rapport annuel cette année. D'habitude, le lancement du rapport ITIE était souvent présidé par les plus hautes autorités, souvent par le ministre de tutelle, à défaut, il était représenté par l'un de ses plus proches collaborateurs. Mais cette fois, il n'y a eu même pas de directeur de service. Nous avons aussi relevé que le Comité national, qui est l'administration la mieux informée des réalités du secteur, est aussi absent de la Commission chargée de la renégociation des contrats. 

À la question de savoir si ceci ne traduit pas un manque d'intérêt de la part des nouvelles autorités, le représentant de la société civile dans cette institution relativise : “Il faut savoir que le destinataire du rapport, c'est le public, ce n'est pas l'autorité. Mais la présidente a informé le président de la République et a eu son autorisation pour la publication. Sous ce rapport, il n'y a pas à s'inquiéter. Nous travaillons en parfaite intelligence avec les plus hautes autorités.”

Interpellé sur la pression fiscale et les contrôles devenus systématiques, le représentant du secteur privé explique : ''Pour moi, cela entre dans l'ordre normal des choses. C'est tout à fait naturel que l'État envoie des missions de contrôle dans les entreprises. Et je ne pense pas que c'est spécifique au secteur extractif. Je pense que tout le monde les reçoit et c'est tout à fait naturel”, a-t-il souligné.  

MOR AMAR

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