Publié le 3 Oct 2021 - 02:59
REFUS DE PATERNITÉ

4 505 cas recensés en Casamance

 

 4 505 cas de refus de paternité ont été recensés en Casamance. Selon une étude réalisée le mouvement ‘’Touche pas à ma sœur’’  avec la collaboration de le cabinet Rémanagoree, sur 100 enfants nés hors mariage dans ces zones, les 90% seraient victimes de refus de paternité dans cette contrée.

 

‘’Beaucoup d’hommes ayant été envoyés en mission, aussi bien que les combattants rebelles, dans la partie sud du pays ont laissé derrière eux des fils et filles dont, aujourd’hui, leurs mamans qui sont devenues, par la suite, des filles mères et ignorent là ils se trouvent. S’ils vivent encore ou s’ils ne sont plus parmi les vivants’’. C’est la révélation choquante faite par le mouvement ‘’Touche pas à ma sœur’’ et le cabinet Rémanagoree. Ils ont rendu public, hier, leur deuxième étude sur la question. Cette étude a été réalisée durant la période allant de juin à septembre auprès de victimes dont la moyenne d’âge est comprise entre 15 et 25 ans.

Ziguinchor (1 212 cas), Sédhiou (1 917 cas), Bignona (1 917, cas), Oussouye (617 cas) Vélingara (383 cas) ont été les zones d’intervention. Au total, 4 505 cas de refus de paternité ont été recensés en Casamance. Sur 100 enfants nés hors mariage dans ces zones, les 90% seraient victimes de refus de paternité. Les auteurs de l’étude soulignent que ‘’les cas les plus effrayants restent ceux de Sédhiou, où des filles âgées moins de 18 ans sont tombées enceintes des œuvres d’hommes se disant responsables, sous les regards impuissants de leurs mères, sans que rien ne soit tenté ou que ceux auteurs de leurs grossesses ont déjà fui le territoire’’.

‘’Il m’a abreuvée d’injures avant de changer de numéro’’

Des témoignages poignants ont été d’ailleurs recueillis dans différentes régions. Agée de 22 ans, Fatou Sylla travaillait dans la gestion d’une ligne Aftu (Tata) à Dakar. Elle a expliqué à l’équipe de Touche pas à ma sœur et son collaborateur que tout se passait bien au début et qu’elle s’acquittait convenablement son travail. Mais, cela ne durera que 15 jours. Les choses ont commencé à mal tourné le jour où  le gérant de la ligne, qui se trouve être le fils du propriétaire du bus, lui demanda de venir récupérer les tickets. ‘’Il m’avait fait comprendre, dans un premier temps, que c’était une villa, avant que je ne me rende compte que c’était plutôt une auberge. Après l’avoir interpellé sur ses vraies intentions, il me dira à la suite que c’était la voie à suivre pour rester agent de l’entreprise, d’autant plus que d’autres acceptent volontiers ce type de contrat’’, dit Fatou Sylla.

 ‘’Vu que je voulais vaille que vaille rester dans cette entreprise, afin de venir en aide à mes parents restés à Ziguinchor, j’ai fini par céder et attraper une grossesse, par la suite. L’auteur de ma grossesse a refusé la paternité et il est actuellement au Maroc. Non seulement, il m’a trompée, mais, il m’a chassé comme un mal propre. Ne connaissant rien de Dakar et étant sans assistance, j’ai rebroussé chemin pour me terrer dans mon village natal auprès de mes parents’’, poursuit-elle.

Binta Sakho, 19 ans, a, elle, arrêté ses études en classe de Première par la faute d’une grossesse non désirée. ‘’Le père de mon enfant, non seulement, n’a pas voulu reconnaitre l’enfant que nous avons eu ensemble, mais pire encore, je jure que j’ignore là où il se trouve actuellement’’, confie-t-elle. Elle explique que cette situation l’a poussée à se prostituer. ‘’Il était venu à Bignona pour une mission et lorsqu’il a su j’étais tombée enceinte de lui, il a pris la tangente, me laissant seul avec mon enfant. C’est d’ailleurs, lui-même que j’ai connu comme premier homme. Il a pris ma virginité, me laissant un enfant et il a fondu dans la nature. Voilà ce qui explique ma ‘profession’ de prostituée à Kédougou, loin des yeux de mes parents, de mon enfant et de mon entourage’’, regrette-t-elle. 

Habitante à Vélingara, Eugénie Coly aussi a un enfant victime de refus de paternité. Son histoire remonte de 2012, durant la campagne électorale présidentielle. ‘’Le père de mon enfant faisait partie de la délégation qui accompagnait le président sortant Me Abdoulaye Wade qui était venu pour les besoins de sa campagne à Ziguinchor. Donc, c’est dans ces circonstances que j’ai fait la connaissance de ce monsieur qui est même venu jusque chez moi, pour me promettre monts et merveilles devant mes parents pauvres, allant même jusqu’à jurer qu’il allait modifier le plan de notre demeure juste après les élections, sans oublier le travail de bureau aussi promis. Et donc, je me suis donnée à lui et lorsque j’ai été informée de la grossesse que je portais, je l’ai interpellé sur la question, mais, il m’a abreuvée d’injures avant de changer de numéro. Et depuis il est resté injoignable et c’est moi-même qui me charge des besoins de mon enfant avec aussi l’assistance de la mère qui ne m’a jamais abandonnée durant ces épreuves’’, a-t-elle confié aux auteurs de l’enquête.

‘’Les députés devraient s’autosaisir’’

Face à cette situation, ‘’Touche pas à ma sœur’’  estime que la loi doit être durcie pour ces cas de refus de paternité. ‘’C’est un fléau qui est devenu monnaie courante dans notre pays. Toutes les régions du Sénégal regorgent de cas de refus de paternité ; et les députés devraient s’autosaisir pour que la loi soit plus sévère en l’encontre de ces monstres de pères, au lieu de se contenter à passer tout leur temps à voter ou faire voter des projets de loi politiques qui ne sont d’aucune utilité pour le peuple. C’est un sujet qui interpelle tout un chacun et précisément les représentants du peuple que sont les députés’’, martèle le président de ‘’Touche pas à ma sœur’’, Ismaila Kamby.

Il faut-il rappeler que, depuis sa création, le 08 mars 2015, et l’initiation de la proposition de loi contre le refus de paternité, ‘’Touche pas à ma sœur’’ ne cesse de recevoir des cas de violences du genre, partout où ses cellules sont installées comme la Casamance et même au-delà de nos frontières, comme la Gambie et la République de Guinée. Ses membres reconnaissent qu’ils se heurtent à des croyances traditionnelles et des réalités socioculturelles qui sont toujours d’actualité dans bien des zones de la Casamance. ‘’Cependant, certaines femmes vivant dans ces zones dénoncent les violences qu’elles subissent de la part de leurs conjoints, mais, tout en restant encagoulées, de peur de représailles de la part de leurs propres familles’’, regrette ‘’Touche pas à ma sœur’’.

BABACAR SY SÈYE

 

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