Le patronat mobilise ses troupes du Nord
Saint-Louis sera, pendant 48 heures, la capitale économique du Sénégal, avec le démarrage des rencontres décentralisées du CNP-Entreprises du pôle Nord. Ainsi, les chefs d'entreprise des régions de Saint-Louis, Louga et Matam, les services étatiques et des partenaires échangeront autour de plusieurs thématiques relatives au climat des affaires.
Le pouvoir politique appartient aux acteurs politiques, mais le pouvoir économique, c’est le secteur privé, toutes sensibilités confondues. Telle est la conviction du président du Conseil national du patronat, Baidy Agne, lors de la cérémonie d'ouverture officielle des rencontres décentralisées du Conseil national du patronat (CNP) avec les chefs d'entreprise du Pôle Nord.
Pour lui, l'écrasante majorité des activités économiques du Sénégal est concentrée dans la capitale sénégalaise. Mais cela ne fait pas pour autant de Dakar tout le Sénégal qui travaille, qui crée de la richesse productive et qui donne des emplois durables à la jeunesse sénégalaise. "Certes, Dakar se retrouve avec plus de 70 % de l’activité économique, mais il existe le pôle Nord avec ses terres arables, sa zone sylvo-pastorale, le fleuve Sénégal, auxquels il faut rajouter les plateformes pétrolières et gazières qui sont ici. Il regorge de ressources naturelles, agricoles et de potentialités économiques que nous devons valoriser davantage", a déclaré Baidy Agne.
À l'en croire, pour que le pôle Nord puisse impacter positivement le développement socioéconomique du pays, il faut des réformes structurelles à l’amélioration du climat des affaires, des mesures incitatives à l’investissement privé et plus de soutien de l’État aux opérateurs économiques. "Il est important que la voix des entreprises soit mieux entendue et davantage prise en compte, surtout dans le contexte sociopolitique actuel. La politique nationale de décentralisation que le secteur privé régional demande est celle qui permet plus d’écoute, plus de flexibilité et plus de convergences d’intérêts dans le partenariat public-privé à l’échelle des territoires économiques régionaux", a soutenu M. Agne.
Pour le président du CNP, il n'est plus question de se contenter d’écouter les autres expliquer leurs préoccupations et celles de leurs entreprises ou de leur prescrire des ordonnances à même d’améliorer la situation économique des entreprises.
‘’Notre responsabilité, c'est d'investir, de travailler et de créer des emplois’’
Pour Baidy Agne, c'est aux entrepreneurs de porter la pensée économique positive et réaliste, mais aussi de porter une appréciation relative à toute offre de programme touchant leurs intérêts, surtout en cette veille d’élection présidentielle. "Qui mieux que les riziers pour parler des difficultés d’accès au foncier, au financement et aux marchés ? Qui mieux que les agro-industriels, en ce qui concerne la concurrence déloyale et les entraves à l’exportation ? Que dire des maux dont souffrent nos artisans, notamment l’accès au financement et aux marchés publics ? Pire, aujourd’hui, ils nous informent de leurs difficultés de trouver des jeunes voulant se former, aller en apprentissage. La jeunesse qui, malheureusement, préfère le petit business rapide et la moto-Jakarta", a regretté M. Agne. Avant de rappeler que le secteur de l’artisanat devrait pourtant être le premier secteur pourvoyeur d’emplois, comme dans les pays plus développés.
Affinant son diagnostic, il ajoute que la pêche artisanale, les secteurs du BTP, du tourisme et du numérique passent des moments très difficiles. " Les pêcheurs nous soulignent que la pêche artisanale ne permet plus de générer des revenus décents. Le secteur du BTP est délaissé par notre jeunesse au profit d'ouvriers guinéens, maliens, nigériens. Celui du tourisme, après avoir fait montre d’une grande résilience, a besoin de plus d’accompagnement financier pour sa mise à niveau et sa compétitivité par rapport aux autres destinations. Enfin, le numérique a besoin d’un écosystème régional favorable à son développement’’, a plaidé M. Agne.
Selon lui, si la question de l’emploi est une priorité nationale qui, mieux que ceux qui créent des emplois, peut prescrire cette ordonnance de portée républicaine ? Mais pour des solutions rapides et durables face à cette question de l’emploi des jeunes, a poursuivi Baidy Agne, il faut lever les facteurs bloquant le développement et la pérennité des entreprises.
Il faut signaler que les rencontres décentralisées du CNP avec les chefs d'entreprise du pôle Nord sont une tribune pour les participants de se pencher sur toutes leurs préoccupations relatives au problème d'accès au foncier, au crédit, à la formation, à la législation du travail, au financement, à l’accès aux marchés publics. Des problématiques auxquelles le patronat doit apporter des solutions en fédérant tout le monde, en utilisant les chambres consulaires et leurs différents représentants.
IBRAHIMA BOCAR SENE SAINT-LOUIS