‘’Ce que Cheikh Amar m’a fait…’’
Les choses ne sont décidément pas parties pour s’arranger entre les deux hommes d’affaires à la tête de deux empires financiers qu’un marché de véhicules destiné aux collectivités locales oppose avec une férocité inouïe. Dans cette interview réalisée jeudi dernier dans un hôtel de la place, Serigne Mboup s’explique sur les raisons de la confrontation. Le Président du groupe CCBM déverse toute sa bile sur le patron de TSE qu’il accuse de s’incruster en intrus dans un secteur qui a ses règles.
Depuis quelque temps, la CCBM est au centre d’une polémique à propos d‘un important marché de fourniture de véhicules. Qu’en est-il exactement ?
Comme vous le savez, CCBM est aujourd’hui le 3e concessionnaire de véhicules automobiles, mais le premier en termes d’investissements, puisque nous avons érigé au Sénégal une usine de montage de véhicules, qui fait travailler 300 personnes, qui a une capacité de production de 400 véhicules. Et avec un investissement de 15 milliards, nous pouvons bien prétendre à un dynamisme économique, un dynamisme commercial. Importer des véhicules pour les revendre, c’est bien plus facile, mais quand votre ambition vous pousse à investir dans une usine de montage, vous vous battez pour des campagnes. Et concernant ce marché dont vous parlez, nous avons constaté que si tout se passait normalement, nous devrions l’emporter.
Sur quoi vous basez-vous pour dire qu’il y a du favoritisme dans ce marché ?
Tout le monde a constaté que le concurrent contre lequel on se bat et que je ne veux pas nommer n’est pas un vendeur de véhicules…
Mais il faut quand même le nommer pour clarifier les choses, puisque tout le monde sait qu’il s’agit de Cheikh Amar.
Je peux bien le nommer, si vous voulez. Et je le nomme, car quand je fais des recours, je dis bien que TSE n’est pas un vendeur de véhicules, qu’il est inconnu au bataillon car n’ayant rien fait au Sénégal qui puisse le faire considérer comme tel. Ce qu’il fait, c’est de traiter directement avec l’Etat, duquel il tire cent pour cent de son chiffre d’affaires. Alors que nous, nous sommes une entreprise ouverte à tout le monde, qui ne se base pas uniquement sur l’Etat. Et aujourd’hui, par deux fois, nous avons vu des marchés d’automobiles catastrophiques, qui ont terni l’image de la profession.
Regardez les voitures de marque Tata qui circulent, elles n’ont pas de pièces détachées, elles ne sont même pas immatriculées et n’ont pas de papiers. La dernière livraison de véhicules Foton, c’est lui qui l’a faite, mais il ne les a pas achetés chez le fabricant, car, partout dans le monde, les fabricants ne vendent qu’aux concessionnaires. Il est possible de passer par les marchés parallèles et c’est par là qu’il est passé pour acheter récemment les 600 véhicules en question. Car pour cette marque Foton, nous représentons les volets agriculture et camion et tout ce qui détériore l’image de la marque nous concerne. C’est ainsi que nous l’avons même assisté dans la mise à disposition de pièces de rechange et pour faire l’entretien de ces véhicules. Et cela, la police et la gendarmerie peuvent en témoigner. Les véhicules achetés par TSE en 2012, en dehors d’aucun appel d’offres, l’entretien s’est fait chez CCBM.
Mais comment concevoir que CCBM puisse importer et vendre des véhicules et pas TSE ?
La vente de véhicules obéit à des règles, comme tout autre secteur. Pour être docteur et soigner, il faut avoir les compétences et le matériel. On ne dit pas que TSE ne peut pas vendre des véhicules ; par contre, il doit respecter les normes, c’est-à-dire satisfaire aux exigences du cahier de charges, base de l’appel d’offres. C’est ce cahier de charges qui dit que pour souscrire à cet appel d’offres, il faut avoir un garage, avec un personnel qualifié, il faut avoir les pièces détachées pour le matériel proposé, il faut avoir un camion de dépannage. Tout cela, pour protéger l’acheteur. Mais si on ne tient pas compte de tout cela, avons-nous besoin de 300 personnes pour seulement acheter et vendre ? Je crois que 2 personnes y suffisent largement. Cela ne favorise pas l’emploi et si on parle aujourd’hui de Sénégal émergent, il doit reposer sur la production et l’emploi.
Vous voulez dire que le Sénégal n’a pas encore pris le départ de l’émergence ?
Nous voulons simplement attirer la très haute attention de Monsieur le président de la République lui-même qui nous a confirmé à 2 reprises, en Chine et le jour de la Korité, qu’il lancera un appel d’offres en vue de marquer une nette rupture avec le passé.
Cette fameuse usine de montage n’apporte pas encore de plus-value, l’on dit même qu’il n’y a pas grand-chose là-bas.
Rumeurs que tout ça. L’ARMP (l’Autorité de régulation des marchés publics) l’a visitée. Le Ministre de l’Industrie d’avant, (Abdoulaye Baldé), est venu la visiter, le ministre Thierno Alassane Sall l’a visitée et on ne peut douter de son existence. Il en est de même du Directeur de Cabinet de Monsieur le président de la République, alors Directeur Général des Douanes.
Elle existe, oui, mais est-elle fonctionnelle ?
L’usine n’a pas encore atteint sa vitesse de croisière si l’on sait qu’elle ne réalise que 400 unités soit sa production mensuelle. Un investissement de cette nature ne peut prospérer sans le soutien de l’Etat. Aujourd’hui l’usine bat de l’aile avec pour conséquence une menace sur ses 300 emplois. Comme vous le savez, partout dans le monde, l’industrie automobile est soutenue par l’Etat qui est le plus grand acheteur. A titre illustratif, le Président Obama a remis General Motors sur les rails par l’injection de capitaux publics et la commande d’Etat.
Quels genres de véhicules y monte-t-on ?
On monte beaucoup de types de voitures, il y a quatre à cinq gammes. Nous sommes prêts à organiser une visite des lieux pour la presse. Elle se rendra compte que la qualité de nos véhicules ne souffre d’aucune contestation. Nous sommes fiers d’avoir comme partenaire technique la Chine, 2ème puissance économique mondiale et dont les véhicules sont plus achetés par les Européens en raison du meilleur rapport qualité/prix. Aujourd’hui, tout le monde reconnaît que l’arrivée de CCBM dans le secteur de l’automobile a fait baisser le prix de cet outil, comme il l’a déjà fait pour les téléviseurs. Nous ne demandons pas à être favorisés, mais si l’Etat nous avait donné juste ce à quoi on a droit, je vous dis que dans le budget de 2013, il aurait économisé quelque 6,3 milliards de F CFA.
Comment cela ?
Il y a des marchés où on est moins-disant et que l’Etat a attribués à d’autres. Mais nous comprenons de mieux en mieux que c’est sur des détails que nous avons été éliminés comme l’interprétation d’un catalogue fourni dans le cadre du marché des 615 véhicules. L’autorité contractante, à la demande de l’ARMP a même saisi notre partenaire en vue de certifier l’authenticité du catalogue que j’ai fourni.
Elle oublie ou ne nous reconnaît pas notre statut industriel alors que nous avons joint au dossier l’attestation délivrée par le Ministère d’Industrie. Il nous paraît plus simple de solliciter la présentation physique d’un échantillon. L’autre partie n’est pas en mesure de satisfaire cette exigence.
Aujourd’hui, on a comme l’impression que CCBM ne gagne plus de marchés, ou qu’il en gagne de moins en moins. Au fond n’est-ce pas cela qui vous frustre ?
Au contraire. Les seuls marchés que j’ai gagnés sont ceux qui m’ont apporté le plus de problèmes. Ce sont les 150 voitures de l’Assemblée nationale et les 100 véhicules du Sénat. Et peut-être quelques voitures achetées par Abdoulaye Wade et qui ont suscité la polémique. Mais, depuis lors, j’ai vendu plus de 7 000 véhicules, donc, ce ne sont pas ces marchés-là qui me font vivre.
Mais je dois à la vérité de dire que même les agents du ministère des Collectivités locales peuvent témoigner qu’avec ce marché, au départ, ils ont voulu en faire un appel d’offres restreint, mais je les ai déconseillés de le faire, car pour un marché de cette importance, il faut un appel d’offres ouvert. Ce que je voulais éviter, c’est ce qui m’est arrivé avec le marché de l’Assemblée et dont tout le monde parle. Aujourd’hui, en 2014, l’Etat a lancé 158 appels d’offres, CCBM a gagné les 43 et en a perdu 58, le reste n’est pas encore dépouillé. Cela veut dire qu’avec notre expérience, notre professionnalisme, nous gagnons 50% de ce qui est dépouillé. J’explique qu’entre 2013 et 2014, nous avons gagné plus de marchés qu’en 2011 - 2012.
Ah bon ! Plus de marchés aujourd’hui qu’en 2012 ?
Je vais vous expliquer. Le plus grand achat de véhicules de l’Etat, qui est effectué par la DMTA, nous l’avons gagné en 2012, nous l’avons gagné en 2013 et nous sommes en bonne position pour le gagner cette année. Et ça, c’est un marché très ouvert, pour tout le monde.
Alors de quoi vous plaignez-vous ?
Ce n’est pas que je me plaigne, mais c’est un combat sur des principes. Je défends des principes. Le premier principe est l’entreprise nationale, car on ne peut comprendre avoir des usines où travaillent des fils du pays, qui y montent des véhicules moins chers et ayant montré ses preuves, et qu’on aille importer des véhicules qui n’ont jamais roulé au Sénégal et dont le vendeur ne dispose pas de garage.
Le second principe est lié aux qualifications requises d’un service après-vente, dont on a fait fi pour octroyer le marché à quelqu’un qui ne l’a pas. Et ce n’est pas moi seul, c’est toute la profession qui dit que si quelqu’un n’a pas les qualifications requises, nous le combattrons ensemble. S’il pense vraiment que je suis capable de manipuler les concessionnaires, manipuler le Forum civil, alors il doit faire très attention à moi. Et puis, il est en train de faire un amalgame très grave, car lorsque le président de la République est allé en Chine, lui et un autre patron d’une organisation que je ne veux pas nommer ont fait leur show en amenant des véhicules qu’ils lui ont présentés, ce qui a du reste beaucoup fâché le protocole et l’ambassade.
Quand on a vu ça, on est allé voir le Président pour lui dire qu’il y a des sociétés installées au Sénégal ; alors il nous a affirmé que ce marché ne se fera qu’après appel d’offres et j’ai été très content de constater que la rupture prônée n’est pas un vain mot. Certains disent : oui, Serigne Mboup avait tout gagné du temps d’Abdoulaye Wade. Je dis que j’ai gagné parce que c’étaient des gré à gré, qui sont prévus par la loi. Mais si aujourd’hui, l’Etat, le Président (Macky Sall) lui-même décide qu’il veut faire la rupture, il veut tout passer en appels d’offres, nous applaudissons, c’est beaucoup plus clair pour nous. Le Président l’a réaffirmé et il l’a montré. Le cahier des charges a été clairement libellé et il n’y avait rien à redire. Le seul doute, c’est qu’il est inconcevable, dans une course de chevaux pur-sang, qu’un âne arrive en tête, ce n’est pas possible et c’est ce qui nous gêne.
L’âne parmi les chevaux pur-sang, c’est donc TSE ?
Je ne dirais pas cela. Mais c’est une course de chevaux pur-sang qu’un âne vient de remporter. Et il n’y a rien de péjoratif dans le terme âne et j’aurais pu choisir autre chose. Même que l’âne peut servir d’emblème, comme pour l’équipe de basket des Etats-Unis. Je veux simplement dire que dans une course où sont alignés des chevaux pur-sang, si un baudet arrive à gagner, c’est qu’il y a anguille sous roche.
Je crois que vous êtes là dans les insinuations. Ne pouvez-vous pas parler plus clairement ?
J’ai été très clair. Ce qui est dit n’a que peu d’importance, c’est la compréhension qu’on en a qui importe. Donc, c’est comme vous l’avez compris.
Mais pourquoi dans un débat pareil, les organisations patronales n’interviennent pas ?
Bien sûr qu’elles sont intervenues. Le Sénégal est un pays qui dit vouloir émerger. Et pour émerger, il faut la transparence. Et la transparence, c’est gagner des points dans le Doing Business. Je sais que l’Etat se plaint quelquefois des tiraillements entre opérateurs sénégalais sur les marchés publics, ce qui retarde l’exécution de ces derniers, mais nous pensons que sil y a la transparence, tout ira très vite. L’exemple, c’est au niveau électoral. Il y avait plein de contestations autrefois, mais depuis que le code électoral est des plus transparents, on n’entend plus de contestations.
Donc pour toi, le problème, c’est la transparence ?
Dans ce dossier-là, on n’en a pas encore terminé. La transparence est en cours. Il y a eu des recours, rien n’est encore définitif. Mais je dis une transparence totale sur toute possibilité de recours. Et puis l’ARMP et la DCMP, que tous les pays d’Afrique viennent copier, doivent préserver leur crédibilité et se blinder contre toute forme de pression, surtout venant de ceux qui se prévalent d’une proximité avec le chef de l’Etat ou une autre autorité. En définitive, nous pensons que cette affaire doit servir de leçon, car dans ce pays, on ne sait plus qui est qui. Il y a des faux journalistes, des faux experts comptables, des faux médecins, etc. Il faut donc qu’on réglemente tous les secteurs afin que ceux qui évoluent soient bien ceux qui doivent, si rien n’est fait, le faire et qu’ils respectent la réglementation.
Si on laisse chacun faire ce qu’il veut, ce sera l’anarchie. Serigne Mboup s’y adaptera et fera comme tout le monde, en fermant ses entreprises et en n’employant que 2 personnes pour acheter et vendre. Mais vous savez que l’entreprise TSE est dirigée par quelqu’un dont l’entourage est formé d’hommes de médias. Il achète tous les organes de presse. Je ne parle pas de corruption, mais de contrôle. Il a plusieurs organes, connus comme inconnus, il est partout. Dans quel but tout cela ? Il est en train de vouloir cacher des choses. Comment peut-on détenir 40% d’une entreprise et s’offusquer d’un reportage de ladite entreprise jusqu’à menacer de faire couler celle-ci ?
Vous faites allusion au Groupe Futurs médias ?
Voilà. Il n’a pas participé à la création de Groupe de presse pour faire vivre les médias mais plutôt pour faire du lobbying. Ça, nous pouvons le faire. Je ne voulais pas le faire, mais il nous pousse à le faire et je vais le faire. S’il faut se donner des coups, je suis prêt. Je ne vais pas l’offenser, mais que lui aussi ne m’offense pas. S’il le fait, je porte plainte contre lui, comme je l’ai déjà fait. Mais rien n’empêche qu’on dise aux Sénégalais que telle entreprise est en train de détruire telle activité économique. On se bat aujourd’hui parce qu’il a détruit l’activité économique du tracteur.
Comment a-t-il détruit l’activité économique du tracteur ?
Il ne prend pas de risque comme nous en prenant un crédit bancaire, en allant acheter ses tracteurs, les exposer en showroom, vendre aux populations ou à l’Etat. Là il y a des risques. Mais attendre que l’Etat vous fasse des commandes, pour aller négocier avec les Chinois, c’est trop facile. L’Etat emprunte ou sort l’argent, vous dites que vous êtes le concessionnaire. Alors que vous n’avez pas d’espace, vous n’avez rien. On l’a vu avec les tracteurs, bien que ce soit le passé.
Quand l’Etat dit qu’il donne gratuitement des tracteurs, c’est la mort complète de l’entreprise. Dites-moi, quel département de matériel agricole d’entreprise fonctionne aujourd’hui ? Il n’y en a pas. Equip Plus, Matforce, tous leurs départements ne fonctionnent plus. Et la personne favorisée, si vous allez chez lui pour acheter un tracteur, il n’en a pas, il fait des coups pour s’en sortir. Il y a aussi l’engrais. Et le ministre de l’Agriculture ( Benoît Sambou), il n’y a pas longtemps, a sorti un certain nombre de marchés fictifs.
Mais ne défendez-vous pas souvent l‘entreprise locale sénégalaise ? TSE n’en est-elle pas une ?
On parle de règlementation. On m’a donné une fois un marché. Je me suis battu pour monter un service après-vente, monter une usine. Mais quelqu’un, un vrai Sénégalais à qui on a donné un marché d’engrais pendant 10 ans, des marchés de tracteurs pendant 10 ans, des villas pour l’OCI, des bureaux pour l’ARTP et qui aujourd’hui n’est pas prêt, n’investit rien, ne prends aucun risque, c’est grave. Ce n’est pas une question d’entreprise. C’est une question de fonds dont on ne voulait pas parler.
Mais aujourd’hui, il est en train de détruire les entreprises, de détruire l’emploi et lui-même ne peut pas se prévaloir de 20 emplois au niveau de la Caisse de sécurité sociale, je ne parle pas des 20 personnes qui l’entourent et qui chantent ses louanges. Je veux dire que la réalité d’une activité n’existe pas. Je défie quiconque de me montrer 20 personnes employées et dont les cotisations sont payées normalement au niveau de TSE ; cela n’existe pas. Qu’on me montre un investissement que TSE est en train de faire, un immeuble, une usine, cela n’existe pas. Allons voir pour les phosphates, il n’y a rien là-bas, alors qu’on nous montre toujours des publicités vantant les milliards USD d’investissement. L’Etat n’a qu’à aller voir ce qui se passe là-bas, il n’y a rien.
Mais quand même, que votre différend se ressente jusqu’à Touba, n’est-ce pas excessif ?
Je ne voulais pas parler de Touba, parce que nous sommes tous des talibés. Mais, quand même, il y a une chose importante à relever : il y a mouride et mouride. Moi je suis né mouride. Donc je ne suis pas étranger à Touba.
Mon appartenance à la confrérie remonte à plusieurs générations.
Ma grand-mère maternelle, Mariama DIAKHATE, issue de Mbakol est apparentée à Serigne Touba.
Mon grand-père maternel, Assane DIENG est oncle de Serigne Cheikh Awa Balla MBACKE.
Ma grand-mère paternelle Sokhna LO est de la lignée de Serigne Touba.
Mon grand-père Makhtar MBOUP est apparenté à Serigne Mbacké Madina dont son fils aîné, Serigne Cheikh BOMBALY MBACKE qui épousa ma mère après le décès de mon père.
Des gens plus fortunés que Cheikh Amar font à Touba ce dont personne n’entend parler. Nous-mêmes faisons à Touba plus qu’il ne fait, sans bruit. Nous n’avons jamais introduit à Touba une chose qui y est interdite, nous ne fumons ni ne buvons de l’alcool, donc nous pouvons fréquenter toutes les bonnes maisons de Touba. Ce qui s’est passé, c’est quoi ? La maison de Serigne Sidy Mbacké, c’est la mienne. J’ai ma sœur qui y est mariée et j’y séjourne depuis 10 ans.
Je suis donc allé présenter mes respects au marabout, qui m’a ensuite mis avec quelqu’un pour me conduire au salon. Là, devant la porte, j’ai trouvé deux personnes qui m’interdisent l’entrée, à mon grand étonnement. J’ai alors demandé qui était dans ce salon et on m’a répondu Cheikh Amar. C’est là que j’ai insisté pour entrer parce que c’est ma maison. Et quand le brouhaha s’est estompé et que je suis entré dans le salon, je ne me suis pas gêné pour dire mes quatre vérités à Cheikh Amar, je ne suis pas son égal, car je suis plus âgé et plus expérimenté que lui. C’est lui qui vient me voir, que j’ai besoin de lui ou qu’il ait besoin de moi. J’ai déploré qu’un maire de Touba, disciple du marabout, laisse aux gardes de corps d’autrui le soin de réglementer les entrées et sorties dans la maison de son guide. Mais en définitive, j’ai été satisfait, puisque quand je suis allé en parler au marabout, il est allé leur remonter les bretelles, leur disant que la sécurité des lieux lui incombait.
En tout cas, moi Serigne Mboup et d’autres, nous allons nous ériger en bouclier pour barrer la route à tous ceux qui profitent de Serigne Touba rien que pour traficoter. Barrer la route aux escrocs, parce qu’on a vendu à feu Serigne Saliou des tracteurs qu’il a payés cash (donc qu’on ne lui a pas offerts) et dont aucun ne fonctionne aujourd’hui. Je défie quiconque de me prouver que les tracteurs de TSE fourgués à Serigne Saliou marchent, car un tracteur a une durée de vie de 25 ans, 30 ans.
Cela n’a pas fait 10 ans et aucun tracteur ne fonctionne. En plus, les 1 500 tracteurs qu’il avait fournis à l’Etat et qui ont été distribués aux paysans, aujourd’hui, ceux qui sont en panne, leurs propriétaires n’ont nulle part pour trouver des pièces détachées ou les y faire réparer. L’engrais, c’est le même problème. Donc je pense qu’il est grand temps qu’on découvre le vrai visage de la personne au grand jour. Si l’Etat veut l’aider, qu’il le fasse et que lui, de son côté, fasse correctement son boulot, dans les règles de l’art, de manière exemplaire aux yeux des Sénégalais.
Mais le conflit qui divise Serigne Mboup et Cheikh Amar n’est-il pas sorti du cadre du business pour devenir personnel ?
Un conflit on peut l’ouvrir, mais on n’en détermine pas les limites.
C’est donc la guerre.
Non, ce n’est pas la guerre entre individus, mais la guerre sur des principes. A l’origine, c’était une affaire d’attribution de marché, mais il l’a transféré sur le champ de la presse ensuite de la confrérie mouride, ce qui n’est pas bien. Car si moi Serigne Mboup j’étais au courant que Cheikh Amar était présent chez le marabout, que ce dernier me le demande ou non, j’aurais pu m’occuper à servir Cheikh Amar, sans problème. Et si j’ai insisté pour entrer dans un lieu où il se trouvait, c’était pour lui faire comprendre qu’il faut qu’il arrête ça. Et même dans l’affaire de Dangote, il a créé une situation semblable en mettant en avant une personne, Cheikh GADIAGA, qui avait affirmé que Serigne Modou MBACKE n’est pas fils de Serigne Sidy chez qui lui Cheikh AMAR était. Pour une autre affaire de tentative de corruption envers l’ex-Premier Ministre, Mme Aminata TOURE, Cheikh GADIAGA est aujourd’hui en prison. L’acteur principal Cheikh AMAR n’est pas toujours inquiété.
Il veut apparaître comme l’argentier du mouridisme, c’est inexact. Beaucoup font plus que lui sans tambour ni trompette. Il cherche à faire croire qu’il a la bénédiction et la protection de Touba. C’est encore inexact. Serigne Touba ne protège personne qui ne soit dans le droit chemin.
Parce que le mouridisme, c’est pour tous les mourides, arrêtons d’y jeter du sable, de créer des conflits à Touba, comme de s’entourer de 20 gardes du corps alors que la sécurité n’y manque pas. En tout cas, moi, Serigne Mboup, on ne me voit pas avec des gardes du corps, surtout à Touba.
Je vais finir par citer trois versets du Coran :
Le premier dit que si vous devez arbitrer entre deux personnes, soyez équitable sinon vous allez priver à une personne son dû.
Dans le Coran, il est aussi écrit « qu’il ne faut pas trouver un édifice qui est bien construit et le détruire sans raison valable ».
Et enfin, « il ne faut jamais obstruer un chemin par où doit passer le plus grand nombre ». Je vous laisse méditer.