L'opposant kenyan Raila Odinga en pole position
À moins d'un an de la fin du mandat de Moussa Faki Mahamat à la présidence de la Commission de l'Union africaine, les candidatures pour sa succession se précisent. Raila Odinga, chef de file de l'opposition au Kenya, émerge comme le favori, bénéficiant de soutiens stratégiques pour occuper ce poste crucial. L'élection, prévue lors du 38e Sommet de l'UA en février 2025, se déroule dans un contexte de défis majeurs pour le continent africain.
Alors que le mandat de Moussa Faki Mahamat à la présidence de la Commission de l'Union africaine touche à sa fin en février 2025, les spéculations sur son successeur vont bon train. Parmi les candidats potentiels, le nom de Raila Odinga, figure emblématique de la politique kényane, se détache avec force. Soutenu par des alliés influents et armé d'une solide expérience politique, Odinga semble prêt à prendre les rênes de cette institution panafricaine, à un moment crucial de son histoire.
Le parcours de Raila Odinga
Raila Odinga, âgé de 79 ans, n'est pas un nouveau venu sur la scène politique africaine. Chef de l'opposition kényane et ancien Premier ministre, il possède une vaste expérience et une profonde compréhension des dynamiques politiques africaines. Plusieurs fois candidat à l'élection présidentielle, le fils d’un ancien compagnon de Jomo Kenyatta, père de l'indépendance kényane, n’a jamais pu atteindre la magistrature suprême. Son engagement pour la démocratie et la gouvernance en Afrique de l'Est a été largement reconnu. Maintenant, il aspire à apporter cette expertise à la Commission de l'Union africaine (UA).
Le soutien de William Ruto, président du Kenya, constitue un atout majeur pour Odinga. En effet, Ruto et Odinga, autrefois rivaux politiques, ont trouvé un terrain d'entente pour cette candidature. En février dernier, une rencontre stratégique avec le président ougandais, Yoweri Museveni, a renforcé cette alliance. De plus, lors d'une visite d'État en avril, Odinga a obtenu le soutien du Ghana, un acteur influent en Afrique de l'Ouest. Ces alliances stratégiques augmentent ses chances de succès.
Les autres prétendants au poste de président de l'Union africaine
Plusieurs autres noms circulent, dont celui de l’ancien ministre des Affaires étrangères de l’Union des Comores, Souef Mohamed El-Amine. Maîtrisant quatre des langues officielles de l’UA (anglais, français, swahili et arabe), l’actuel représentant spécial de la Commission de l’UA et chef de la Mission de maintien de la paix en Somalie se verrait bien succéder à celui qui l’a nommé à ces postes en septembre 2022. Ce diplomate chevronné sait pouvoir compter sur le soutien d’Azali Assoumani. Pour faire la différence, Souef Mohamed El-Amine compte mener un intense lobbying auprès des institutions dont l’Union des Comores est membre, de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) au Marché commun de l’Afrique orientale et australe (Comesa), sans oublier la Ligue arabe et la Commission de l’océan Indien (COI).
Parmi les autres prétendants les plus régulièrement cités, figurent le ministre djiboutien des Affaires étrangères, Mahmoud Ali Youssouf, qui aura 59 ans en 2025, ainsi que l’ancien chef de l’État malgache, Hery Rajaonarimampianina. Âgé de 66 ans l’année prochaine, ce dernier a déjà confirmé sa volonté de se présenter, mais attend toujours le soutien officiel de son successeur, l’actuel président Andry Rajoelina.
Les défis du nouveau secrétaire général de l'Union africaine
Le prochain président de la Commission de l'UA devra naviguer dans un environnement complexe marqué par des crises politiques et sécuritaires. La situation au Soudan, les conflits en Éthiopie, la stabilité en République démocratique du Congo (RDC) et les tensions dans le Sahel central exigent une attention urgente et des solutions innovantes.
En outre, le conflit anglophone au Cameroun et les dynamiques politiques en Somalie et au Soudan du Sud nécessitent un engagement renouvelé de l'UA.
L'Union africaine doit réinventer ses approches pour gérer les crises de gouvernance. Le Soudan est un exemple flagrant où l'UA peut jouer un rôle décisif pour restaurer la stabilité. En renforçant ses mécanismes de prévention des conflits et de médiation, l'UA peut aider à restaurer la paix et la stabilité dans des régions troublées.
Résoudre les conflits en Éthiopie et en RDC
Le conflit dans la région du Tigré en Éthiopie reste une préoccupation majeure. Le prochain président de la Commission devra intensifier les efforts diplomatiques pour faciliter un dialogue inclusif entre les parties prenantes. Une résolution pacifique du conflit est essentielle pour la stabilité de la Corne de l'Afrique.
La RDC est un autre défi de taille. Les conflits persistants dans l'est du pays nécessitent une intervention robuste et coordonnée. L'UA devra travailler étroitement avec les acteurs régionaux et internationaux pour promouvoir la paix et le développement durable.
Le Sahel central et le conflit anglophone du Cameroun
Les crises au Mali, au Burkina Faso et au Niger exigent une diplomatie active. L'UA doit renforcer ses partenariats avec des organisations régionales comme la CEDEAO pour élaborer des stratégies de stabilisation et de développement. Au Cameroun, le conflit en cours dans les régions anglophones du pays nécessite une attention accrue. Le prochain président de la Commission devra inscrire ce conflit à l'agenda de l'UA et encourager des pourparlers de paix inclusifs.
Partenariat avec la Somalie et élections au Soudan du Sud
La Somalie, en transition politique et sécuritaire, a besoin d'un soutien continu. L'UA doit renforcer son partenariat avec la Somalie pour aider à consolider la paix et la reconstruction. Avec des élections prévues au Soudan du Sud, l'UA doit intensifier son soutien pour garantir des élections libres, justes et transparentes. Le renforcement des institutions démocratiques sera crucial pour la stabilité future du pays.
La présidence de la Commission de l'UA n'est pas seulement un poste honorifique ; elle est cruciale pour l'orientation et l'influence de l'UA sur la scène internationale. Raila Odinga, avec son expérience et ses alliances stratégiques, apparaît bien placé pour relever ces défis. Sa capacité à mobiliser des soutiens et à naviguer dans des eaux politiques complexes sera déterminante pour son succès.
L'élection du président de la Commission de l'UA lors du 38e sommet de l'Union en février 2025 sera un moment décisif pour le continent africain. Avec des enjeux aussi élevés, le rôle de Raila Odinga en tant que candidat principal est scruté de près. Son élection pourrait marquer un tournant dans la gestion des crises et le renforcement de la gouvernance en Afrique.
AMADOU CAMARA GUEYE