L'assaut de Samsung pourrait obliger Apple à revoir sa stratégie
Avec le Galaxy S4, son nouveau smartphone doté d'un écran plus grand et de nouvelles fonctions, Samsung Electronics pourrait contraindre Apple à revoir ses habitudes pour accélérer le rythme d'évolution du design de ses produits et s'aventurer vers des appareils moins onéreux.
La dernière version du combiné vedette du fabricant sud-coréen, dévoilée en grande pompe jeudi à New York, surclasse l'iPhone sur la plupart des caractéristiques techniques. Mais le défi qu'il représente pour le groupe à la pomme ne se résume pas à cet aspect. Si Charles Golvin, analyste chez Forrester, juge qu'"il serait exagéré de dire qu'Apple est loin derrière", le groupe de Cupertino va devoir tenir compte de l'accélération du rythme de lancement d'appareils concurrents.
"Le point sur lequel Apple doit s'attacher à réagir est sa propre cadence de sortie" de nouveaux combinés, estime cet analyste. Selon lui, l'approche du groupe californien -une révision complète de la conception de l'iPhone tous les deux ans avec entre-temps des modifications annuelles plus anecdotiques- "ne représente pas un rythme suffisant pour qu'Apple se maintienne au premier plan de l'innovation dans les smartphones aujourd'hui." Un avis partagé par Brian White, analyste chez Topeka Capital Markets. Tout en considérant que le Galaxy S4 représente une avancée mais ne change pas véritablement la donne, il estime que la technologie des smartphones évolue tellement rapidement que le cycle de vie de l'iPhone constitue désormais un handicap pour Apple.
INVESTIR DE NOUVEAUX MARCHÉS
L'évidente facilité avec laquelle Samsung vient affronter son concurrent dans les smartphones haut de gamme pourrait donc pousser le géant américain à enfin se décider à venir en découdre dans les combinés d'entrée de gamme. Le succès enregistré jusqu'ici par Samsung avec sa gamme Galaxy représente un sérieux problème pour Apple, selon Ben Reitzes, analyste chez Barclays, qui s'attend à ce qu'un iPhone plus abordable soit lancé cet été au niveau mondial.
De nombreux analystes voient cette éventualité comme le meilleur moyen pour Apple de faire son entrée sur des marchés à forte croissance comme l'Inde et la Chine, alors que le segment des smartphones haut de gamme est proche de la saturation. Mais un tel combiné pourrait cannibaliser la demande pour l'iPhone "classique" et rogner les marges du groupe.
Pour Brian White, la nécessaire diversification d'Apple doit donc se faire non seulement via un élargissement de l'offre de smartphones mais aussi par des incursions dans de nouvelles catégories de produits comme la télévision, une éventualité qui a régulièrement fait l'objet de rumeurs, ou encore la "montre intelligente" évoquée le mois dernier dans les médias américains. "Ils ont tous les ingrédients de la potion magique, à savoir l'écosystème matériel-logiciels", explique-t-il. "Tout ce qu'ils ont à faire c'est de prendre cette potion et de l'injecter dans un autre segment du marché de l'iPhone."
La mainmise qu'Apple exerce sur son écosystème -avec une complémentarité entre les appareils, les services et les logiciels qu'il fournit et un contrôle étroit des applications proposées dans son App Store- apparaît comme l'un de ses plus grands atouts. Son rival sud-coréen tente d'ailleurs d'imiter ce modèle, moyennant des investissements plus conséquents dans les logiciels et la connectivité. Ainsi, à la différence des autres fabricants dont les appareils fonctionnent avec le système d'exploitation Android de Google, Samsung met l'accent sur sa propre plate-forme mobile "Samsung Hub" plutôt que de promouvoir la boutique en ligne du géant de l'internet, Google Play.
SORTIR DE L'ORNIÈRE
Quelle que soit l'approche choisie, bon nombre d'analystes jugent qu'il est désormais temps pour Apple de répliquer fermement à Samsung et à ses autres concurrents, qui détournent de plus en plus une attention que le groupe californien était habitué à monopoliser. Car Wall Street reste à l'affût du prochain iPhone, mais les attentes d'un nouveau modèle se font moins pressantes que par le passé.
Après une série de revers, le titre Apple accuse une baisse de près de 30% depuis son plus haut historique de 705,07 dollars du 21 septembre dernier. Les ratés du service de cartographie du groupe, qui avaient suscité le mécontentement des utilisateurs et entraîné, fait rarissime, des excuses publiques de Tim Cooks, se sont ajoutés à la publication d'une série de résultats inférieurs aux attentes des analystes. Malgré le succès de l'iPhone, dont les ventes sont passées de 40 millions d'unité au cours de l'exercice fiscal 2010 à 125 millions pour l'exercice 2012, Samsung est devenu l'an dernier le numéro un mondial des smartphones, avec une part de marché de 30,3% contre 19% pour le groupe à la pomme.
La progression fulgurante de Samsung s'explique notamment par le fait qu'à la différence d'Apple, le sud-coréen inonde véritablement le marché avec des appareils allant de l'entrée de gamme à des produits plus luxueux, qui sont par ailleurs déclinés selon les différentes zones géographiques, avec près d'une quarantaine de versions adaptées aux goûts des consommateurs locaux.
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