Près de 8 000 000 d'ha de terres entre les mains des investisseurs étrangers
Des études faites en 2012 et présentés hier par la Coalition pour la Protection du Patrimoine Génétique Africain (COPAGEN) ont montré qu'environ 8 000 000 d'ha de terres, recensés dans les neuf pays de l’Afrique de l’Ouest, sont au main des investisseurs.
Selon le point focal régional de COPAGEN, Francis Ngang, dans la majorité des cas rencontrés, les ententes sont conclues entre l’État, les sociétés et les autorités coutumières, avant d’en informer la population. ''A partir des preuves et des données accumulées jusqu’à aujourd’hui, il est clair que nous sommes confrontés, non pas à des acquisitions massives des terres, mais à des accaparements'', déplore M. Ngang.
Il signale que des communautés paysannes affectées par ces acquisitions ne sont pas consultées ou même informées. Plus préoccupant, dit-il : ''Nous avons découvert que, dans la majorité des cas, les contrats, ententes ou baux signés concernant la cession ou l’achat de terre sont cachés, inaccessibles et souvent nébuleux.''
De manière générale, l'étude révèle un amenuisement des terres cultivables pour la culture vivrière, un changement au niveau des régimes alimentaires des populations locales et des impacts environnementaux qui influencent négativement les productions agricoles.
Au regard de ces constats, COPAGEN suggère qu’il y ait un moratoire complet sur la problématique de l’accaparement des terres ; un audit national mené par les États sur les accaparements, un accès à l’information sur les contrats et transactions, une réorientation des investissements agricoles, en vue de soutenir l’agriculture familiale. Dans l'optique d’arriver à l’atteinte d’une véritable souveraineté alimentaire.
PROJET SENHUILE-SENÉTHANOL Certains responsables ont un passé douteux La COPAGEN a publié un rapport d’enquête sur les investisseurs qui sont derrière le projet Senhuile-Senéthanol. Puisque des liens possibles avec le blanchiment d’argent sont soupçonnés dans le montage financier du projet Italo-sénégalais. ''Le contrôle tout à fait en amont du projet est caché derrière une société écran offshore à New York'', dit-on. Tandis que certains responsables ont un passé douteux. ''Benjamin Dummai a un passé douteux, dans la mesure où les autorités brésiliennes l’ont reconnu coupable d’évasion fiscale à un moment de sa carrière et de fraude à un autre. Quant à Gora Seck, il dirige beaucoup de sociétés, y compris dans le secteur minier, dont deux avec un haut responsable du Ministère des Mines'', renseigne le document. En 2010, le conseil rural de Fanaye a affecté 20 000 ha à Senethanol, afin de produire des agrocarburants pour le marché européen. En 2011, le projet a été suspendu par Abdoulaye Wade, après des affrontements meurtriers entre les communautés locales et les forces de l’ordre. Le projet a redémarré en 2012, afin de produire des graines de tournesol à exporter vers l’Italie, sur un autre terrain de 20 000 ha que Macky Sall, par décret, a déclassé dans le réserve de Ndiael, pour une durée d’exploitation de 50 ans. Toutefois, ''la semaine dernière, Gora Seck a déclaré que le projet ''arrête toute activité économique'', afin de se dédier à la production des semences d’arachide pour l’État sénégalais''. Toutes choses qui ont fait sortir le porte-parole du collectif des 37 communautés touchées par le projet, de ses gonds. ''Comment peut-on faire confiance à de tels investisseurs ?'', s'est-il exclamé. Le CRAFS estime qu'il ''est très inquiétant que le gouvernement du Sénégal cherche à confier de plus en plus le développement agricole à des investisseurs étrangers, comme Tampieri et ABE International, au nom de l’intérêt national''. L'organisation ne voit rien de positif pour l’intérêt national dans ce projet. |
AIDA DIENE (STAGIAIRE)