Quand l'avenir ne tient qu'à un bout...
Avec de belles et captivantes images, le réalisateur américain Jérémy Teicher a su partager le vécu particulier de deux jeunes filles peuls. Pour casser le mariage précoce imposé à sa sœur Débo, Coumba doit chercher 200 000 francs Cfa pour rembourser la dot. Alors, elle descend en ville et trouve du boulot...
Deux jeunes filles qui ont la chance d'aller à l'école voient le destin leur jouer un mauvais tour. Débo et Coumba sont sœurs et habitent le village peulh de Sinthiou Mbadane, à quelques encablures de Mbour. Coumba, l’aînée, vient de réussir au Bfem et rentre au village avec sa petite sœur. Elles retrouvent leur grand frère blessé. Silèye, gardant le bétail, est tombé d'un baobab. Leur père, n'ayant pas de quoi payer la facture d'hôpital, décide de donner la plus petite des sœurs en mariage. «Coumba a (déjà) fait des études assez poussées, on doit la laisser poursuivre», a-t-il tranché.
Après avoir tenté, en vain, de dissuader le père, Coumba décide d'agir. Elle part d'abord voir son ancien maître d'école qui lui propose de saisir la gendarmerie. ''Je ne peux pas porter plainte contre mes parents'', lui a-t-elle rétorqué. Puis, elle va chercher du travail en ville pour obtenir les 200 mille francs Cfa de frais d'hôpitaux de son frère. A l'insu de ses parents, elle fait bonne pêche à Mbour. Chaque matin, elle laisse la garde des vaches à l'un de ses amis, va au boulot et revient le soir. La somme rassemblée à force de courage et de va-et-vient n'annule pas cependant le mariage. Coumba s'est-elle battue pour rien ?
Inspirée de faits réels, l'histoire est celle d'un film d'une heure quarante minutes intitulé «Grand comme le baobab». Réalisé par l'Américain Jérémy Teicher, il est en pulaar avec un sous-titrage en anglais et en français. Pour la presse, il a été projeté hier dans l'une des salles de l'ambassade des USA au Sénégal, qui a financé la venue du cinéaste dans notre pays.
La trame est poignante et triste. Au-delà du mariage forcé et très précoce, l'auteur montre également la vulnérabilité des femmes dans certaines sociétés. Car, la maman de Débo, même si elle n'était pas au fond d'accord avec la décision de son mari, n'a pas osé le dire. S'opposer à son mari ne lui a pas une seule fois effleuré l'esprit. Résignation ! Coumba a certes exprimé une opinion contraire, ce qui est déjà téméraire de sa part, mais elle n'est pas allée au bout de sa logique, en portant plainte par exemple.
L'ambassade des USA à Dakar qui a financé le venue du réalisateur à Dakar est d'ailleurs intéressé par le renforcement du leadership féminin. Raison pour laquelle, il soutient cette initiative.
«Grand comme un baobab» sera projeté le 2 décembre prochain au Théâtre national Daniel Sorano en présence du réalisateur et des acteurs. Ces derniers, des non habitués de la caméra, sont originaire de Sinthiou Mbadane et en sont, pour la plupart, à leur première expérience cinématographique. Ce qui se sent par moments dans le jeu. D'autres villes recevront la projection de ce film car la mission diplomatique US à Dakar se dit intéressée par «le renforcement du leadership féminin».
BIGUE BOB