La destination des ressources de l’éducation en question
Il n’est un secret pour personne que le Sénégal injecte beaucoup de ressources dans le secteur de l’éducation. La question qui se pose est de savoir où va l’argent de l’école. Réponse dans le livre blanc que vient de publier la COSYDEP. Un document dans lequel les Inspections d’Académie (IA) et les Inspections de l’éducation et de la formation (IEF) sont pointés du doigt.
La Coalition des organisations en synergie pour la défense de l’éducation publique (COSYDEP) a sorti un livre blanc abordant les différents aspects de la question. Un ouvrage fruit de la synthèse des avis des différents acteurs. La COSYDEP, soulevant des interrogations presque sans réponse, a procédé à un diagnostic et propose des solutions sur tous les points liés à l’école publique. Retenons l’aspect financement. Les différentes couches de la population interrogées se posent la question de savoir où va l’argent de l’école.
Ils partent du principe que beaucoup de ressources sont injectées dans le secteur, mais non seulement il n’y a guère de stabilité (toutes les revendications étant relatives à l’argent), mais l’école elle-même ne répond pas aux besoins de la société. Pourtant, les chiffres avancés par des acteurs bien placés devraient logiquement aboutir à des résultats contraires à ceux d’aujourd’hui. Par exemple, note le livre, un expert prête à l’ancien ministre de l’Education, Ibrahima Sall, des affirmations selon lesquelles 4500 milliards ont été investis dans l’éducation pendant ces dix dernières années. Soit une bagatelle de 450 milliards par an.
Un coordonnateur d’une structure de concertation multi-acteurs dont le nom est tu n’est pas loin de dire la même chose. Il soutient lui aussi que 410 milliards sont dépensés dans le secteur chaque année. Cependant, précise le livre blanc, ‘’ il faut néanmoins noter que, si on se réfère aux travaux des Assises nationales et aux rapports officiels d’exécution de budget du ministère, de tels chiffres sembleraient exagérés, soit relativement aux prévisions (autour de 200-250 milliards par an), soit par rapport à l’exécution (écarts énormes notés entre dotation et exécution jusqu’en 2005/5006)’’.
Quoi qu’il en soit les sommes injectées restent importantes. Or, des pays comme la Gambie qui utilisent moins de ressources produisent de meilleurs résultats. Cet argent arrive-t-il réellement dans le sac de l’élève ? En guise de réponse, la COSYDEP relève que les anciennes autorités, ‘’obsédées par les chiffres, fonçaient la tête baissée’’ dans la construction d’infrastructures, de recrutement d’enseignants et d’achat de matériels pédagogiques, dans l’ignorance absolue de la carte scolaire et de la planification. ‘’Les écoles n’ont pas partout été construites suivant la logique de la pertinence et de l’opportunité’’. Elles l’étaient plutôt sur des considérations politiciennes.
28% des dépenses salariales versés à des non enseignants
La Banque mondiale offre une autre piste. Dans une ‘’Revue des Finances publiques du Sénégal’’ présentée le mercredi 13 juin 2012, l’institution révèle qu’environ 28% des dépenses salariales, soit 54 milliards, servent à payer 5100 agents n’exerçant pas la fonction d’enseignant. En dehors de l’Etat central, les acteurs sur le terrain sont aussi indexés, particulièrement les Inspections académiques (IA), les Inspections de l’éducation et de la formation (IEF) ainsi que les directeurs d’écoles. Les acteurs dénoncent entre autres ‘’l’opacité dans la gestion des ressources additionnelles et des lignes de crédit des IA/IEF’’ et ‘’la non transparence dans la gestion des écoles’’.
Les mécanismes de contrôle étant inefficaces ou tout simplement absents, les populations recommandent l’implication des collectivités locales et des parents d’élèves. Aussi, ils veulent que les IA, IEF et directeurs d’écoles soient obligés à se soumettre à la reddition des comptes. A l’Etat, il est demandé de faire le bon arbitrage des ressources, en mettant surtout l’accent sur des besoins.
BABACAR WILLANE