Hollande préside le débat
Nicolas Sarkozy et François Hollande ont débattu, mercredi 2 mai 2012 en banlieue parisienne, pendant 2h50, sur tous les sujets ou presque abordés pendant la campagne présidentielle. Le tout devant quelque 20 millions de téléspectateurs attentifs au moindre geste. Difficile de déterminer qui a pris l’avantage sur l'autre après ce débat, chacun ayant usé à l’envi de ses propres figures rhétoriques et programmatiques favorites. Mais clairement, Nicolas Sarkozy n’a pas réussi à « renverser la table » comme il l’espérait, trouvant en face de lui un contradicteur de taille. Manuel Valls, le responsable de la communication de François Hollande, souhaitait vivre un débat d'entre-deux-tours digne du combat de boxe Ali-Foreman, en 1974 à Kinshasa. « Ce soir, ce sont les Français qui décident », considérait pour sa part Nathalie Kosciusko-Morizet, la porte-parole de Nicolas Sarkozy, peu avant le début des hostilités. Souvent très technique, dense, et véritablement tendu par moments, l'échange entre les deux finalistes de la présidentielle française a duré 2h50, au lieu des 2h30 prévues. Il n'a pas beaucoup ressemblé à celui d'il y a cinq ans, le contexte étant différent, la crise étant notamment passée par-là. Les deux candidats s'attardant trop longtemps sur tous les sujets abordés, chacun ne voulant pas laisser le dernier mot à son contradicteur, la question du logement est passée à la trappe. Elle est pourtant brûlante. Il a par ailleurs fallu ajouter du temps supplémentaire pour que la question du retrait d'Afghanistan soit abordée, tout comme celle de l'attitude à adopter face aux tensions en Afrique subsaharienne. Ce fut le seul moment apaisé du débat. Le camp de Nicolas Sarkozy espérait voir l'adversaire s'effondrer. S'il n'a pas forcément eu le dessus sur tout, loin s'en faut, François Hollande est néanmoins resté droit dans ses bottes sur chaque sujet, à la hauteur rhétorique de son contradicteur y compris sur l'immigration.
« Je veux que la justice soit au cœur des décisions publiques » (François Hollande)
Cet échange restera surtout comme une opposition de styles. Dès les premières minutes, Nicolas Sarkozy et François Hollande se sont affrontés sur leur conception de la symbolique attachée à la fonction présidentielle. « Je veux que la justice soit au cœur des décisions publiques », a affirmé François Hollande pour se poser en rassembleur. « Le rassemblement est très bon mot, une très belle idée, mais il faut y mettre des faits », lui a rétorqué Nicolas Sarkozy se targant de n'avoir observé aucun excès de violence au sein de la population française pendant son quinquennat, même lors de réformes impopulaires. « Mais heureusement ! », a lâché François Hollande, pour qui les corps intermédiaires, autrement dit les syndicats, doivent être salués pour leur sens des responsabilités pendant la réforme des retraites, en 2010. Sur tous les sujets, les candidats se sont affrontés, projet contre projet, sortant les nombreux arguments qu'ils avaient martelés durant toute la campagne. Compétitivité, emploi, fiscalité, pouvoir d'achat, éducation, immigration, nucléaire, vie publique... ce sont véritablement deux philosophies irréconciliables qui se sont exprimées. Sur l'économie, la vie publique, les questions sociétales comme le droit de vote des étrangers, Nicolas Sarkozy et François Hollande se sont farouchement opposés. Dans cet entre-deux-tours, Nicolas Sarkozy tente d'échapper à la règle électorale actuellement en vigueur en Europe, et qui consiste à voir sanctionnés les sortants aux élections dans cette période de crise majeure. Il a tenté, ce mercredi, de défendre son bilan de capitaine par temps de tempête. Et de réaffrimer ses valeurs, notamment sur le travail, son idée-force majeure. De son côté, François Hollande a tenté systématiquement de ramener le président à son bilan, chiffres accablants à l'appui, bons mots et constats implacables dans sa besace. Il a d'ailleurs souvent fait mouche. Mais le candidat socialiste ne s'est pas contenté de défendre : à une demi-heure du terme du débat, il a aussi attaqué, fermement, en assénant point par point sa conception de ce que doit faire un président, et surtout de ce qu'il ne doit pas faire.
(Rfi)