Des Etats cupides, des populations spoliées
L’appel aux investisseurs étrangers devient une porte ouverte à tout. Dans certains cas, la pertinence des investissements est non seulement douteuse, mais visiblement préjudiciables aux populations et aux autorités locales.
Les politiques des ajustements structurels imposés aux pays africains et la libéralisation des marchés au début des années 1980 ont bouleversé les économies sur le continent pendant des décennies. Devant les situations de crise qui se sont installées, la recherche effrénée d’investisseurs a poussé les gouvernements à tailler leurs lois à la juste mesure des appétits privés étrangers. La terre n’y a pas échappé. Non seulement chaque pays facilite les investissements aux plus offrants, mais fait de son mieux pour être plus attractif que son voisin.
Pour analyser ce phénomène et ses impacts sur les ressources du continent, au cours du panel portant sur ‘’la terre et l’investissement en Afrique’’, Amadou C. Kanouté, directeur de Cicodev, s’est appuyé sur l’exemple des différents codes miniers lancés dans la course à l’attractivité, d’un pays à un autre. Et les multinationales bénéficiaires de ces cadres propices à leurs investissements bafouent les droits des populations autochtones.
Un exemple parlant est celui du village de Khoudia Diène, à quelque 70 kilomètres de Dakar. Une étude montre que des exploitations minières présentes dans cette zone ont été installées sans étude d’impact environnemental. C’est seulement deux ans après leur implantation que les entreprises se sont soumises à cette exigence qui devait être un préalable.
Dans d’autres localités où prospèrent des industries extractives, c’est le montant des indemnités de compensations versées aux populations pour leurs terres perdues qui est tellement dérisoire que les révoltes finissent par s’en suivre. Ce fut le cas à Diogo, dans la région de Thiès, avec l’exploitation du zircon. Ou encore à Ourour, dans la région de Kaolack, où la société African National Oil Corporation (Anoc) a payé 20 000 F par hectare aux paysans, pour entrer en possession de 720 hectares en vue de produire de l’huile de jatropha.
C’est fort de ces constats que les gouvernants africains sont appelés à mettre en place des mécanismes pour sécuriser les terres, mais aussi à imposer la transparence aux investisseurs étrangers. Détenant 50% des terres arables du monde, l’Afrique devrait privilégier les propriétaires de ces terres afin qu’ils puissent devenir investisseurs, soutiennent les acteurs de la société civile. C’est le préalable pour s’assurer une souveraineté alimentaire à courte échéance.
Aminatou AHNE