Un PV signé et ‘’bye bye’’
Beaucoup de tractations pour un procès-verbal. Près de 15 heures de négociations à Dakar avant-hier n’ont pas suffi au Sénégal et à la République islamique de Gambie pour trouver des accords concrets sur les dossiers urgents toujours irrésolus. Pas d’ouverture des frontières, encore moins de pont de Farafenni...pour le moment.
Bonne nouvelle, Dakar et Banjul ont paraphé un PV qui va servir de feuille de route à de futures tractations. Moins bonne nouvelle, les deux capitales excellent toujours dans l’art de différer les échéances. Au mieux, c’est ‘‘d’ici à juillet’’. Au pire, c’est ‘‘dans les meilleurs délais’’ que l’on devrait être édifié sur les neuf points qui ont constitué l’ordre du jour des négociations d’avant-hier. Dans l’immédiat, la réouverture des frontières, qui était le point le plus urgent, ne se fera pas, même si ‘‘la partie gambienne qui a sollicité la reprise du trafic normal’’ est revenu au tarif initial de 4 000 F CFA au lieu de 400 mille. ‘‘Nous allons faire tout notre possible de concert avec les transporteurs et les autres acteurs pour revenir à la situation normale. Dès demain (Ndlr : lundi), nous allons nous y atteler’’, a déclaré le chef de la diplomatie sénégalaise, Mankeur Ndiaye, à la fin des négociations. Maigre consolation pour le voisin gambien qui nourrit des appréhensions avec l’imminence du Ramadan. ‘‘Le président Jammeh est un panafricaniste, et musulman. Le mois béni du jeûne approche est c’est très malheureux qu’il y ait ces frontières fermées’’, a déclaré plus tôt dans la matinée son homologue gambienne, Neneh Mc Douall Gaye.
Sur les huit autres points restants, de timides concessions ont été faites de part et d’autre comme pour donner aux négociations une seconde chance. Transit routier, pont de Farafenni et contrôles juxtaposés, modalités du commerce de réexportation, barrières commerciales, accords de pêches et utilisation de l’espace maritime, migrations et affaires consulaires, coopération et entraide judiciaire, gestion des frontières terrestres se sont terminés par la promesse d’entrevues ultérieures dans les meilleurs délais.
Farafenni, pont d’achoppement ; Boy Djinné ‘‘exigé’’
Si pour la chef de la diplomatie gambienne, Neneh McDouall Gaye, ‘‘cette rencontre a été un grand succès’’, les résultats sont plutôt mitigés. Farafenni constitue toujours ‘’le pont de la discorde’’ entre les deux pays. Les travaux qui devraient en être à leur 18e mois sur 36, en sont toujours à la pose de la première pierre depuis février 2015. Si la ministre des Affaires étrangères gambienne parle de revoir le design pour permettre une navigabilité plus facile sur le fleuve, Mankeur Ndiaye parle d’un financement de la Banque africaine de développement (BAD) déjà bouclé. ‘‘La construction du pont a été décidée d’un commun accord entre les deux pays. La Bad a déjà mis 50 milliards. La Gambie a réaffirmé sa volonté de voir le pont érigé. Au mois de juillet, il y aura une rencontre des experts pour situer les blocages et trouver des solutions aux éventuelles difficultés’’, a-t-il déclaré.
Les derniers développements de l’actualité judiciaire ont aussi amené les deux pays à aborder la coopération judiciaire. Après la détention récente d’une délégation du ministère de l’Environnement en Gambie, et le séjour à Banjul du fugitif sénégalais Baye Modou Fall (Boy Djinné) condamné au Sénégal, la partie sénégalaise a demandé solennellement son extradition afin qu’il puisse purger sa peine ici : ‘‘Nous avons demandé l’extradition de Boy Djinné. La ministre gambienne a pris l’engagement de s’en occuper une fois de retour à Banjul’’, a fait savoir Mankeur Ndiaye. Aussi les deux pays projettent la révision de la convention judiciaire de 1973 en l’étendant à d’autres domaines de coopération, tels que l’assistance aux personnes arrêtées ou détenues et le transfèrement de personnes condamnées.
Accords de pêche : Oumar Guèye à Banjul
La pêche n’est pas en reste, puisque sur invitation de la partie gambienne, le ministre Oumar Guèye devra rencontrer son homologue gambien dans les meilleurs délais. Dans ce volet, le Sénégal a demandé le rétablissement immédiat de la convention sénégalo-gambienne dans le domaine des pêches maritimes dénoncé par la Gambie le 5 janvier 2015 ; l’ouverture de négociations pour la signature d’un nouvel accord et de son protocole d’application ; le respect du droit de passage inoffensif des embarcations de pêche artisanales du Sénégal lors de la traversée des eaux gambiennes ; la levée de l’interdiction de pêche des pirogues sénégalaises sur le fleuve Gambie ; et le rétablissement du coût de la redevance payée par les embarcations sénégalaises de pêche à 300 dalasis. Une convention de transit pour lever les barrières commerciales est également prévue.
Dans le secteur du transport routier aussi, une réunion pour réviser l’accord du 5 octobre 2004 dans les meilleurs délais est prévue. Quant au transit routier inter-Etats, les administrations des douanes des deux pays doivent se voir au plus tard à la fin du mois de juillet, à l’effet de négocier un projet de mémorandum d’entente qui servira de base légale à la facilitation du transit routier. Un observatoire sur les échanges commerciaux visant à garantir le respect des procédures et règles administratives dans les meilleurs délais est également consigné dans le procès-verbal.
OUSMANE LAYE DIOP