La nouvelle vie et l’espoir des victimes
Désolation et espoir rythment la nouvelle vie des victimes du sinistre survenu au marché Petersen, dans la nuit du mardi au mercredi 5 août 2018, aux environs de 23 h.
‘’Trois jours après les massacres, il y a toujours de la vie qui reste, même quand le diable est passé’’. C’est en ces termes que l’écrivain guinéen et Grand Prix de la Francophonie, Thierno Monénembo, conclut son livre ‘’L’aîné des orphelins’’ qu’il consacre au génocide rwandais et à la vie d’un survivant de cette tragédie : Faustin Senghimana. Tropicalisons cette conclusion pour constater, deux jours après l’incendie qui s’est déclaré au marché Petersen, que la vie y reprend timidement son cours. Désolation et espoir qui renait restent le sentiment le mieux partagé. Déboussolées, désemparées et même ‘’enthousiastes’’ (pour certaines) les nombreuses victimes encerclent les lieux de l’incendie qui sont en train d’être évacués par un bulldozer, sous le regard vigilant de deux éléments de la police. L’opération, nous dit-on, a commencé depuis avant-hier. Alors que les policiers veillent à la sécurité des populations pour éviter des accidents, certaines personnes s’avancent vers l’engin qui ramasse les débris calcinés et autres objets de valeur (morceaux de fer) recyclables qu’ils récupèrent. Toute cette scène se passe dans un décor d’insalubrité où les gens pataugent après une pluie impromptue sur Dakar.
Dans son boubou marron, Balla Ndoye, commerçant et victime de ce sinistre, garde visiblement son flegme, en dépit du passage dévastateur des flammes qui ont consumé ses trois cantines. Parmi les victimes, bon nombre de femmes. Au nombre d’une vingtaine, elles occupent toute une rangée, les mines navrées et le regard perdu et évaluent toujours les pertes. Celles-ci varient d’un commerçant à un autre. Pour Khadija Traoré, coiffeuse, elle dit avoir tout perdu. Son salon, qui contenait du matériel de travail, des produits cosmétiques, des tissus et autres objets de valeur, est complètement parti en fumée. Elle évalue les pertes à hauteur de 500 mille francs Cfa. Pour le délégué du marché Fallou Fall, les estimations du bilan de cet incendie avoisinent les 2 milliards de francs Cfa.
Sur l’intervention des sapeurs-pompiers, une constante se dégage : ils étaient arrivés tôt sur les lieux. Le seul hic, c’est que leurs moyens étaient inférieurs à la gravité de l’incendie. ‘’Quand le feu s’est déclaré, j’étais rentré, mais comme j’habite tout près, je fais partie des premiers à être là, avant même les sapeurs-pompiers. Ces derniers sont venus avec 5 véhicules. C’était insuffisant’’, estime Balla Ndoye. A cette insuffisance de moyens pointée, les commerçants disent avoir vu aussi les pompiers tourner en rond, faute d’accès à cause du mauvais aménagement du marché.
Après le passage dans la matinée d’hier du maire de Dakar-Plateau, Alioune Ndoye, et du ministre de l’Intérieur, Aly Ngouille Ndiaye, pour faire le constat et partager la douleur des victimes, celles-ci fondent tout leur espoir sur l’assistance des autorités. ‘’Il faut que l’Etat nous aide. Nous avons tout perdu’’, lance Soukeyna Tall. A en croire cette dame, cet incendie est venu au mauvais moment, parce que, dit-elle, les mères et pères de famille que sont les victimes, après s’être déchargés des exigences de la Tabaski, se préparaient à l’ouverture de l’école des enfants. Dans ces conditions, seul un coup de main de l’Etat et des bonnes volontés pourrait les consoler.
En attendant cette main généreuse de l’Etat, les victimes, dans leur majorité, s’opposent à une éventuelle proposition de déménagement pour être recasées ailleurs. Toutefois, elles sont d’accord pour une reconstruction du marché. Quelle que soit la durée que cela prendra.
MAMADOU YAYA BALDE