‘’Libérez le peuple de la manipulation et de l’arrogance’’
Amadou Ba y est allé sans porter de gants. Le Premier ministre a savonné les rédacteurs de la motion de censure contre le gouvernement.
Le Premier ministre Amadou Ba a apporté, hier, une réponse salée aux députés de Yewwi Askan Wi qui ont déposé une motion de censure contre le gouvernement.
En effet, celle-ci a été présentée par ses rédacteurs comme une ‘’motion de défiance à l'égard du Premier ministre qui n'a pas voulu se soumettre à un vote de confiance des députés’’. Pour Amadou Ba, cette qualification ‘’inadéquate’’ se fonde d’emblée sur la volonté de transformer en obligation ce que l’article 55 de la Constitution considère comme une faculté laissée à l’appréciation du Premier ministre. Après sa nomination, le Premier ministre fait sa Déclaration de politique générale devant l’Assemblée nationale. Cette déclaration est suivie d’un débat qui peut, à la demande du Premier ministre, donner lieu à un vote de confiance. Ainsi, M. Ba note que cette prérogative qui consiste, pour le Premier ministre, à provoquer le vote de confiance, est différente de la motion de censure.
De plus, les députés de l’opposition ont indiqué que ‘’refuser de poser la question de confiance, à la suite de sa déclaration de politique générale, signifie que le Premier ministre a décidé de bloquer la démocratie par une attitude de défiance à la légitimité du suffrage universel’’.
Sur ce point, le chef de gouvernement regrette une véritable distorsion du langage de la part des députés de Yaw. Il estime que les rédacteurs de ce texte ont transformé une faculté en obligation. ‘’Les honorables auteurs de cette ‘motion de défiance’ (comme ils l’appellent eux-mêmes) auraient pu se passer d’établir un lien inexistant entre ces deux dispositions et se satisfaire de celles de l’article 86 qui leur confère un fondement autonome et suffisant. La lecture de l’exposé des motifs traduit une rédaction hâtive, au contenu déconnecté de la Déclaration de politique générale. Cette motion paraît avoir été rédigée avant ladite déclaration et rattachée artificiellement non à son contenu, mais à leur attente déçue’’, a ironisé l’ancien ministre des Finances.
Selon le PM, l’analyse de ce que les auteurs qualifient de ‘’motion de défiance’’ révèle des distorsions et des projections fondées sur des biais cognitifs. ‘’Mieux, par l'autocomplaisance, ils s’attribuent la capacité de restaurer, par leur motion de défiance, ‘l’intégrité de la fonction parlementaire’ en attribuant leurs insuffisances à des facteurs extérieurs’’, fustige-t-il. Aux yeux d’Amadou Ba, les députés de Yaw ont pris l’engagement de rendre le pays ‘’ingouvernable’’.
‘’Vous projetez sur le Premier ministre les intentions qui sont les vôtres. Vous cherchez (comme vous dites vous-mêmes) à bloquer la démocratie par une attitude de défiance à la légitimité du suffrage universel. Ce suffrage universel par lequel le président de la République Macky Sall a été élu et qui lui confère le droit constitutionnel de nommer un Premier ministre pour mettre en œuvre la politique qu’il a définie’’, dit-il.
Rupture
Ainsi, il souligne que la cohabitation n’est pas structurellement impossible dans régime politique sénégalais qui n’est pas un régime parlementaire, mais plutôt un régime dont la clef de voûte est le président de la République élu du peuple. ‘’L’exercice du pouvoir, dit-il, est très sérieux pour être traité avec autant de légèreté et une quête permanente de coup d’éclat’’. Il ajoute : ‘’Lorsque les critiques cessent d’être positives et constructives pour devenir systématiques et automatiques, elles perdent de leur crédibilité et de leur légitimité’’, martèle l’ancien argentier de l’État.
‘’L’Assemblée nationale a adopté le budget que notre gouvernement lui avait soumis, il y a moins d’une semaine. Cette adoption du budget, à une majorité aussi confortable, constitue en soi une marque de confiance à l’égard de notre gouvernement’’, selon le PM. ‘’Aussi, est-il curieux qu’une motion de censure soit déposée, avant même que ce même budget ne connaisse un début d’exécution, à moins qu’il ne s’agisse d’une volonté de vouloir jeter le discrédit sur nos institutions’’, a-t-il poursuivi.
A ses yeux, une véritable rupture, c’est pour aller vers une démocratie apaisée dans laquelle les politiciens ont de la hauteur et traitent avec respect et bienveillance leurs collègues, les institutions, leurs concitoyens et les pays partenaires du Sénégal. ‘’La rupture ne signifie pas non plus le fait de se mettre des œillères pour rejeter ou disqualifier tout ce que vous n’avez pas réalisé, parce que vous n’avez pas encore l’opportunité d’avoir des réalisations à votre actif’’, persifle l’ancien ministre des Finances qui regrette la démarche de l’opposition.
‘’Le peuple attend de nous tous une attitude plus patriotique, plus républicaine, plus démocratique, une attitude plus intelligente. ‘’Libérez le peuple (‘Yewwi lène askan wi’) de la désinformation, de la manipulation et de l’arrogance comme mode de communication politicienne !’’, martèle-t-il.
BABACAR SY SEYE