A Tivaouane, le temps s'est arrêté !
Le temps semble s'être arrêté à Tivaouane après l'annonce du décès de Serigne Mansour Sy à 87 ans. Reportage dans la cité religieuse.
Dans cette commune de la région de Thiès, le ciel, la terre et les fidèles sont en deuil. Serigne Mansour Sy n’est plus et Tivaouane pleure son 4e khalife. Des milliers de pèlerins convergent vers cette commune de 43 000 âmes créée en 1904. Tristesse en bandoulière, ils ont pris d’assaut la maison du défunt khalife, là où il sera enterré. Le regard vide, la mine serrée, les fidèles attristés avancent à petits pas.
La zone des mosquées vomit du monde, hommes, femmes et enfants affluant sur ce lieu devenu subitement petit. Tivaouane soupire et respire au rythme de la tristesse. ‘’Serigne Mansour est parti, notre généreux guide s’en est allé’’, répète comme un réflexe pavlovien cette dame tout de blanc vêtue et envahie par la tristesse.
Les artères deviennent de plus en plus étroites ; à ce rythme, elles risquent d’exploser. De partout on les voit venir, vêtus de leurs plus beaux habits et munis, dans leur écrasante majorité, d’un chapelet à la main. Bonnets rouges, bonnets blancs blancs bonnets, l’éventail est large et couvre presque toutes les têtes. Assises à même le sable, femmes et jeunes filles, têtes enturbannées, reposent désespérément leurs mains dans le creux de leurs pagnes.
Elles regardent devant elles, mais semblent ne rien voir. Le temps est lourd et dur à la fois. Comme pour participer à cet élan de ferveur, le soleil brille d’en haut et réchauffe cette terre martelée par un déferlement progressif. Personne ne sait l’heure à laquelle le khalife général sera mis sous terre, mais personne ne veut également rater l’ultime chance de faire les adieux à Borom Daara yi. Rien n’y fait, les appels à l’apaisement de Serigne Abdoul Aziz Al Amine ne viendront pas à bout de ce chagrin manifesté tout au long de ce jour de deuil.
De partout au Sénégal, les cars viennent déverser du monde à Tivaouane. ‘’Nous venons de Touba pour assister à l’enterrement de cet homme qui était très proche des populations et généreux envers les démunis’’, confie cette bande de jeunes gens. De leurs côtés, les membres du Comité d’organisation au service de Khalifa Ababacar Sy (COSKAS) s’activent pour permettre aux fidèles de pouvoir se reposer un peu dans cette grande salle parsemée de matelas.
Plus la nuit tombe, plus les fidèles arrivent et circulent grâce à des moyens de transport aussi nombreux que variés. Du train aux véhicules en passant par les charrettes ou alors les motos ‘’Jakarta’’. La nuit sera longue mais n’altérera en rien leur ardeur d’assister à l’enterrement de leur guide. Pour l’instant, les haut-parleurs distillent les chants coraniques de partout et pour tous.
AMADOU NDIAYE (ENVOYÉ SPÉCIAL)