Le sésame introuvable
La présente campagne agricole n’a pas dérogé à la règle. Comme les précédentes, elle se distingue par le retard noté dans la mise en place de l’engrais et de l’urée. Une situation qui n’est pas du dégoût des producteurs.
‘’L’année dernière, il y avait, au moins, une mise en place de 20 tonnes des différents types d’engrais, dans chacune des 12 communes du département. Nous, au niveau de l’Urapab, nous avions pu acquérir 160 t d’engrais que nous avions vendues aux producteurs, afin de satisfaire toute demande. Le manque d’engrais effraye les producteurs. D’ailleurs, plus de vingt producteurs nous ont saisis pour obtenir de l’engrais. Pour eux, l’engrais est un intrant incontournable dans la culture de l’arachide et du mil, parce que les sols sont très lessivés. Ils disent que l’engrais permet de booster les productions. Ils ont peur d’avoir des rendements faibles, surtout qu’il y a des variétés qui ont dépassé le moment où elles devaient recevoir de l’engrais’’, renseigne Papa Abdoulaye Diouf.
En sa qualité de président de l’ONG Union régionale des associations des producteurs agricoles du Baol (Urapab), une organisation qui revendique 36 groupements villageois et 3 700 adhérents, il demande aux services du ministère de l’Agriculture et de l’Equipement rural de ‘’hâter la mise en place de ces intrants, parce que le temps presse’’.
Même rengaine chez Ibrahima Diouf, responsable du syndicat Jappando. ‘’Nous avons reçu 25 t d’engrais pour l’arachide ; et pour le mil, seulement 10 t. Ce qui est très en deçà de ce que nous recevions au niveau de la commune de Pattar où, chaque année, on recevait 45 t d’engrais pour l’arachide et 25 t pour le mil. A dire vrai, nous ne connaissons même pas la quantité qui doit venir. On n’en connaît rien. C’est le sous-préfet et le président de la commission qui sont au courant des quantités et ils refusent de nous informer’’, dit-il.
Cette année, la mise en place des engrais pour la variété 6-20-10, encore appelée ‘engrais pour l’arachide’, est de 32 %. Pour la variété de mil 15-10-10, la mise en place, sur toute la région, est de 41 %. A ce niveau, il faut noter que le département de Bambey n’a pas encore reçu une seule tonne d’engrais pour le mil. En ce qui concerne la variété d’engrais de mil 15-15-15, la mise en place, d’après les statistiques de la Direction régionale du développement rural, est de 43 %. Pour l’urée, si on en croit un agent de la Direction régionale du développement rural, ‘’sa mise en place est très faible ; elle est de 39 % sur toute l’étendue de la région’’.
Mais au niveau de la commune de Pattar, située dans le département de Diourbel, ‘’la mise en place de l’urée est de 2 t’’, confie Ibrahima Diouf du syndicat Jappando du département de Diourbel.
‘’Les ICS ont préféré honorer une commande américaine’’
Sur les raisons du retard noté dans la mise en place de l’engrais, un agent du ministère de l’Agriculture et de l’Equipement rural renseigne : ‘’Le retard est incompréhensible. Jamais, de mémoire d’agent du service agricole, un tel retard n’avait été noté. Les explications qu’on nous a données, c’est que les Industries chimiques du Sénégal (ICS) devaient honorer une commande des Américains. Les ICS ont ainsi préféré honorer cette commande qui représentait l’essentiel de sa production, au détriment de la demande nationale. Ce qui a fait que ce retard est noté. D’ailleurs, les ICS commencent à reprendre la production.’’
Pour le retard noté dans la mise en place de l’urée, des producteurs de la région pointent un doigt accusateur sur le fils d’un ministre. Ils renseignent, sous anonymat : ‘’Depuis que le fils du ministre gère la mise en place de l’urée, nous notons des retards. Il nous nargue même.’’
Boucar Aliou Diallo (Diourbel)