La Bad annonce une nouvelle stratégie pour la période 2021-2030
La Banque africaine de développement (Bad) a lancé, un processus de consultation avec les ministres africains de la Santé et d'autres partenaires, dans le cadre de l'élaboration d'une stratégie visant à améliorer l'accès aux services de santé en Afrique, d'ici à 2030. L’annonce été faite à travers un communiqué de l’institution africaine.
La Banque africaine de développement (Bad) veut mettre fin aux défis liés à l’accès à des soins de qualité sur le continent. Ainsi, elle a annoncé, vendredi, à travers un communiqué de presse, un processus de consultation avec les ministres africains de la Santé et d'autres partenaires, dans le cadre de l'élaboration d'une nouvelle stratégie. Il s’agit de la Stratégie pour des infrastructures sanitaires de qualité en Afrique 2021-2030 (Sisqa). L’objectif est de garantir aux populations africaines un ‘’accès accru’’ à des services de santé de qualité d’ici 2030, afin d’améliorer leur qualité de vie et de contribuer à la réalisation de l’Objectif de développement durable (ODD 3) et de l’Objectif en matière de santé de l’Agenda 2063 de l’Union africaine.
D’après le rapport de la Bad la Sisqa répond à une demande de ses gouverneurs invitant l’institution à définir son rôle dans la lutte contre les déficits d’infrastructures sanitaires en Afrique, en s’appuyant sur son expertise en matière de développement des infrastructures. ‘’Cette demande reconnaît que la santé joue un caractère central dans l’amélioration de la qualité de vie des Africains et l’opportunité de réaliser leur potentiel. Elle répond également à la demande croissante des pays membres régionaux (PMR), qui souhaitent que la banque les aide à combler les lacunes en matière d’infrastructures sanitaires nationales, que la crise de la Covid-19 et d’autres crises sanitaires ont mises en évidence’’, lit-on dans le document.
2 400 milliards de dollars de production perdus chaque année
Il ressort aussi dans le rapport de la présentation de la Sisqa que les problèmes sanitaires sont pour l’Afrique une source de difficultés considérables. Malgré les progrès récents, la mortalité infantile et maternelle reste ‘’élevée’’ dans de nombreux pays africains. ‘’L’Afrique, qui ne représente que 15 % de la population mondiale, compte 50 % des décès dus à des maladies transmissibles dans le monde. Les mauvais résultats en matière de santé reflètent le manque d’accès à des services de santé de qualité : un tiers des Africains vivent à plus de deux heures de route de services de santé, et de graves pénuries existent en termes de lits d’hôpital, d’équipements médicaux et de médicaments. Les coûts économiques des défis sanitaires sont lourds. Selon les estimations, les problèmes de santé feraient perdre à l’Afrique quelque 2 400 milliards de dollars de production chaque année’’, renseigne la même source.
Du fait de sa croissance démographique, la Bad relève également que l’Afrique a des besoins importants et variés en matière d’infrastructures sanitaires. Les pays les plus pauvres et les États fragiles sont confrontés aux taux les plus élevés de maladies transmissibles et à la charge globale de morbidité la plus élevée. D’autres pays sont confrontés à des défis croissants en matière de maladies non-transmissibles, qui nécessitent une adaptation des services et des infrastructures. ‘’Sur le continent, dans son ensemble, les infrastructures sanitaires sont non seulement réparties de façon inégale, avec des lacunes importantes dans la couverture des zones rurales, mais souvent de piètre qualité. En Afrique subsaharienne, la moitié seulement des établissements de soins de santé primaires ont accès à l’eau potable et à des installations sanitaires adéquates et un tiers seulement ont accès à un approvisionnement fiable en électricité’’, poursuit le rapport.
26 milliards de dollars d’investissements annuels nécessaires
Le continent confronté à des déficits importants en matière de financement des infrastructures sanitaires, la Bad souligne que les 4,5 milliards de dollars investis chaque année dans les dépenses d’équipements par les gouvernements africains sont bien inférieurs aux 26 milliards de dollars d’investissements annuels estimés nécessaires pour répondre à l’évolution des besoins en matière de santé au cours de la prochaine décennie. ‘’Si la Covid-19 a mis en évidence la nécessité d’investir davantage, la crise a également laissé les pays africains face à des ressources très limitées et à un endettement croissant. Le soutien des bailleurs de fonds aux infrastructures sanitaires n’a cessé de diminuer ces dernières années, et le soutien disponible pour les nouvelles infrastructures secondaires et tertiaires est marqué par des déficits importants. Les pays africains auront donc besoin d’un soutien supplémentaire pour répondre aux besoins en matière d’infrastructures sanitaires, ainsi que d’une aide pour mobiliser des fonds provenant d’investissements privés, notamment des communautés de la diaspora’’, renchérit le texte.
D’après notre source, la Bad a le potentiel pour occuper un créneau essentiel en tant que financier des infrastructures sanitaires. Ceci, en s’appuyant sur son expertise en matière de développement des infrastructures et en nouant des partenariats avec d’autres acteurs du développement pour soutenir les plans nationaux de renforcement des systèmes de santé.
‘’La banque a une longue histoire de soutien dans le domaine de la santé et a intensifié son aide en réponse aux récentes crises sanitaires. Elle a la capacité de déployer un large éventail d’instruments de financement, notamment des opérations du secteur privé et des partenariats public-privé, pour aider à surmonter les obstacles à l’investissement privé dans le secteur de la santé et combler le déficit de financement global. La banque peut proposer des investissements mixtes dans les infrastructures qui mettent en relation les établissements de santé et les structures d’énergie, d’eau et de Tic, de manière à permettre des prestations de services de santé de meilleure qualité et plus innovantes. La stratégie définit également la manière dont la banque développera et consolidera son avantage comparatif dans le domaine des infrastructures sanitaires’’, rappelle l’institution africaine.
Concernant les activités de gestion des connaissances et de dialogue sur les politiques et assistance technique, la Bad indique qu’elle veillera à ce que tous ses investissements dans les infrastructures sanitaires aillent de pair avec le dialogue sur les politiques, l’assistance technique et le renforcement des capacités. ‘’Une telle démarche permettra d’améliorer les perspectives d’obtention d’un impact stratégique tout en minimisant les risques d’investissement dans des projets d’infrastructure de type ‘éléphant blanc’ qui sont mal utilisés en raison du manque de financement ou de personnel. Selon les critères de sélectivité de cette stratégie, la Banque n’investira que dans des infrastructures sanitaires qui s’inscrivent dans des plans de renforcement des systèmes de santé nationaux et des cadres de financement crédibles’’, explique l’institution en charge du financement du développement du continent.
Les sept facteurs qui risquent de bloquer la stratégie
Même si cette stratégie vise à produire des résultats à fort impact en faveur des populations africaines et à améliorer leur bien-être sur le long terme et de manière pérenne, il est relevé dans le rapport que sept risques majeurs ont été identifiés. Et ils nécessitent un suivi et des mesures d’atténuation. ‘’La lenteur de la reprise économique après la pandémie et l’augmentation de l’endettement ont pour conséquence de priver les PMR des ressources nécessaires pour investir dans le développement des systèmes de santé. Un manque de soutien politique pour l’investissement dans le renforcement du système de santé, ce qui se traduit par le manque de politiques et de stratégies crédibles et par la faible priorité accordée à la santé dans les budgets nationaux et par et l’incapacité de combler le déficit de financement de 26 milliards d’USD pour les infrastructures sanitaires. L’adhésion mitigée des autres partenaires de développement, d’où des possibilités limitées d’approches harmonisées et de cofinancement’’, alerte la banque.
Il convient également de noter parmi ces challenges, l’adhésion ‘’insuffisante’’ du secteur privé en raison de la perception d’un risque d’investissement élevé, d’où un ‘’faible appétit’’ pour l’investissement et un frein à l’innovation. ‘’Le manque d’appropriation et de capacité au niveau régional entraîne le peu de priorité accordée aux initiatives d’harmonisation des réglementations sanitaires. L’absence d’appropriation du portefeuille de la santé au sein de la banque a entraîné un sous-investissement et un manque de synergie avec les autres portefeuilles’’, note l’institution.
Toutefois, la Bad a fait savoir qu’elle effectuera une revue à mi-parcours de la Sisqa en 2025 afin de définir un plan d’exécution actualisé pour la période restante de la stratégie. Cette revue à mi-parcours portera sur les progrès réalisés dans la mise en œuvre de la stratégie, les défis rencontrés et les enseignements tirés de cette mise en œuvre. Sur la base de cette analyse, elle définira également les éventuels ajustements nécessaires à la mise en œuvre jusqu’à la fin de la stratégie en 2030, afin de garantir un impact maximal sur le développement.
MARIAMA DIEME