Les dahiras prêts à affronter le recteur
La décision du Directeur du Centre des œuvres universitaires de Dakar (Coud) de remettre de l'ordre au sein du campus, en réglementant les activités religieuses, n'agrée pas le collectif des dahiras d'étudiants (Code/ucad). Il entend saisir les khalifes généraux pour neutraliser ces ''détracteurs de l'islam''.
Les mouvements religieux seraient-ils devenus trop encombrants au sein de l'espace universitaire ? La nouvelle mesure prise par le Directeur du Coud de restaurer l'ordre à l'Ucad a, en tout cas, suscité la colère noire des membres des différents dahiras qui y ont établi leurs bases. Dans un rapport, il souligne qu'il va réglementer les activités religieuses dans le campus social, en vue de garantir la quiétude de tous les résidents. Une stratégie de rupture qui vise aussi à mettre un terme aux pollutions sonores au sein du campus
Hier, lors d'un point de presse, le collectif des dahiras d'étudiants (CODE) s'est insurgé contre cette initiative du directeur du Coud par ailleurs chef du département des œuvres sociales, Babacar Diagne.
Selon Moustapha Sène, responsable du Code, le directeur du coud, en ''bon travailleur social, devait éviter de stigmatiser et de décourager les associations religieuses étant donné que ces dernières sont les seules actrices de la quiétude au sein du campus social, ne participant à aucune perturbation de quelque nature que ce soit''. Il ajoute que ''dans toutes les universités du monde, les autorités des campus sociaux prennent en compte les réalités socioculturelles de leurs différentes composantes.''
En attendant de rencontrer ''les différents khalifes généraux en vue de recueillir leurs avis et leurs recommandations'', les étudiants membres des différents dahiras n'ont pas raté les autorités universitaires. Ils leur reprochent ''l'organisation des navétanes qui n'ont rien de pédagogiques et qui ont engendré beaucoup de violences''.
Autre grief : ''nous avons constaté un favoritisme notoire dans le traitement offert aux associations sportives ou politiques au détriment de celles religieuses... Il s'y ajoute que le coud compte parmi ses services un département de l'animation culturelle et sportive. Où est la religion dans tout cela ?''
Les dahiras dénoncent aussi la mise en place d'une écurie au niveau du campus par les autorités du coud. ''Elle ont aménagé un site d'entraînement, alors que ces lutteurs sont tout sauf des étudiants''.
MOUSTAPHA TAMBA, PROFESSEUR À L'UCAD ''La religion doit être dissociée de la science'' Le professeur Moustapha Tamba enseigne la sociologie des religions au département de sociologie de la Faculté des lettres de l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Il considère qu'il faut savoir raison garder. ''Jamais, dit-il, les mourides, tidjanes et khadres ne vont déstabiliser le pays, même si on doit juste empêcher que l'islam politisé ne régisse nos sociétés.'' Interpellé sur la décision du directeur du Coud, il juge que c'est une initiative noble, dans la mesure où M Babacar Diagne cherche à sauvegarder l'espace public. ''Chacun doit pratiquer sa religion chez lui, en vue d'éviter des conflits d'intérêts. C'est la science et le savoir qui doivent primer au niveau de l'université. On ne doit pas mélanger la science et la religion. Celle-ci doit avoir son propre espace, il ne faut pas confondre les rôles.'' Pour le professeur, il y a lieu de remonter le fil du temps. ''Tout a commencé dans les années 80 quand on a construit une mosquée dans cet espace laïc. Les confréries ont par la suite commencé à essaimer dans le campus. Chaque confrérie a installé ses antennes. L'espace universitaire a été confondu à l'espace religieux''. Le professeur juge donc normal que le directeur du coud bute sur des difficultés dans son désir de sauvegarder l'espace public. |
Matel BOCOUM